«Un allié puissant aux capacités limitées», titre un rapport sur l’armée française du think tank américain Rand Corporation publié en juin. Ses trois auteurs ont analysé les capacités militaires de la France en tant que force d’appui des États-Unis en cas de guerre conventionnelle de haute intensité avec la Russie sur le sol européen.
Louant ses compétences étendues lui permettant de s’engager dans des missions de tous types, les chercheurs émettent des réserves quant aux capacités de l’armée française à soutenir un conflit de longue durée. Ils pointent des faiblesses dans son transport aérien stratégique, son manque de munitions, et ses systèmes de neutralisation des défenses antiaériennes ennemies.
Les forces françaises présenteraient également des problèmes de préparation opérationnelle, en particulier au niveau de leurs hélicoptères. Enfin, les analystes craignent que la diminution de son budget et de ses autres missions à l’étranger, notamment au Sahel, se fasse ressentir en cas de conflit majeur en Europe, notamment dans les pays baltes.
Loi de programmation militaire
Il convient cependant de noter que ce rapport de 100 pages, commandé par la Défense américaine, se base en partie sur des informations de 2018, avant que le ministère des Armées n’annonce son projet de loi de programmation militaire 2019-2025, lequel augmente considérablement son budget (+1,7 milliard d’euros par an, puis +3 milliards dès 2023).
Il prévoit notamment une hausse des effectifs, un renouvellement et une modernisation des équipements et des véhicules. Le document ne tient pas non plus compte de l’annonce récente de la fin de l’opération Barkhane en tant qu’opération extérieure, tandis que l’armée se prépare à un futur conflit majeur.
Exercice militaire
En 2023 se tiendra en Champagne-Ardenne un vaste exercice, Orion, qui pourrait inclure des manœuvres conjointes des armées française, américaine, belge et britannique. D’après une déclaration du général Vincent Desportes à Atlantico, il s’agit de «redonner à l’armée française l’habitude à engager et commander des moyens sur de vastes espaces et des durées longues», un point précisément abordé dans le rapport de Rand Corporation.
L’exercice s’inscrit également dans l’hypothèse d’un conflit armé de grande intensité dans un futur proche. En octobre 2020, dans un entretien aux Échos, le chef d’état-major des armées François Lecointre (qui quittera son poste en juillet) avait révélé l’objectif d’être «capable, après six mois de montée en puissance, de soutenir un tel engagement pendant six mois».
La Russie, la Chine ou encore l’Iran avaient été cités par M. Desportes comme des «candidats» à ce conflit potentiellement «dévastateur». Moscou, accusé à de multiples reprises depuis 2014 de vouloir envahir une partie de l’Ukraine, a toujours nié toute intention militaire dans ce pays. En juin, elle a également déploré que l’idée d’un sommet UE-Russie ait été abandonnée, malgré la récente rencontre à Genève entre Biden et Poutine, marquée par une volonté de normaliser les relations entre les deux pays.