Toujours empêtrée dans des problèmes de livraisons, entre les ratés des laboratoires Johnson & Johnson et ceux d’AstraZeneca, l’UE se refuse encore à envisager la piste du vaccin russe. Interrogé sur BFM TV, Thierry Breton s’est montré sceptique sur l’arrivée du Spoutnik V dans l’UE, rappelant que le continent disposait déjà de cinq autres produits.
Le commissaire européen au Marché intérieur a surtout avancé des questions de calendrier, assurant qu’il ne remettait pas en cause le vaccin en lui-même. Il a affirmé avoir «beaucoup de respect pour les scientifiques russes», admettant que l’institut Gamaleïa qui produit le vaccin était «de renommée mondiale». Il doute cependant que le Spoutnik V puisse être autorisé puis produit avant longtemps.
Thierry Breton a ainsi affirmé que la demande d’autorisation auprès du régulateur européen avait été faite «il y a quelques jours» et que le verdict pourrait prendre «plusieurs semaines», voire «quelques mois».
Les autorités russes déclarent pourtant avoir fait une demande d’enregistrement dès fin janvier. Le concepteur du vaccin avait même publié sur Twitter un récépissé de l’Agence européenne des médicaments (EMA) suite à ces démarches, le 10 février.
In response to the EMA @EMA_News statement that they cannot find Sputnik V application for review, we attach the receipt of such application 1379253 from January 29, 2021 below. 24 countries have already registered #SputnikV.✌️ pic.twitter.com/QebeaNVA2B
— Sputnik V (@sputnikvaccine) February 10, 2021
Thierry Breton a par ailleurs affirmé qu’il n’avait «aucune raison de douter» d’un feu vert pour le Spoutnik V. Il a assuré que les autorités européennes ne faisaient «pas d’ostracisme» à son endroit.
Usines et variants
Au-delà de l’autorisation, le «monsieur vaccin» de l’UE pense que la production du Spoutnik V ne sera pas immédiatement possible sur le continent. Le calendrier sera selon lui trop serré, compte tenu de la promesse du Président Macron de vacciner tous les adultes qui le souhaitent avant la fin de l’été.
«À partir du moment où c'est autorisé, il faut une dizaine de mois minimum pour faire une usine. Donc si vous signez aujourd'hui une précommande, vous n'en n'aurez pas le bénéfice avant l'année prochaine, on sera dans un autre monde», a ainsi déclaré Thierry Breton sur BFM TV.
Le responsable a en outre insisté sur la question des variants, qui pourraient rendre caducs certains vaccins dans quelques mois. Il a affirmé que les vaccins approuvés aujourd'hui «ne seront peut-être pas ceux dont on a besoin au mois d'octobre».
Le commissaire européen a dressé un constat un peu différent pour le vaccin chinois Coronavac, dont il a mis en doute les résultats. Il a notamment cité le cas du Chili, où une étude a récemment démontré une efficacité de 56,5% deux semaines après la seconde dose. Les autorités chinoises ont d’ailleurs admis la faiblesse de leur produit.
Le 16 avril, Thierry Breton avait déjà sermonné Renaud Muselier, président de la région PACA, pour une précommande de vaccins Spoutnik V. Au micro d’Europe 1, il avait déclaré que l’élu n’en aurait «pas besoin» et qu’il était «mal informé».
Début avril, ce même Thierry Breton s’était pourtant plaint des retards de vaccination dans l’UE, accusant AstraZeneca d’avoir provoqué un «trou d’air» avec ses problèmes de livraisons.