Terreur à Béjaïa, Jijel et Constantine. Durant la nuit du 17 au 18 mars 2021, ces villes de l’est algérien ont été secouées par une activité sismique de forte intensité. D’une magnitude de 4,5 sur l’échelle de Richter, la première grosse secousse avait pour épicentre El Harrouch (457 kilomètres à l’est d’Alger) et a surpris les habitants de la région proche de Constantine à 22h49. Des répliques ont ensuite été enregistrées en mer. Le 18 mars, à 01h04, un séisme de magnitude 5,9 a secoué la ville de Béjaïa. Sa puissance a été telle qu’il a été ressenti jusque dans la capitale, située à 250 km. Le phénomène, dont l’épicentre a été situé à une trentaine de kilomètres en mer, a provoqué un vent de panique parmi la population. Les images diffusées sur les réseaux sociaux montrent la puissance du séisme.
Contactée par Sputnik, Amina Benelhadj, professeur de langue française installée récemment à Béjaïa, avoue avoir vécu «les pires 20 secondes de son existence». «Il y a eu quelques secousses durant la soirée, mais je n’avais rien ressenti. C’est ma belle-mère qui m’a appelée pour prendre de mes nouvelles. Puis l’idée de ressentir un tremblement de terre n’a pas quitté mon esprit et m’a empêchée de dormir. Jusqu’au moment où ce terrible séisme s’est produit à une heure du matin», raconte-t-elle, encore sous le choc de ce qu’elle a vécu.
Solidarité
L’universitaire rejoint un groupe de voisins sur le parking. «Tout le monde était en pyjama, il faisait très froid et il a commencé à pleuvoir». Amina dévale les quatre étages de l’immeuble et se réfugie dans sa voiture «après avoir pris soin de l’éloigner des constructions». «Il y a eu d’autres répliques, c’était terrible de les ressentir. Mais je dois dire que j’ai été particulièrement touchée par la solidarité des voisins qui étaient à mes côtés pour me soutenir en apprenant que j’étais seule chez moi».
La jeune femme décide finalement de rejoindre son appartement à l’aube. De nombreuses familles de la région de Béjaïa et de Jijel, ville située plus à l’est sur le littoral, ont passé la nuit dehors, dans le froid et la peur. Selon un communiqué de la Protection civile, ce séisme a fait quelques blessés mais aucune perte humaine n’est à déplorer. Par contre, les dégâts matériels sont importants, notamment dans la partie ancienne de la ville de Béjaïa.
Plaques tectoniques
Pourtant, pour les scientifiques, cette activité n’a rien d’exceptionnel, l’Algérie étant située dans une zone à forte sismicité. Chafik Aïdi, docteur en géophysique et responsable du réseau national de la surveillance sismique au Centre de recherche en astronomie, astrophysique et géophysique (CRAAG), indique que le pays enregistre des dizaines de secousses par jour, lesquelles sont généralement imperceptibles. «C’est une situation normale», insiste-t-il.
«Le nord de l’Algérie se situe à la frontière des deux plaques tectoniques: l’africaine et l’eurasienne. Donc les séismes qui s’y produisent sont dus au rapprochement entre les deux plaques. Un mécanisme qui se déroule depuis des millions d’années. Tout le long de l’année, le CRAAG enregistre des événements telluriques, soit de 10 à 30 par jour. Leur magnitude est inférieure à 3 sur l’échelle de Richter, ils ne sont donc pas ressentis par la population. Cependant, nous enregistrons des événements plus ou moins forts sur une certaine période. C’est ce qui s’est produit dans la région Est de l’Algérie ces derniers jours», souligne le géophysicien.
Tsunami ou petits raz-de-marée?
Un séisme en Algérie peut aussi avoir des répercussions sur la rive nord de la Méditerranée. Quelques heures après le tremblement de terre de Béjaïa, les autorités françaises ont placé le littoral du golfe du Lion en alerte jaune tsunami. Le docteur Chafik Aïdi se montre prudent et préfère parler de risque «de petits raz-de-marée» du fait de la configuration de la partie occidentale de la mer Méditerranée.
«Il est clair que dans le bassin méditerranéen, la côte algérienne est la principale source de tremblements de terre, donc les tsunamis cibleraient la côte nord qui se situe en Europe. La morphologie du bassin algéro-provençal fait que nous n’avons pas enregistré de véritables tsunamis mais plutôt des petits raz-de-marée notamment à l’occasion du séisme de Boumerdes en 2003», rappelle-t-il.