Critiqué par Amandine Gay, réalisatrice et afroféministe, pour avoir utilisé le mot «lynchage» concernant la manifestation du 28 novembre, Julien Bayou, secrétaire général d’EELV, a fait son mea culpa sur Twitter.
En revenant sur certaines scènes survenues lors de la marche «des libertés», l’homme politique a écrit sur son compte Twitter: «Le pays se fissure. Images horribles de lynchage de policiers à Bastille. La violence policière impunie qui abîme la confiance de la population».
1) Voilà pourquoi la banalisation du terme « lynchage » et son usage par les personnes blanches pour décrire du harcèlement en ligne ou des agressions IRL conduit non seulement à effacer l’expérience et les souffrances des personnes noires, mais aussi à inverser la réalité. https://t.co/EULpT4td94
— Amandine Gay (@OrpheoNegra) November 29, 2020
En réaction, Amandine Gay a fustigé l’utilisation du terme «lynchage» afin de «décrire du harcèlement en ligne ou des agressions IRL [in real life, ndlr]». Selon elle, ceci «conduit non seulement à effacer l’expérience et les souffrances des personnes noires, mais aussi à inverser la réalité».
Une seule possibilité d’usage
Mme Gay estime que l’usage de ce mot n’est réservé qu’aux «Noir.e.s» et évoque certains cas de pendaison d’Afro-Américains en 2020. En plus de cela, elle accuse Julien Bayou de participer «à un système de déshumanisation des Noir.e.s» et d’invalider «le continuum négrophobe à l’origine de l’agression de Michel [Zecker, producteur noir roué de coups par des policiers, ndlr].
Enfin, d’après elle, «utiliser l’expression "lynchage de policiers", la semaine où la vidéo d’un passage à tabac d’un homme noir par des policiers blancs vous a soi-disant ému, c’est prouver, s’il en était encore besoin, qu’il n’y aura pas de convergences des luttes de sitôt».
En réponse, le leader des Verts a présenté ses excuses tout en la remerciant «d’avoir pris le temps d’une explication de texte argumentée». En déclarant ne pas avoir eu l’intention de provoquer une telle réaction ou d’«effacer les souffrances des personnes noires», il s’est dit ouvert à une discussion pour trouver une expression censée «qualifier le fait qu’une foule s’en prenne à un policier».
J'entends que le terme lynchage n’est pas adapté pour une personne blanche, a fortiori dépositaire de l’autorité publique. Je serais preneur d'un échange pour déterminer comment qualifier le fait qu'une foule s'en prenne à un policier, ce qui s’est malheureusement produit hier.
— Julien Bayou (@julienbayou) November 29, 2020
Il a également approuvé que «le terme de lynchage n’est pas adapté pour une personne blanche, à fortiori dépositaire de l’autorité publique».
Définition linguistique
Alors que l’origine de l’expression remonte à la pratique de justice instaurée par Charles Lynch au 18e siècle aux États-Unis et qui s’est étendue jusqu’à la «loi de Lynch» (la justice rendue sans procès par une foule), les dictionnaires français désignent le terme sans association à ce contexte historique.
Selon le Centre nationale de ressources textuelles et lexicales (CNRTL), il s’agit du fait de «mettre à mort (quelqu’un) sans jugement régulier, et «par extension, [de] faire subir (à quelqu'un) des violences physiques entraînant la mort».
En plus de cela, l’expression veut dire «l’exécution sommaire sommaire (de quelqu'un) par une foule». Il s’agit également de «mettre à mort sommairement quelqu'un ou lui faire subir des violences sans jugement régulier, en parlant d'une foule, d'un groupe», d’après le Larousse.