Finalement, ce qui avait été présenté à la presse comme «une visite d’amitié et de travail» du Président malien de la transition Bah N’Daw à Lomé devrait alimenter les annales de la diplomatie secrète africaine.
Tournée sous-régionale de SEM Bah N'DAW : étape du Togo
— Presidence Mali (@PresidenceMali) November 14, 2020
Le Chef de l'Etat et son homologue togolais @FEGnassingbe ont eu un tête-à-tête. Leurs échanges ont ensuite été élargis aux deux délégations pour faire le point de la coopération bilatérale👇🏽https://t.co/lUtheyfNgY pic.twitter.com/MLH0FlUAwt
Dans son édition du 19 novembre, la revue Africa Intelligence, réputée pour ses révélations sur les réseaux de pouvoir africains, fait le lien entre «la première visite d’un officiel malien au Togo depuis le coup d’État du 18 août» et le rôle joué par le Togo dans la résolution de la crise diplomatique née à la suite de ce putsch.
«N’eût été l’intervention de certaines personnalités –des dirigeants amis du Mali–, le chef de la junte qui a renversé le Président malien le 18 août dernier, c’est-à-dire le colonel Assimi Goïta, serait encore au pouvoir en ce moment! En effet, il ne voulait pas partir, contrairement à tout ce qui se disait!», a affirmé à Sputnik cette source.
Mission diplomatique
Celle-ci affirme que dès les premières heures qui ont suivi le coup d’État, et alors qu’elle était sous la pression des sanctions de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), la junte a consulté Faure Gnassingbé pour «bénéficier de ses conseils et de son expérience en matière de gestion d’une crise».
En sa qualité de doyen des dirigeants de la sous-région, le Président togolais avait alors dépêché rapidement son ministre des Affaires étrangères, Robert Dussey, pour une mission marathonienne de plusieurs allers-retours, de jour comme de nuit. Il est finalement arrivé à convaincre le colonel Assimi Goïta, qui présidait le Comité national pour le salut du peuple (CNSP), la junte qui a perpétré le coup d’État, de céder le pouvoir à un civil.
Cette condition faisait partie des mesures exigées par la Cedeao pour lever les sanctions économiques contre le Mali.
«Le Président togolais a expliqué à Assimi Goïta, par la voix de son MAE, qu’il ne pouvait pas aller à l’encontre des exigences de la communauté régionale. De négociation en négociation, le chef de la junte a fini par accepter, au nom de la paix et la stabilité au Mali. Faure Gnassingbé étant de fait le grand artisan de la stabilité retrouvée dans ce pays, le Président de la transition est venu lui témoigner sa gratitude», poursuit la même source.
Le Président de la transition du Mali a passé deux jours au Togo. Il est reparti sans faire de déclaration à la presse.
Une simple «visite de travail et d'amitié»
«L’implication du Président de la République togolaise SEM Faure Gnassingbé dans la recherche de la paix au Mali ne laisse pas indifférentes les nouvelles autorités de la transition, dont le Président SEM Bah N’Daw qui est en visite d’amitié et de travail les 13 et 14 novembre 2020», a simplement indiqué une publication du service de communication de la présidence de la République togolaise à l’issue de cette visite.
À SEM Bah N’daw, Président de la transition, chef d'État de la République sœur du Mali que j'ai l'honneur de recevoir ce jour, je souhaite la cordiale bienvenue au #Togo. pic.twitter.com/qVFk9pJGWm
— Faure E. Gnassingbe (@FEGnassingbe) November 13, 2020
Ce communiqué précise aussi que «plusieurs sujets en lien avec la situation politique et sécuritaire au Mali ont été abordés» et que les deux hommes d’État ont visité le Centre d’entraînement des opérations de maintien de la paix du Togo basé à Lomé.
Le putsch du 18 août 2020 est le quatrième dans l’histoire politique du Mali. Il faisait suite à deux mois de manifestations populaires demandant la démission d’Ibrahim Boubakar Keïta. Une charte publiée officiellement le 1er octobre 2020, après avoir été discutée et adoptée par «les forces vives de la nation malienne» prévoit une transition de 18 mois avec trois organes: un Président secondé par un vice-Président (qui n’est autre qu’Assimi Goïta), un Conseil national de transition et un gouvernement.