Dans les campagnes, les Français se dressent vent debout contre les éoliennes. D’ailleurs, la question pourrait s’imposer au menu des prochaines échéances électorales. Et l’enjeu n’est pas seulement local. La multiplication de ces installations en France, avec pour objectif de remplacer les centrales nucléaires, soulève le défi de la souveraineté électrique selon Fabien Bouglé, lanceur d’alerte écologiste: «Lors de la prochaine Présidentielle, nous serons à la croisée des chemins de l’avenir énergétique de la France. On aura un choix de société à faire», plaide l’auteur d’Éoliennes: la face noire de la transition écologique (éd. du Rocher, 2019).
«Voulons-nous une électricité chère, indirectement polluante et intermittente, nous rendant dépendants de l’Allemagne? Ou voulons-nous une indépendance énergétique, peu chère et fiable, avec l’électricité décarbonée que nous offrent notre nucléaire et notre réseau hydroélectrique?» interpelle l’essayiste au micro de Sputnik.
En outre, l’installation d’éoliennes s’accompagne quasi immanquablement de la construction de centrales thermiques: gaz, fioul ou charbon. Eh oui, il faut bien compenser leur fonctionnement intermittent! Notamment, quand, en cas de calme plat, leurs pales se font porter pâles. «En moyenne, on est à 1.000 grammes de CO2 par kilowattheure produit» dans les centrales à charbon, souligne Fabien Bouglé. Un chiffre à rapprocher des «6 grammes» par kilowattheure produit dans une centrale nucléaire.
«Le nucléaire et le réseau de barrages rangent la France parmi les nations dont la production électrique est la plus décarbonée», rappelle Fabien Bouglé.
Pourtant, selon une étude BVA d’avril 2019, plus de deux tiers des Français (69%) estiment à tort que la production d’électricité nucléaire contribue au dérèglement climatique. Une méconnaissance des réalités scientifiques fort répandue. Et surtout une ignorance providentielle que ne manquent pas d’exploiter les ennemis du nucléaire. Souvent dans le dessein de se plier aux désirs, voire aux diktats, de Berlin.
Éolien: la souveraineté électrique de la France dans la balance
Malgré ces chiffres, l’Allemagne et ses alliés antinucléaires ont obtenu de la Commission que l’atome ne figure pas parmi les énergies vertes dans la taxonomie européenne publiée mi-avril 2021. En riposte, la France et ses alliés ont obtenu que le gaz naturel, auquel l’Allemagne veut de plus en plus recourir (notamment via le projet Nord Stream 2), n’y figure pas non plus. Cette actualité souligne la dimension supranationale de la question énergétique qui pourrait être posée aux Français en 2022.
Or, en France, pour permettre à des entreprises privées de générer des profits face un acteur dont l’électricité est produite par des centrales et des barrages payés par les contribuables, la seule solution consiste à gonfler les prix.
Nucléaire public français contre éoliennes privées étrangères
Mais, au-delà des inconvénients, tant écologiques qu’économiques, ce qui inquiète notre intervenant, c’est la volonté de remplacement de centrales nucléaires «appartenant aux Français à travers EDF», par des éoliennes majoritairement produites et gérées par des compagnies étrangères.
Sur le marché de l’éolien, les groupes étrangers se taillent la part du lion. Les candidatures retenues fin avril par le ministère de la Transition écologique pour le champ éolien off-shore qui doit voir le jour au large du Cotentin d’ici à 2028 en sont une illustration. Parmi elles figurent bien des énergéticiens français (Total, EDF et Engie), mais ils postulent systématiquement en association avec des groupes étrangers. On retrouve ainsi le conglomérat allemand RWE, le pétrolier néerlandais Shell, le pétrolier canadien Enbridge soutenu par le Conseil d'investissement du régime de pensions du Canada (CPPIB), le portugais EDPR ou encore l’énergéticien suédois Vattenfall.
Enbridge est déjà présent sur les champs éoliens prévus au large de Fécamp et de Courseulles, aux côtés de l’allemand WPD et d’EDF Énergies renouvelables. On notera également la présence du danois Dong Energy à Saint-Nazaire et de l’espagnol Iberdrola à Saint-Brieuc où le belge Poweo est, quant à lui, passé sous pavillon français après avoir été racheté par Total. Quant à la construction de ces éoliennes qui seront installées sur les côtes françaises, la tâche en revient à l’allemand Siemens, qui a bâti une usine au Havre.
Seuls points communs pour six des sept projets déjà attribués: des tarifs ultra-subventionnés. Cela soulève la question du coût à long terme des parcs éoliens.
Éoliennes en mer: plusieurs milliards de subventions par centrale
«Ces subventions, ce sont les impôts des Français qui partent pour financer les retraites des Canadiens [par le biais du CPPIB, ndlr]. Voilà où on en est!» s’insurge Fabien Bouglé.
Pourtant, l’éolien reste présenté par ses partisans comme un moyen de production à moindre coût. En particulier par rapport au nucléaire. Ils dénoncent les investissements que nécessite une centrale pour être bâtie, entretenue ou démantelée. Les dérapages budgétaires du chantier de l’EPR expérimental de Flamanville donnent de l’eau à leur moulin. En l’occurrence, la facture finale de ce réacteur nouvelle génération pourrait s’élever aux alentours des 20 milliards d’euros, avec une livraison en retard de dix ans sur le calendrier initial.
Le nucléaire «coûte très cher», martelait en juin 2015, celle qui était encore coprésidente du groupe EELV à l’Assemblée nationale, Barbara Pompili. L’égérie verte plaidait pour que la France «diversifie» ses sources d’approvisionnement énergétiques. Elle prescrivait donc de développer l’éolien. Arrivée au ministère de la Transition écologique, elle a donc repris le flambeau de Nicolas Hulot, son prédécesseur, qui avait annoncé en novembre 2017 l’objectif de ramener de 75 à 50% la part du nucléaire en France à l’horizon 2035. Depuis décembre 2020, l’ex-élue EELV, qui peine à cacher son rejet du nucléaire, avance le scénario d’une France intégralement dénucléarisée. Et donc d’une France de moins en moins indépendante…