«Avant, on parlait souvent de “la gauche la plus bête du monde” ou de la “droite la plus bête du monde”, selon le contexte. Maintenant que les lignes de gauche et de droite ne structurent plus la vie politique française, on a tout simplement les oppositions les plus bêtes du monde!» fustige d’emblée François Cocq au micro de Sputnik.
C’est ainsi que l’essayiste a réagi à la polémique lancée par Audrey Pulvar, candidate PS aux régionales en Île-de-France. Interrogée sur les réunions «en non-mixité», elle a estimé que les personnes blanches pouvaient y assister, mais qu’elles devaient «se taire».
Pulvar dit tout et le contraire de tout. En l’ayant choisi comme tête de liste pour les régionales, le #PS et ses supplétifs ont commis une bourde politique.
— Mace-Scaron Joseph (@MaceScaron) March 28, 2021
Elle n’est qu’un symptôme de la faiblesse d’un certain personnel politique qui réagit, ne travaille pas, ne pense pas... https://t.co/b6pRxCbHc2
Pour mémoire, les réunions «non mixtes» (ou «en non-mixité») consistent à exclure les personnes jugées «problématiques» d’une assemblée syndicale ou associative: si l’on est Blanc, de sexe masculin et hétérosexuel, on cumule un certain nombre de «privilèges» qui empêchent d’assister à des regroupements réservés à des minorités «oppressées» ou «discriminées». Très fréquentes dans certains milieux féministes et antiracistes, ces réunions sont régulièrement critiquées en raison du risque de repli identitaire, voire de «communautarisme» qu’elles font courir.
Exclu de La France insoumise en janvier 2019 par Jean-Luc Mélenchon, François Cocq observe avec consternation ce qu’il perçoit désormais comme «une gauche qui touche le fond par électoralisme, par calcul politicien et par absence d’idées pour reconstruire le pays.»
«Les réunions non-mixtes consistent à parquer les gens, là où il faudrait permettre le débat le plus large possible et créer du commun.»
L’homme politique dénonce les tentatives d’«essentialiser les gens en les assignant à résidence ethnique, sociale ou politique.»
Des pratiques «qui ressemblent au fascisme», selon M. Blanquer
«L’agora publique et démocratique est censée être le lieu où l’on se confronte et on se construit ensemble», abonde François Cocq. «Tout ce qui va à l’encontre de cela est une fermeture de la société.»
La droite est aussitôt montée au créneau pour fustiger les propos d’Audrey Pulvar. «En France, il y a une seule communauté: la communauté nationale. On ne peut pas être enjoint de parler ou de se taire en fonction de sa couleur de peau ou de son origine», a tweeté Christian Jacob, le président des Républicains. Même réaction outrée du côté de la présidente (LR) de la région Île-de-France, Valérie Pécresse. «Dans ma région, aucun habitant ne doit être discriminé pour la couleur de sa peau. Il n’y a pas de racisme “acceptable”!», a réagi celle qui sera opposée à Audrey Pulvar lors des régionales à venir.
Bruno Le Maire juge que les propos d’Audrey #Pulvar sont une « régression et une agression. Une régression car elle revient sur le mot race qui a été enlevé de la constitution et une agression contre l’universalisme français » @BrunoLeMaire
— Guillaume Daret (@GuillaumeDaret) March 29, 2021
De son côté, Marine Le Pen est allée jusqu’à réclamer «des poursuites pour provocation à la discrimination raciale contre Mme Pulvar» suite aux propos de l’adjointe à la mairie de Paris. «C’est cette gauche qui patauge dans l’islamogauchisme et la haine des Blancs qui aspire à présider la première région de France?» s’est quant à lui interrogé Jordan Bardella, vice-président du parti.
«Ces gens-là sont indignes»
À gauche, Audrey Pulvar a néanmoins reçu le soutien de plusieurs personnalités issues de La France insoumise et d’Europe Écologie-Les Verts. «Audrey Pulvar n’est pas raciste! Elle a juste compris ce qu’est un groupe de parole. Ceux qui se jettent sur elle, par contre, n’arrivent pas à cacher leur pente sexiste et discriminante. Le débat public s’effondre. Le PS va-t-il défendre sa candidate en Île-de-France?», s’est par exemple demandé Jean-Luc Mélenchon.
Au nom de la République, certains font passer les militant•es anti-racismes pour des racistes et les luttes d’émancipation pour du replis identitaire. Cette grande confusion qui confond universalisme et uniformité pourrit le débat démocratique. Tout mon soutien à Audrey Pulvar. https://t.co/9B0oU4cUEI
— David Cormand🌻🇪🇺 (@DavidCormand) March 27, 2021
«Ceux qui alimentent chaque jour le racisme, instrumentalisent la cause des femmes et organisent la ségrégation sociale mènent ce soir une campagne misérable contre Audrey Pulvar. Au fond, droite et extrême droite dénient aux opprimés le droit de se parler et de ne pas se soumettre», a avancé de son côté Clémentine Autain, tête de liste LFI aux régionales en Île-de-France. Très remonté, François Cocq préfère renvoyer droite et gauche dos à dos:
«La droite s’écharpe sur une possible primaire pour 2022, tandis qu’à gauche, Jean-Luc Mélenchon nous fait un chantage à l’unité sur des questions identitaires. Tout cela est absurde: alors que le pays est à genoux à cause de la crise sanitaire, ces gens-là sont tous indignes», juge-t-il.
Dans un tweet publié ce dimanche 28 mars, Audrey Pulvar a précisé que «les réunions “non mixtes” ne portent pas que sur des questions de couleur de peau. Oui, dans une réunion “non mixte” LGBTQI+, en tant qu’hétéro, je me taierais [sic], j’écouterais.» Le Parti socialiste est néanmoins resté bien silencieux suite aux déclarations de sa candidate pour les régionales. Le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, s’est contenté d’affirmer dans Le Monde ce lundi 29 mars qu’il n’avait «aucun problème» avec «les groupes de parole qui permettent de libérer la parole des victimes de racisme ou de sexisme.» Le 21 mars dernier, sur Europe 1, Anne Hidalgo avait pourtant qualifié les réunions «en non-mixité raciale» de «dangereuses». Pour la maire de Paris, ces pratiques cachent des «tentatives» visant à «marquer les identités différentes», pour finalement «ne plus permettre le dialogue».
«Audrey Pulvar est en train de s’enfermer dans un personnage médiatique. En tant que candidate du Parti socialiste pour les régionales en Île-de-France, elle aurait sans doute mieux à dire. C’est triste que l’électoralisme conduise à des déclarations pareilles», conclut François Cocq.