Joe Biden va-t-il réussir à harmoniser les impôts des sociétés dans le monde entier afin de mieux financer ses projets?
Mais il veut aussi que le reste du monde donne un coup de main à son projet. Janet Yellen, secrétaire au Trésor, a donc appelé les nations du monde entier à adopter un impôt mondial minimum sur les entreprises. «Il est important de travailler avec d’autres pays pour mettre fin aux pressions de la concurrence fiscale et à l’érosion de l’assiette fiscale des sociétés», a-t-elle déclaré.
Dans tous les cas, Joe Biden et Janet Yellen ne devraient pas comparer des pommes avec des oranges. Il semble illusoire de penser que d’autres pays du monde vont augmenter ou harmoniser leur impôt sur les sociétés simplement pour aider le programme national de Biden. Alors à quoi le Président américain joue-t-il?
Pour Olivier Piton, avocat en droit public, président de la Commission des lois à l’Assemblée des Français de l’étranger, auteur de La Nouvelle révolution américaine et Les Transgressifs au pouvoir – Emmanuel Macron et Donald Trump (Éd. Plon), l’idée n’est pas une harmonisation philanthropique des taxes, mais de financer les grandes dépenses structurelles publiques américaines.
«Il n’y a pas de philanthropie chez les Américains. Entre la pandémie et l’annonce du vaste plan de restructuration des infrastructures, une très forte hausse de la dépense publique est prévue pour le budget américain. L’idée est donc assez simple: fixer un taux minimal d’imposition pour toutes les entreprises, et en particulier celles qui font de l’optimisation fiscale comme les entreprises numériques américaines qui vont dans des paradis fiscaux notamment en Europe. On veut que ces entreprises rendent l’argent aux États-Unis et pas ailleurs dans le monde.»
Quels sont les enjeux pour l’Europe?
«Il y a un consensus au sein de la société américaine pour aller vers un rapatriement fiscal des principales entreprises nationales. Les Européens, plutôt que de penser à l’harmonisation, devraient penser à ce protectionnisme qui est en train de se mettre en place, surtout maintenant que la Chine entre dans le jeu», estime l’expert.
Qu’est-ce que cela préfigure? Olivier Piton explique que nous sommes en train de changer d’époque:
«Le point central de la diplomatie Biden est la guerre économique contre la Chine, l’idée est de mettre en place des mesures protectionnistes contre la Chine et les Européens sont les victimes collatérales de cette guerre. Obama avait déclenché les hostilités, Donald Trump les a poursuivies d’une manière beaucoup plus brutale et Joe Biden va continuer à le faire. Les Européens et la France, dans cette logique-là, devraient prendre exemple. Nous ne sommes plus dans cette espèce de libre-échangisme qui était dépendant de la mondialisation diplomatique. On est passé à une autre ère sur le plan fiscal.»