«Sous l’Administration Biden-Harris, nous allons réévaluer nos relations avec le Royaume [d’Arabie saoudite, ndlr], mettre fin au soutien américain à la guerre de l’Arabie saoudite au Yémen, et nous assurer que l’Amérique ne mette pas ses valeurs à la porte pour vendre des armes ou acheter du pétrole», affirmait Joe Biden durant sa campagne.
«Sous l’Administration Obama, qui portait le même discours que Biden sur la question des droits de l’Homme et de la démocratie, cette alliance avec l’Arabie saoudite et ses alliés n’a pas été remise en cause. On est donc plus sur des effets d’annonce que sur une politique qui va réellement évoluer.»
En effet, durant les huit ans de la Présidence Obama et de la Vice-présidence Biden, hormis la signature de l’accord sur le nucléaire iranien et un discours moins amical sur les droits de l’homme, la relation entre les deux pays ne s’est pas réellement dégradée. Au niveau des achats d’armes, l’Arabie saoudite a même été le meilleur client des États-Unis durant sa présidence. Barack Obama a approuvé la vente au royaume de près de 115 milliards de dollars de matériel militaire durant ses deux mandats.
L’obstacle du lobby militaro-industriel
Au-delà de l’aspect économique de la relation entre Washington, l’Arabie saoudite et ses alliés, Myriam Benraad souligne l’importance d’autres acteurs, notamment non étatiques, qui entrent dans cette équation.
«Sur les ventes d’armes, ce n’est pas l’administration américaine qui décide totalement. Il y a dans ce complexe de grands groupes qui sont très puissants et jusque-là, aucune Administration américaine n’a pu véritablement remettre en cause leur pouvoir», estime la chercheuse associée à l’IREMAM.
Préférant Trump, les monarchies du Golfe s’apprêtent tout de même à l’arrivée de Joe Biden à la Maison-Blanche. L’Arabie saoudite a félicité le 8 novembre le Président élu Joe Biden pour sa victoire.
Revenant sur l’entente entre Donald Trump et les pays du golfe persique, Randa Slime, directrice de la résolution des conflits au Middle East Institute, basé à Washington, a expliqué ainsi ce qui liait l’actuel Président avec les monarques de la région: il «a fait en sorte que les relations entre les États-Unis et les pays du Golfe soient plus basées sur les liens personnels […] que sur les institutions.»
Pour son premier voyage présidentiel à l’étranger en 2017, Donald Trump avait choisi de se rendre en Arabie saoudite. Il avait alors touché le jackpot: 380 milliards de dollars de contrats entre Riyad et Washington, dont 110 milliards pour le secteur de l’armement.
La variable iranienne
«La visite historique de mai 2017 [à Riyad, ndlr] a marqué le début d’une relation exceptionnelle avec le Président américain et a ouvert de nombreuses portes», a déclaré à l’AFP un responsable du Golfe sous couvert d’anonymat. Une relation positive qui allait s’étendre à plusieurs monarchies du golfe persique, dont les Émirats arabes unis, le Koweït ou encore Bahreïn. Les accords de paix entre Israël et ces pays, négociés en grande partie par Washington, en sont la preuve. Seul émirat écarté de cette lune de miel, le Qatar, «qui joue sur plusieurs tableaux», précise Myriam Benraad.
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— Jérôme Cartillier (@jcartillier) March 20, 2018
Des liens forts s’étaient créés, car tous les protagonistes trouvaient leur compte dans la relation entre les États-Unis et les monarchies du Golfe. Avant d’être chaleureuses, ces relations étaient, comme souvent avec le «businessman» Donald Trump, basées sur un aspect transactionnel: des pressions américaines sur l’Iran en échange d’achat d’armes de la part des pétromonarchies.
Cette variable pourrait effectivement évoluer, aucun mariage n’est parfait, mais entre les États-Unis et les monarchies du Golfe, le divorce semble encore loin. Joe Biden ou pas.