«Les questions de santé mentale vont rester même après la levée des mesures sanitaires»

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tristesse moral - Sputnik Afrique, 1920, 24.04.2021
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Les mesures restrictives liées à la pandémie de Covid-19 ont fait bondir le nombre de problèmes psychologiques dans le monde, tant chez les adultes que chez les jeunes et les adolescents. Et ils ne sont pas près de disparaître, affirment des experts à Radio-Canada.

La pandémie de Covid-19 dans le monde a aggravé les problèmes psychologiques, notamment chez les plus jeunes. Pourtant, les experts soulignent que ces derniers possèdent dans leur majorité la force et les moyens pour reprendre le contrôle de leur vie.

Ainsi, au CHU Sainte-Justine, à Montréal, le nombre de consultations pour un trouble alimentaire chez les 12-18 ans a presque doublé en 2020 par rapport à la moyenne enregistrée jusqu’ici. Qui plus est, les cas lourds sont également en hausse. En cause, l’absence notamment de «facteurs protecteurs habituels, explique à Radio-Canada Olivier Jamoulle, pédopsychiatre au CHU Sainte-Justine.

«Le retour à l'école n'est pas complet, ils n’ont plus leurs réseaux d'amis, parfois c’est difficile à la maison, et on retourne à la case départ, à l'hôpital. En fait, des jeunes ont de la difficulté à sortir de l'hôpital parce qu’ils s’y trouvent presque mieux qu'à la maison. Ça, on n'avait pas avant», précise-t-il.

Les autres problèmes fréquents sont l’anxiété et la dépression.

«On sent que la détresse est augmentée d'un cran partout [...]. Les médecins et les pédiatres nous disent que 50% des demandes qu’ils ont actuellement sont liées à des problèmes de santé mentale», indique pour sa part au site Catherine Serra Poirier, psychologue à l’hôpital de Montréal pour enfants.

Elle relève dans ce contexte un nombre accru d’hospitalisations pour des tentatives de suicide.

Épuisement général

Entretemps, c’est la nature même du stress qui semble avoir changé. Ce n’est plus la peur du virus ou le chamboulement de la routine qui provoque l’anxiété, comme c’était le cas au début de la pandémie. C’est plutôt un épuisement général.

«Ça fait plus d’un an maintenant. Donc, la menace aiguë s’est prolongée et est devenue chronique», explique Mélissa Généreux, professeure-chercheuse à la faculté de médecine de l'université de Sherbrooke.

Elle estime que le rétablissement «va être plus complexe, plus long» que pour d’autres crises.

Des problèmes qui demeurent

Toutefois, un grand nombre de jeunes et d’adultes s’en sortent assez bien, rappellent les experts, notant que la crise affecte avant tout ceux qui ont moins accès à un réseau social et à un milieu familial soutenants et que les inégalités sociales se sont accentuées.

Ils constatent que les adolescents ont été particulièrement marqués par les interruptions d’école et préviennent que les problèmes ne disparaîtront pas automatiquement avec la fin du confinement et la reprise des activités.

«Les études montrent que les questions de santé mentale, émotionnelle, vont rester même après la levée des mesures sanitaires», affirme Olivier Jamoulle, qui ajoute que les adolescents peuvent s’apporter une aide réciproque précieuse.

Dans ce contexte, les spécialistes relèvent le manque de ressources, tant humaines que financières.

«Il va nous manquer le tiers des psychologues dans le réseau public d'ici deux ans. Mais on manque aussi de tout, des psychoéducateurs, des travailleurs sociaux. On n'est pas assez», remarque Catherine Serra Poirier, soulignant que le problème existait déjà avant la pandémie et que cette dernière n’avait fait que l’exacerber.

Rester à l’écoute

Les experts font remarquer l’importance de trouver des activités, que ce soit le sport, l’art, la pratique d’un instrument de musique ou l’apprentissage d’une langue, ainsi que de garder tous les contacts au niveau social. En outre, les adultes doivent favoriser le sens de l’engagement et faire confiance aux adolescents.

«Il faut les impliquer, leur donner un rôle. Il ne faut pas les mettre de côté», insiste Olivier Jamoulle.

Les spécialistes soulignent le rôle majeur des parents.

«C'est super important d'être à l'écoute et de valider. Même si votre jeune, ça fait 25 fois qu'il chiale, il faut l'écouter, il faut faire de la place pour ça. C’est difficile, mais c’est normal. Et tout en laissant aux jeunes leur besoin d’espace», conclut Catherine Serra Poirier.
En France

Une récente étude Ipsos pour la Fédération des associations générales étudiantes (FAGE) a révélé que, fin janvier 2021, les mesures restrictives avaient affecté psychologiquement, affectivement ou physiquement 73% de la jeune génération.

Dans cette situation, Emmanuel Macron a évoqué «un continent caché: la souffrance des plus jeunes» et a annoncé que les enfants de 3 à 17 ans pourront compter sur un remboursement à 100% de 10 séances chez le psychologue.

Les moins jeunes, notamment les étudiants, sont concernés eux aussi. Ainsi, dans une interview au Parisien, une jeune femme a déclaré ne connaître «aucun camarade qui aille bien». Tandis qu’un jeune de 17 ans a adressé en mars une lettre à Emmanuel Macron lui faisant part de la «détresse» des étudiants.

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