Environ 14.000 morts: le prix payé par la France suite au confinement tardif, selon Le Monde

© AFP 2023 ANNE-CHRISTINE POUJOULATDes soignants dans une unité de soins intensifs dans l'hôpital Saint-Camille à Bry-Sur-Marne
Des soignants dans une unité de soins intensifs dans l'hôpital Saint-Camille à Bry-Sur-Marne - Sputnik Afrique, 1920, 18.06.2021
S'abonner
Plus de 14.000 décès, environ 112.000 hospitalisations et quelque 160.000 cas de Covid-19 longs supplémentaires auraient pu être évités en France, selon des calculs du Monde, si les mesures de restriction préconisées par les scientifiques avaient été appliquées dès février.

Sur fond d’amélioration de la situation sanitaire, le déconfinement progressif se poursuit en France, le gouvernement ayant même décidé de mettre fin à certaines restrictions anti-Covid plus tôt que prévu. Ainsi, le port du masque n’est plus obligatoire à l'extérieur et le couvre-feu sera levé dès ce dimanche.

Toutefois, même si le nombre de contaminations n’est plus très important et a été de, selon Santé publique France, 2.786 nouveaux cas le 17 juin, et même si celui de malades plonge sous la barre des 12.000, dont moins de 2.000 en réanimation, Le Monde s’est demandé quelle aurait été la situation si Emmanuel Macron avait écouté les scientifiques et pris des mesures sérieuses deux mois avant qu’il ne l’ait fait.

Ainsi, selon les données du journal, environ 14.600 décès, 112.000 hospitalisations, dont 28.000 en réanimation, et 160.000 cas de Covid-19 longs auraient pu être évités. Pour son étude, Le Monde a pris les courbes d’évolution des trois indicateurs épidémiologiques principaux, que sont les décès, les réanimations et les hospitalisations, de Santé publique France pour les faire «avancer» de deux mois en les déplacer du 1er avril au 1er février. Pour les Covid-19 longs, dont le système de comptabilisation a été un peu autre, il s’est avéré qu’environ 1,62 million de cas symptomatiques auraient pu être évités, soit quelque 160.000 Covid-19 longs.

Joint par Le Monde, le ministère de la Santé n’a pas souhaité «commenter des chiffres dont il ne connaît pas la méthodologie».

Le journal précise que le travail a été réalisé sous le contrôle d’une équipe de l’École des hautes études en santé publique de Rennes.

«Avec un confinement strict»

C’est à la mi-janvier que le conseil scientifique propose au Président de la République de confiner, notamment pour éviter à la France une troisième vague enregistrée au Royaume-Uni après l’apparition du variant B.1.1.7, appelé «anglais». Les experts proposent quatre types de mesures, qui vont du couvre-feu généralisé à 18 heures au confinement strict. Toutefois, Jean Castex choisit un simple couvre-feu à l'échelle métropolitaine, estimant que, quoique «fragile», la situation demeure «maîtrisée» et ajoutant que la stratégie française est «bonne».

Le 29 janvier, le ministère des Solidarités et de la Santé publie une note d’éclairage sur la situation dans le domaine des variants, indiquant clairement «une progression du variant anglais en France et en Europe dans les pays n’ayant pas encore adopté des mesures de confinement strict».

«Les pays les plus touchés n’ont pu arrêter le variant anglais qu’avec un confinement strict: Royaume-Uni (confinement strict national le 4 janvier), Irlande (confinement strict national le 30 décembre) et Portugal (confinement strict national débuté le 15 janvier et complété par la fermeture des écoles le 21 janvier, en attente de résultats).»

Selon deux études de modélisation, les auteurs de la note constatent que dans le cas d’un «confinement strict de quatre semaines» entamé à partir du 1er février «on observe une décroissance forte de l’incidence et des besoins hospitaliers, avec environ 5.000 cas détectés à son issue».

«Si le confinement est retardé d’une semaine, il faudra une semaine de plus pour atteindre l’objectif de 50.000 cas», est-il souligné.

Mais les scientifiques préviennent: «les scénarios de reprise montrent que l’augmentation du nombre de cas reprendra à l’issue du confinement».

«Nous avons eu raison»

Finalement, le Président renonce à confiner en janvier. Il faut dire que le chef de l’État a commencé à prendre ses propres décisions dès avril 2020, lorsqu’il a annoncé une réouverture des écoles à partir du 11 mai, contre l’avis du conseil scientifique.

La situation ne s’est pas dégradée du jour en lendemain et le mois de février a été marqué par un plateau. Toutefois, en mars la situation commence à se détériorer et les hospitalisations montent en flèche.
Le 25 mars 2021, malgré le regain épidémique, Emmanuel Macron refuse tout «mea culpa».

«Je peux vous le dire: nous avons eu raison de ne pas reconfiner la France à la fin du mois de janvier parce qu'il n'y a pas eu l'explosion qui était prévue par tous les modèles», a-t-il indiqué.

Cinq jours plus tard, le 31 mars, l’Élysée publie une adresse aux Français réinstaurant le confinement.

«À partir du samedi 3 avril et pour quatre semaines, les mesures de freinage déjà en vigueur dans 19 départements seront étendues à tout le territoire métropolitain.»

«Ces deux mois de retard ont eu un coût», constate auprès du Monde l’épidémiologiste Pascal Crépey, de l’École des hautes études en santé publique de Rennes.

À quoi s’attendre en été?

Entretemps, l’infectiologue Karine Lacombe a déclaré dès le 6 mai que l’été pourrait «devenir un cauchemar» sur le plan épidémique. Elle a constaté que la situation sanitaire s'améliorait progressivement mais qu’il était impossible de la qualifier de «très bonne».

La spécialiste relève par ailleurs des décisions plus «politiques» que «scientifiques» pour lutter contre l'épidémie.

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала