À l’heure où les élections parlementaires n’attirent plus les foules, comme l’ont encore prouvé les législatives partielles, l’intelligence artificielle pourrait-elle faire son entrée en politique? Cette idée inhabituelle ne semble pas déplaire aux Européens, à en croire un sondage de l’IE Center for the Governance of Change (CGC).
Plus de la moitié d’entre eux (51%) se disent en effet favorables à une réduction du nombre de leurs parlementaires nationaux, et à leur remplacement par un algorithme. Les Espagnols (66%) et les Italiens (59%) sont les plus enthousiastes. Plus de la moitié des Français sont également séduits (52%).
De l’autre côté du globe, la palme revient aux Chinois qui plébiscitent l’idée à 75%. Il faut dire que l’Empire du milieu se penche sur les questions d’intelligence artificielle depuis plusieurs années et que certaines de ces applications ont déjà envahi la vie quotidienne là-bas.
Les technologies de reconnaissance faciale permettent ainsi de retirer de l’argent aux distributeurs, de régler certains achats ou de prendre les transports en commun. Une technologie que souhaite d’ailleurs adopter le métro de Moscou.
En Chine, la reconnaissance faciale, déjà très présente dans la surveillance des espaces publics, fait son entrée dans les magasins : on peut désormais payer avec son visage ➡️ Explications #AFP pic.twitter.com/elHsO6m3Qi
— Agence France-Presse (@afpfr) September 4, 2019
Sans surprise, c’est chez les jeunes que l’idée de «cyber-députés» remporte le plus de suffrages, 60% des 25-34 ans l’approuvant.
Défiance envers la démocratie
Au-delà de l’aspect provocateur de la question, le sondage témoigne aussi du scepticisme grandissant des Européens face aux institutions démocratiques, comme l’explique à CNBC Oscar Jonsson, directeur académique au CGC et principal chercheur derrière l’enquête.
«Depuis des décennies, la confiance en la démocratie comme mode de gouvernance décline. La perception générale est que la politique va de mal en pis, et les politiciens sont évidemment blâmés pour ça. L’enquête ne fait que capturer l’air du temps», déclare ainsi le chercheur à la chaîne américaine.
Oscar Jonsson souligne aussi l’écart qui sépare aujourd’hui les parlementaires des simples citoyens, ces derniers ne les fréquentant pas et connaissant parfois mal leur travail. Une absence de lien qui peut expliquer les résultats du sondage.
Le fait d’«élire» un algorithme au Parlement pourrait cependant ne rien changer au fond du problème, souligne le média TheNextWeb. En effet, loin d’être neutre et impartiale, l’intelligence artificielle serait inévitablement biaisée et nourrie par les préjugés de ceux l’ayant conçue. En outre, un tel algorithme ne serait pas en mesure de justifier ses décisions, et donc de rendre des comptes à ses administrés.