La France lutte désormais contre une double crise: une augmentation de l’incidence du Covid-19 et une nouvelle vague de terrorisme islamiste. Dans les deux cas, Emmanuel Macron consulte régulièrement un mystérieux organisme: le Conseil de Défense et de Sécurité Nationale (CDSN).
Ce «cabinet noir» semble jouer un rôle essentiel dans la prise de décision du Président. Sur le Covid-19, par exemple, les consultations de Macron avec ce Conseil semblent souvent conduire à serrer la vis sur les libertés publiques. Quelle est cette entité non élue? Qui se trouve dans cette «boîte noire»? De quelle autorité dispose le Conseil de Défense et de Sécurité Nationale pour décider de restreindre les libertés fondamentales des citoyens en France? Quelle crédibilité aurait une entité militaire face aux défis sanitaires?
Et peut-être le plus important: quels freins et contrepoids existent à la fois au sein de ce Conseil et vis-à-vis de son autorité collective? François Chauvancy, général de brigade (2S) de l’armée de Terre et docteur en sciences de l’information et de la communication, explique le rôle de cet organisme:
«Il [le CDSN, ndlr] a pris une importance majeure surtout depuis 2009, notamment depuis les attentats terroristes de 2015, où finalement le Président Hollande et aujourd’hui le Président Macron se sont rendu compte qu’il leur fallait quand même un outil –qui est prévu par les textes– pour traiter de la gestion de crise.
C’est ça le vrai problème: comment répondre à une crise qui survient brutalement avec les personnes et les ministères concernés par cette crise, avec un Conseil présidé par le Président de la République, qui est chef des armées…»
Comment se compose cet organisme? Le général Chauvancy répond:
«Qui est autour de cette table? En gros, 10 à 15 personnes. En principe, quand ce n’étaient que des Conseils de Défense et non pas des conseils de Défense écologiques, sanitaires, qui n’existaient pas […] On n’en parlait jamais […] C’était vraiment la sécurité nationale […] Il y avait le ministère des Armées, des Affaires étrangères, de l’Économie, de l’Intérieur, un secrétariat, avec un ou deux généraux et quelques officiers supérieurs pour organiser la séance, donc un petit nombre. Et je crois qu’aujourd’hui, la démocratie a besoin d’un centre de commandement.»
Le général explique le fonctionnement du Conseil et justifie le secret qui l’entoure:
«Il est bien prévu que rien ne doit sortir de la pièce. Nous sommes dans la protection de l’information. Avec les médias, très rapidement, une information mal maîtrisée rendue publique pose des problèmes. Si vous voulez prendre des décisions bien calculées, bien réfléchies, sans que ça n’engage sur le moment, il faut garder la confidentialité de l’information et ce Conseil de Défense répond à cet impératif de confidentialité et donc d’efficacité.»