Avec son vaccin, «la Russie remporte la bataille géopolitique», estime le géopolitologue Pascal Boniface

© Sputnik . Sergueï Avérine / Accéder à la base multimédiaVaccin Spoutnik V
Vaccin Spoutnik V - Sputnik Afrique, 1920, 14.02.2021
S'abonner
Avec la pandémie de Covid-19, une forme de diplomatie vaccinale a fait le jeu des relations entre les grandes puissances, analyse le géopolitologue Pascal Boniface dans Ouest-France. Selon lui, la Russie a particulièrement tiré son épingle du jeu, tandis que la France accuse un retard important.

Après un an de crise sanitaire, le monde est entré dans une course à la vaccination afin de revenir le plus vite possible à une vie normale. Mais au grand dam de l’OMS, qui souhaiterait une distribution multilatérale et équitable, ce sont naturellement les grandes puissances qui accaparent la majorité des doses. Dans un entretien accordé à Ouest-France, le géopolitologue Pascal Boniface analyse ce qu’il appelle la diplomatie du vaccin.

Il présente la Chine comme un producteur qui s’orientera vers les pays en développement et y développera son influence, avec l’Inde qui a aussi son rôle à jouer sur le continent asiatique. Israël étonne par sa grande capacité à vacciner sa population. «Mais la victoire la plus spectaculaire est celle de la Russie», estime-t-il.

«Elle remporte la bataille géopolitique jusqu’ici», poursuit l’expert, «aujourd’hui, il y a un pays où il n’y a plus de confinement et où ils exportent le vaccin: c’est la Russie».

Précisant que le Spoutnik V sera exporté «bien au-delà de la zone traditionnelle ex-soviétique», il avance que cela rapportera 25 milliards de dollars à la Russie en 2021.

«Cela ne réhabilite pas totalement l’image de la Russie», précise-t-il toutefois, évoquant l’affaire Navalny. Mais pour obtenir un vaccin, les États «ne vont pas se demander s’il vient d’un pays démocratique ou d’un pays autoritaire. Ils vont se demander s’il est efficace ou non», considère le géopolitologue, soulignant qu'«il fonctionne». Le premier vaccin anti-Covid russe est «un succès intérieur et un succès international» pour Vladimir Poutine, résume-t-il.

L’échec français

Pascal Boniface pointe également un certain retard de l’Union européenne par rapport aux États-Unis, à qui elle a acheté la majorité de ses doses. «Les Occidentaux ont acheté 90% des doses des deux vaccins américains», précise-t-il. Des problèmes de distribution nuisent encore davantage à l’image du Vieux Continent, là où «100 millions d’Américains seraient vaccinés courant mars».

Mais il déplore surtout l’«échec symbolique» de la France, pays de Pasteur, qui n’a toujours pas produit son propre vaccin, en plus d’être en retard sur la campagne vaccinale. L’expert s’interroge sur le comportement de Sanofi, rappelant qu’il a «été largement aidé financièrement par l’État» tout en procédant à des licenciements et en «distribuant des dividendes plantureux», et appelle à vérifier que les investissements reçus par le géant pharmaceutique, et le privé en général, soient justifiés.

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала