Jeudi 1er juillet, Nicolas Perruchot (Les Républicains) a laissé son fauteuil de président du conseil départemental du Loir-et-Cher à son successeur Philippe Gouet, marquant par ailleurs son retrait de la vie politique. Cible de plusieurs polémiques, il est à présent visé par une enquête journalistique menée par France Télévisions et la cellule investigation de Radio France, lui reprochant deux versements suspects d’une valeur totale de 35.000 euros.
L’affaire tourne autour de son association créée en 2018, l’Observatoire du dialogue social (ODS), censée «produire des notes à destination d’entreprises intéressées par la question du dialogue social», mais aussi «gérer les ressources liées au mécénat, au parrainage ou à des dons divers». Un travail qu’il met en parallèle avec son rapport parlementaire sur les financements des organisations syndicales, le seul de la Ve République à n’avoir jamais été publié.
Ainsi, l’ODS a reçu 20.000 euros en août 2018 de la part de la Fédération française du bâtiment (FFB), laquelle entretient des relations régulières avec le département. L’entreprise TDF, chargée d’installer la fibre dans le Loir-et-Cher, verse en février 2019 15.000 euros supplémentaires sur le compte de l’association. La somme finit par être transférée sur le compte privé de Nicolas Perruchot. Les patrons de la FFB et de TDF n’ont pas donné réponse à France Télévisions.
Autre élément suspect, l’entreprise SIM, spécialisée dans les emballages plastiques, a versé en juin 2019 5.000 euros à l’association Coup de cœur, gérée par la femme de Nicolas Perruchot, lesquels se sont retrouvés sur le compte d’ODS. Le patron de SIM a assuré vouloir faire un virement à Coup de cœur, et non à ODS. Un deuxième virement de 5.000 euros était prévu, mais il a été annulé.
Explications
L’ancien président de département justifie auprès du média public que la FFB, TDF et SIM «voulaient nous aider, voulaient qu’on poursuive ces travaux», sans préciser la nature de ces derniers. Il a d’ailleurs refusé de livrer des preuves de ces documents. Quant à savoir pourquoi de telles sommes ont été versées sur son compte privé, son avocat cite d’abord un rôle de «consultant» de M.Perruchot dans l’association, puis évoque un «blog» ou un «site Internet» dont il devait s’occuper, mais qui n’a jamais vu le jour.
Les sommes en question auraient été remboursées fin juin 2021, quatre mois après que Nicolas Perruchot a annoncé l’abandon du projet. À l’époque de ces versements, l’Observatoire du dialogue social était présidé par Richard Pichet, collaborateur de l’ex-président du Loir-et-Cher au conseil départemental, qui nie l’existence d’un contrat entre M.Perruchot et ODS, et assure ne pas avoir connaissance d’un «blog, ni de la création d’un site Internet» lorsqu’il était en fonction. «Faute d’éléments précis apportés par la défense de Nicolas Perruchot, de nombreuses questions restent en suspens», déplore le média.
Polémiques
Sur la dernière année de son mandat, l’élu a été au cœur de plusieurs affaires gênantes. En septembre 2020, Marianne révélait des extraits de ses propos tenus lors d’une réunion au début de ce mois depuis un enregistrement authentifié par le magazine.
«La plupart des gens, pardonnez-moi, sont cons. Une très grande majorité, au moins 80%, pas 30», avait-il lâché, avant d’ajouter «n'oubliez pas qu'on s'adresse à des CE1 ou des CE2».
Via le conseil départemental, M.Perruchot avait porté plainte contre X.
Début 2021, le Canard enchaîné a révélé qu’il faisait construire une résidence secondaire en Corse d’une valeur de 1,27 million d’euros. Pour cela, il a bénéficié d’un prêt en 2018 de 300.000 euros pour le terrain, puis d’un autre 800.000 euros en 2020 pour la construction, ce qui interroge même au vu de sa rémunération de président de département. L’affaire a été classée par la HATVP, selon son avocat.
Dans un entretien accordé en janvier de cette année à La Nouvelle République, Nicolas Perruchot pointe des actes « destinés à me déstabiliser» et qui touchent également sa famille. Son domicile a notamment été tagué. «On fouille dans mes comptes bancaires, on dénonce mes investissements personnels et privés», se plaint-il. En se retirant de la vie politique, sans doute espère-t-il que les investigations cesseront.