Le Monde a-t-il propagé une fake news en voulant dénoncer la propagande chinoise?

© AFP 2024 Francois Guillot Le Monde
 Le Monde - Sputnik Afrique, 1920, 04.04.2021
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Le Monde a remis en cause l’existence d’une journaliste française ayant écrit sur les Ouïghours pour un média chinois. Le journal y voyait la main de la propagande. Problème: l’auteur de l’article existe bel et bien et s’est confié au Figaro.

À vouloir traquer partout les fake news, Le Monde en aurait-il propagé une à son tour? Le quotidien du soir se retrouve en tout cas au milieu d’une polémique, après avoir nié l’existence d’une journaliste française travaillant pour la télévision d'État chinoise CGTN. Celle-ci avait écrit un article sur le site du média chinois, traitant de la situation des Ouïghours dans le Xinjiang, région dont elle affirmait être familière.

Intitulé «"Mon" Xinjiang: halte à la tyrannie des fake news», son texte dénonçait la «parodie de procès» faite aux autorités chinoises quant au sort réservé à la minorité musulmane de l’ouest du pays. La journaliste, qui signait sous le pseudonyme de Laurène Beaumond, réfutait l’idée d’un «effacement culturel» à l’œuvre dans la région, de même que l’existence d’un «travail forcé dans les champs de coton».

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Des idées qui n’ont pas eu l’heur de plaire au Monde, lequel a qualifié le texte «d’article de propagande». Plus grave: le quotidien a remis en cause l’existence de la journaliste, affirmant qu’elle était «inconnue, officiellement au bataillon de la presse française».

Le journal vespéral précisait avoir fait des recherches dans le fichier de la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels. Il en concluait que «Laurène Beaumond n’existe pas telle que le média d’État veut la présenter».

Dans sa critique, Le Monde citait encore l’analyse d’Antoine Bondaz, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique, qui parlait sur les réseaux sociaux de «faux profils se faisant passer pour des journalistes basés en France».

Emballement médiatique et témoignage

Plusieurs médias français ont par la suite emboîté le pas au Monde, dont France info et BFM TV. La chaîne de télévision postulant même que l’article sur le Xinjiang avait «sûrement été» écrit par le Parti communiste chinois.

L’affaire a rebondi avec la réaction du média chinois CGTN, assurant que la journaliste existait bien et écrivait simplement sous un pseudonyme. Libération a également semé le doute en affirmant avoir «identifié une personne dont le profil correspond[ait] en partie, à celui de Laurène Beaumond».

Mais c’est Le Figaro qui a finalement donné le véritable coup de pied dans la fourmilière, en retrouvant la journaliste et en publiant son témoignage.

La quadragénaire explique avoir fait des études de journalisme et avoir été traductrice puis présentatrice sur la chaîne CCTV. Elle se dit choquée des doutes soulevés par Le Monde à son encontre.

«J'assume cet article de A à Z. C'est moi qui l'ai proposé à CGTN […] Je suis effarée par la bassesse des attaques contre ma signature, et qu'on puisse affirmer que je n'existe pas», explique-t-elle ainsi au Figaro.

L’affaire a finalement pris un tour politique, avec la réaction de Hua Chunying, porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois. En conférence de presse, celle-ci a critiqué les «accusations sans fondement» du Monde et reproché au quotidien d’avoir agi «sans vérification rigoureuse».

Interdite au Royaume-Uni, la chaîne chinoise CGTN avait reçu début mars le feu vert du CSA pour diffuser en France.

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