Après une hausse de 10% des tarifs régulés du gaz au 1er juillet, voici venu le tour de l’électricité. La Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) a en effet proposé une hausse de 0,48% TTC des tarifs réglementés de vente d’électricité aux particuliers. Si, dans un premier temps, la hausse pourrait donc être contenue sous la barre des 1%, au 1er août, le ton sera tout autre cet hiver. Ainsi début 2022, la flambée pourrait être de 5% à 6%. Comment expliquer un tel phénomène, alors que les prévisions de production d’EDF ont été revues à la hausse?
Au-delà de financer l’implantation à travers tout le territoire de moyens de production alternatifs au nucléaire, ce tarif régulé existe afin de permettre aux concurrents d’EDF de subsister en garantissant un prix suffisamment élevé pour leur permettre de dégager un profit.
Les Français et EDF, pris au piège des tarifs régulés
C’est cette nécessité de faire survivre coûte que coûte en France cette concurrence exigée par Bruxelles qui explique en partie que le tarif du kilowattheure augmente pour tous les foyers. En effet, si EDF produit sa propre électricité et doit en céder à prix cassé près de 30% à ses concurrents, ces derniers s’approvisionnent aussi sur les marchés de gros (marché de capacités), car la plupart ne produisent pas l’électricité qu’ils vendent aux Français.
Or, dans le contexte de sortie de crise du Covid-19, le cours du kilowattheure sur le marché de gros flambe «de 40%», relate BFM Business, poussé par l’envolée des cours des énergies fossiles (une partie de l’électricité achetée par les fournisseurs alternatifs provient de pays voisins). Afin de préserver la compétitivité des acteurs privés, face au kilowattheure d’EDF à bas coût de production, la CRE pourrait donc avoir la main lourde cet hiver. Ironie du sort, le consommateur français est donc victime de ce que le parc nucléaire devait justement le préserver: l’exposition aux fluctuations d’un marché.
Le premier choc pétrolier, au tournant des années 70, avait souligné cette nécessité d’indépendance énergétique pour la France. Le gouvernement de Pierre Messmer avait alors donné un coup de fouet au parachèvement du programme électronucléaire français, donnant naissance aux réacteurs nucléaires qui fournissent aujourd’hui encore plus de 70% de l’électricité nationale. Un demi-siècle plus tard, un travail de sape a été réalisé par la dérégulation poussée à Bruxelles, l’Allemagne craintive de voir l’énergie des géants qu’étaient EDF et GDF submerger son marché national. Voilà un vrai bond en arrière de la France en matière de souveraineté énergétique.
Face à ce constat, aussi étonnant que cela puisse paraître, l’une des solutions aujourd’hui envisagées consiste… à déréguler encore plus le marché. C’est en tout cas ce que laisse entendre un journaliste de BFM Business.
Pour régler le problème dû à la concurrence… plus de concurrence ?
Reste donc à savoir quelle solution choisira l’exécutif: trancher dans ses revenus, alors qu’il reste empêtré dans la crise sanitaire… ou se dédouaner sur EDF, qui d’ailleurs est déjà dans le collimateur de Bruxelles? Si à court terme, une hausse de l’approvisionnement par EDF de ses concurrents pourrait limiter la casse, une telle opération ne ferait que les renforcer tout en n’empêchant pas un tel épisode de se reproduire.
Bref, à terme, déposséder encore un peu plus EDF ne ferait qu’aggraver le problème de l’exposition des consommateurs français à un marché … un problème hérité du rêve européen et c’est certainement cette dimension-là que l’actuel gouvernement tiendrait à minimiser avant les prochaines échéances électorales.