Après le sport, les problématiques de genre s’invitent dans les prisons. Incarcéré en juin 2020 à la maison d’arrêt de Seysses, près de Toulouse, dans la section des hommes, un détenu a en effet obtenu de la justice d’être déplacé dans un quartier pour femmes.
Malgré son changement d’état civil, le prisonnier n’a cependant pas achevé sa transition physique et possède toujours ses attributs masculins. Un fait qui interroge les surveillantes du quartier des femmes, qui se demandent notamment comment elles pourront procéder aux fouilles du nouveau détenu.
«Les surveillants au quartier des femmes sont de sexe féminin. À un moment ou à une autre, il y aura des ordres pour fouiller cette détenue et le personnel féminin sera confronté à de grosses difficultés. Une femme ne peut pas fouiller des détenus hommes et vice versa», explique ainsi à Sputnik Nicolas Christy, secrétaire général adjoint du Syndicat Pénitentiaire des Surveillants (SPS).
Une situation qui pourrait entraîner des «refus d’ordre» de la part des surveillantes, mal à l’aise à l’idée de fouiller une personne possédant encore ses attributs masculins, poursuit le responsable. Les fonctionnaires risqueraient alors de se voir traduites en conseil de discipline et d’être sanctionnées d’une retenue de salaire.
Devant cette impasse, une lettre a été envoyée au procureur de la République de Toulouse, pour tenter de dénouer le problème. Sans réponse pour l’heure.
Au-delà du simple transfert, entériné par la justice, les représentants syndicaux reprochent aussi à l’administration pénitentiaire de ne pas avoir anticipé les événements et de ne pas protéger ses personnels.
«L’administration au lieu de défendre son personnel se couvre derrière cette décision judiciaire, qui dit que c’est une femme. Puis elle demande à son personnel de fouiller, via une note de service. Ils mettent leurs agents de terrain dans la difficulté», explique à Sputnik David, représentant local du SPS.
Risque d’agressions sexuelles?
Les syndicats craignent encore que le transfert du détenu dans le quartier des femmes accroisse le risque d’agression sexuelle.
«Quand on a quelqu’un avec des attributs d’hommes dans un quartier de femmes, il peut éventuellement se passer des choses. C’est aussi pour ça qu’il y a une séparation entre les hommes et les femmes», explique David à Sputnik.
Un argumentaire que rejette l’avocate de l’intéressée, Me Marie-Ange Cochard. Celle-ci assure à Sputnik que le détenu n’a jusque-là posé aucun problème, et s’élève contre une forme de généralisation.
«Ils disent qu’elle constitue un risque pour la sécurité, puisqu’elle pourrait commettre des agressions sexuelles. Uniquement parce qu’elle a un attribut d’homme. Comme si l’on était potentiellement un agresseur sexuel dès lors qu’on a un attribut d’homme. C’est un non-sens», déclare-t-elle ainsi.
Placé à l’isolement lors de son arrivée en 2020, le détenu a pu bénéficier d’une plus grande liberté grâce à ce transfert, ajoute encore l’avocate, précisant que le prisonnier avait été en butte à des insultes dans le quartier des hommes.
«Elle n’avait accès à rien, elle était à l’isolement. Là, elle a accès aux promenades et aux ateliers. Elle a été très bien accueillie par ses nouveaux codétenus», explique Me Marie-Ange Cochard.
Fin mars, une affaire similaire s’était produite en Israël. Une personne transgenre avait ainsi passé 10 jours dans une prison pour hommes, suite au refus des services pénitentiaires de la transférer dans un établissement pour femmes. Les autorités avaient argué de «son apparence masculine», malgré l’avis d’un médecin qui déclarait que le détenu devait être traité comme une femme.