Le scénario d’un futur film d’un réalisateur néo-zélandais, qui vante la position de la Première ministre Jacinda Ardern après la fusillade dans deux mosquées de Christchurch en mars 2019, a suscité le mécontentement de certains experts et de la communauté musulmane en Nouvelle-Zélande, relate le Hollywood Reporter.
L’action du long-métrage se déroule dans les jours qui suivent l’attaque d’un suprémaciste blanc contre les mosquées de Christchurch. Son personnage central n’est pas un survivant ou l’assaillant, mais Jacinda Ardern, dont le rôle serait confié à l’australienne Rose Byrne.
Le film montre comment elle a contribué à la consolidation du peuple en publiant un message de compassion et d'unité, et ses efforts visant à interdire les fusils d'assaut, précise le Hollywood Reporter. Le film a comme titre They Are Us («Ils sont nous»), une phrase prononcée par Mme Ardern dans un discours de l’époque.
Un hashtag spécial lancé en ligne
Les critiques du film estiment que l’accent mis sur les activités de la chef du gouvernement fait oublier l'expérience des musulmans toujours aux prises avec les conséquences du massacre. Des survivants, des musulmans et plusieurs personnalités politiques et publiques ont réagi au projet en rendant populaire le hashtag #TheyAreUsShutdown («Fermez le projet They Are Us») sur les réseaux sociaux.
«Oui, à propos, c’est du suprémacisme blanc», a notamment indiqué sur Twitter Golriz Ghahraman, députée du Parti vert au parlement néo-zélandais.
Yes, this 👇🏽 is white supremacy btw #TheyAreUsShutDown https://t.co/hsoEa33qOC
— Golriz Ghahraman (@golrizghahraman) June 11, 2021
«Détourner l’attention du terrorisme blanc vers le récit d’un sauveur blanc», tel est l'objectif des auteurs du film selon un utilisateur de Twitter.
Shifting the focus away from white terrorism to white saviorism.
— Gentle-Pig (@tomobosa) June 11, 2021
«"They Are Us ne concerne pas tant l’attaque que la réponse à l’attaque". Oui, le meurtre de 51 musulmans n'est que la toile de fond de l'histoire d'une femme blanche devenue une grande dirigeante. Les BIPOC [personnes autochtones, noires et de couleur, ndlr] ne sont vraiment que des accessoires dans ce monde de Blancs. #TheyAreUsShutDown», indique une internaute.
“They Are Us is not so much about the attack but the response to the attack.” Yes, the murder of 51 Muslims people is only the backdrop to the story of a how a white woman became a great leader. BIPOC are really just props in this white peoples world. #TheyAreUsShutDown
— Shaneel Lal (They/Them) (@shaneellall) June 10, 2021
Tony Green, un fidèle de la mosquée An-Nur de Christchurch qui a été porte-parole de l'Association musulmane de Canterbury après les attentats, a déclaré que le lancement du projet avait indigné des proches des victimes, précise le groupe de presse néo-zélandais Stuff.
«C’est vendu comme une […] représentation de l'héroïsme face au terrorisme. Dans son essence, c'est une histoire sur un acte du suprémacisme blanc qui est centrée sur les voix blanches, les sentiments blancs et l'héroïsme blanc», est-il affirmé dans un article du New Zealand Herald.
Une pétition reçoit des milliers de signatures
Une pétition en faveur de la fermeture du projet a déjà recueilli plus de 40.000 signatures depuis son lancement le 11 juin sur le site Change.org par la National Islamic Youth Association de Nouvelle-Zélande.
«Nous protestons contre le film They Are Us, car il écarte les victimes et les survivants et concentre plutôt la réponse d'une femme blanche», indiquent les auteurs de la pétition.
Mme Ardern a pris ses distances avec le film en indiquant que «le Premier ministre et le gouvernement n'ont aucun lien avec» ce projet. Elle a déclaré à RNZ que les cinéastes ne l'avaient consultée sous aucune forme au sujet de leurs projets.
Fusillade de Christchurch
Le 15 mars 2019, un suprémaciste blanc australien, Brenton Tarrant, a abattu 51 fidèles durant la prière du vendredi dans deux mosquées de Christchurch, en Nouvelle-Zélande, suscitant une immense vague d'indignation dans le monde entier.
En août 2020, il a été condamné à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. La Première ministre du pays, Jacinda Ardern, a aussitôt réagi en lui souhaitant une vie de «silence total et absolu».