À la suite d’une plainte de l'État, la cour administrative d'appel de Marseille vient de condamner la mairie de Beaucaire à 5.000 euros d'astreinte par jour pour avoir installé une crèche provençale dans le bâtiment de la mairie.
La crèche reste toujours en place dans l’hôtel de ville, «malgré le jugement», comme le précise au micro de Sputnik Julien Sanchez, maire Rassemblement national (RN) de la cité gardoise.
L’Etat est tellement bon pour gérer la crise sanitaire qu’il trouve le temps de s’attaquer à des santons en Provence.
— Julien Sanchez (@jsanchez_rn) January 19, 2021
Un juge Marseillais décide de nous condamner à 5000€ d’astreinte par jour. Ubuesque.
Nous allons devant le Conseil d’Etat.
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La contre-attaque de la mairie
Le bras de fer entre l’État et la municipalité est lancé «peu de temps avant Noël», quand le tribunal administratif condamne la municipalité à retirer la crèche. À l’époque, aucune contrepartie financière n’a été demandée. Mais la mairie a fait appel de cette décision.
À partir d’aujourd’hui, deux jours après le jugement de la cour administrative d'appel de Marseille, la mairie devrait verser 5.000 euros –«une somme importante»– pour chaque jour de présence de la crèche dans ses murs. Mais le maire contre-attaque.
«On appelle aux dons pour la crèche de l’année prochaine. Pour montrer qu’on ne se laissera pas intimider ni impressionner. Le gouvernement s’attaque aux fondements de notre société. La crèche est une tradition populaire, il faut la mettre à l’honneur», souligne Julien Sanchez.
«Je considère que c’est uniquement à cause d’une étiquette politique qu’on nous crée des problèmes pour cette crèche. J’ai saisi le Conseil d’État pour qu’il annule la décision de nous condamner à 5.000 euros et j’attaque l’État pour discrimination politique», s’insurge l’édile.
Ce n’est pas le premier cas de bataille juridique autour de la représentation du berceau du Petit Jésus. Ainsi, en 2010, le tribunal administratif d’Amiens a interdit l’installation de la crèche en annulant une délibération du conseil municipal. En 2014, le tribunal administratif de Nantes annule par sa décision une délibération du conseil général de Vendée autorisant l’installation d’une crèche dans le hall de cette institution publique. Décision, invalidée à son tour par la cour administrative d’appel de Nantes (un an plus tard), qui a estimé que la crèche pourrait être conservée, «en raison de sa faible taille et de sa situation non ostentatoire».
Tradition culturelle ou cultuelle?
Cent quinze ans après la loi de séparation des Églises et de l’État, la question des crèches de Noël dans les mairies n’est toujours pas réglée. Elle reste souvent tributaire des décisions des tribunaux administratifs.
La tradition provençale des santons perdure dans le Midi. À quelques 200 km de Beaucaire, à Grasse, dirigée par Jérôme Viaud (LR), la crèche a fièrement trôné au sein de la mairie, symbole «de la poésie de la cueillette, du pastoralisme et de la Nativité».
Pour Beaucaire, avec ses 16.000 habitants au cœur du «triangle d'or» formé par Nîmes, Arles et Avignon, il en a été décidé autrement.
«Les santons représentent tous les métiers traditionnels de Provence. Mais le préfet nous reproche que dans cette crèche sont présents Jésus, Joseph et Marie, les Rois mages», précise le maire de Beaucaire.
Au nom de la tradition culturelle, la loi permet aux mairies de mettre en place «des expositions culturelles et festives». Ce qui a été acté par la mairie.
«L’exposition s’inscrit dans le cadre des fêtes de Noël, avec d’autres animations organisées en ville pour l’occasion. En plus, nous avons mis des panneaux où on explique les différentes traditions de Noël en Provence. On ne comprend pas pourquoi on nous dit d’enlever cette crèche», s’insurge Julien Sanchez.