Sous le soleil de midi, il a été jeté aux flammes. Lundi 14 juin 2021, dans la préfecture de Vo, dans le sud-est togolais, un homme vient de connaître une mort terrible. Il était accusé par les habitants en colère d’avoir profané une tombe.
La scène s'est déroulée dans le village de Wogba, à quelque 60 kilomètres de la capitale Lomé. Selon les sources sur place contactées par Sputnik, l’homme a été appréhendé alors qu'il était à l'œuvre dans un des deux cimetières du village. Il était accompagné de trois autres personnes, parmi lesquelles une femme, qui ont pris la fuite, sauvant, littéralement, leur peau.
La profanation, un fait courant dans la préfecture
Le procureur a été saisi et une enquête judiciaire ouverte à la suite de ce meurtre, renseigne à Sputnik le préfet de Vo, Kokou Léguédé.
La profanation des tombeaux est un fait courant dans cette préfecture depuis quelques années. Sur les 10 dernières années, au moins 300 tombeaux auraient été profanés rien que dans le village de Wogba, selon Altlantic Infos, le média togolais en ligne qui a été le premier à révéler les faits.
«Le phénomène est réel dans notre préfecture et plus accentué dans les villages comme Adankpo-Kondji, Akoumapé et surtout à Wogba où l’homme a été brûlé vif lundi. D’après ce qui m’est revenu comme information, il aurait été surpris en train de profaner une tombe. Il faut dire que, dans ces villages, nous avons régulièrement reçu des plaintes de ces situations. Les gens sont exacerbés d’enterrer leurs morts et de découvrir le tombeau ouvert quelques jours ou mois après», a déclaré Kokou Léguédé à Sputnik.
Plus d'une fois, les autorités de la préfecture de Vo ont pu mettre en prison certains profanateurs de tombes, leur évitant ainsi la vindicte populaire.
Le préfet raconte que le commissariat de police de la préfecture a actuellement en sa possession «quatre crânes au moins». Des gens qui ont profané des tombes les avaient en leur possession quand on les a arrêtés.
«À ceux-là nous avons pu éviter la vindicte populaire et ils ont été mis en prison. Les crânes, nous sommes en train de voir comment les réinhumer. De même, il y a de cela trois ou quatre ans, la gendarmerie a été amené à casser des fétiches de certains prévenus, et nous avons été surpris de voir des crânes et des ossement humains dedans», détaille le préfet de Vo.
La situation est telle que, dans la préfecture, des familles ne vont plus enterrer leurs défunts dans des cimetières. «Elles enterrent chez eux, clandestinement, alors que c’est interdit. Ou alors, ils vont mettre sous terre des cercueils vides, à l'occasion de la cérémonie d'enterrement, mais le corps a déjà été inhumé à la maison».
«Nous projetons une tournée pour rappeler l’interdiction faite par l’État d’enterrer les morts à domicile, et voir ensemble comme remédier à la situation», prévoit Léguédé Kokou.
Un arrêté datant de janvier 1933, toujours en vigueur, interdit l'enterrement des morts à domicile. En septembre 2020, le gouvernement a annoncé dans un communiqué que «tous les corps objets d’enterrement à domicile et sans aucune autorisation seront systématiquement exhumés, et des poursuites envisagées contre les responsables de ces manquements». Il a autorisé les préfets à procéder à une inspection sur l’ensemble du territoire pour «faire respecter les dispositions prévues par les textes en vigueur».