Les chiffres inquiétants de la contamination par le SARS-CoV-2 en France posent de nouveau le problème de la gestion de la crise du Covid-19 au sein des hôpitaux. En Belgique, plusieurs lettres ouvertes signées par le corps médical ont vu le jour. D’abord, un collectif de médecins, de scientifiques et d’académiques a publié une tribune demandant au gouvernement national une «mise sur pied urgente de nouveaux groupes de travail». Puis, une autre missive, appelant à «un débat ouvert» au niveau européen, a fait «appel aux politiciens pour qu’ils s’informent de manière indépendante et critique dans le processus de prise de décision et dans la mise en œuvre de mesures» visant à protéger les populations contre le coronavirus.
Gaëtan Casanova, médecin anesthésiste-réanimateur à l’hôpital Foch, en région parisienne, considère que «les données médicales pures sont peu importantes» pour juger de l’impact de la pandémie en France.
Avec le Covid-19, «on a des pathologies imbriquées»
«Le Covid, en tant que maladie a pu révéler ou provoquer d’autres affections. Souvent, on a des pathologies imbriquées: par exemple, le virus, qu’on sait trombogène, peut entraîner des embolies, notamment un accident vasculaire cérébral (AVC)», explique Gaëtan Casanova au micro de Sputnik.
Gaëtan Casanova confirme «avoir observé» des personnes infectées au SARS-CoV-2 «développer des AVC» ou des embolies pulmonaires. Mais difficile de «répondre clairement» et de savoir si, chez la personne hospitalisée pour un AVC et positive au Covid, c’est le coronavirus qui a «créé» l’embolie ou si «on a trouvé le virus» en traitant l’accident vasculaire.
Si le jeune médecin confirme qu’«au début de la pandémie, en mars et avril, ça a été difficile», il refuse «d’être trop critique sur la période initiale» tant les circonstances ont étés compliquées et imprévisibles. Néanmoins, aujourd’hui, «avec plus de recul», il se permet de l’être «un peu plus».
«Dans la plupart des hôpitaux, comme chez nous à Foch, la majorité de l’activité chirurgicale a été conservée», précise Gaëtan Casanova.
«Néanmoins, il est probable qu’il y ait eu des retards de prise en charge sur certaines pathologies à cause du Covid», confirme le médecin, sans vouloir «dramatiser». Il souligne par ailleurs que «l’ensemble des établissements» fait tout pour garder une activité «classique».
Isoler les malades, un vrai casse-tête
«Puisqu’on connait les conséquences du coronavirus et ce qui le rend dangereux, je trouve que cette pandémie pose davantage un problème logistique qu’un problème médical», explique Gaëtan Casanova.
Chaque hôpital s’efforce de résoudre les problèmes logistiques avec les moyens dont il dispose. En général, les hôpitaux appliquent une politique qui consiste à «limiter le nombre de patients à un par chambre».
«Si les chambres sont doubles, ça limite le nombre d’hospitalisations possible», rappelle le médecin.
La sécurité épidémiologique sous-entend l’absence de contacts entre les patients positifs et les patients négatifs au Covid. L’hôpital Foch, où travaille Gaëtan Casanova, respecte cette norme: «Tous les admis passent un test PCR.»
«Comme les résultats du test sont connus rapidement, dans la journée, on arrive plus facilement à créer des chambres doubles. La capacité à réaliser beaucoup de tests nous permet de résoudre ce problème logistique», rappelle le médecin de l’hôpital Foch.
Suit également l’isolation des patients positifs au Covid, «comme pour toute maladie infectieuse transmissible» avant la pandémie.
Les chiffres fiables au centre de la gestion de la pandémie
«Les chiffres sont sûrement vrais. Ils sont communiqués à la suite de la parution des certificats de décès, qui mentionnent la pathologie en cause. Bien qu’il soit parfois difficile de trancher en présence de deux pathologies évidentes», précise Gaëtan Casanova.
Le médecin admet que cela dépend de la «façon dont les hôpitaux classent le décès». Reste néanmoins un «problème avec les chiffres» au niveau de la coordination et de la base du calcul. Le médecin cite l’exemple d’un pic de mortalité constaté en septembre dernier et «qui a beaucoup inquiété». Par la suite, on a découvert qu’un hôpital avait transmis des données de mortalité «condensées», ce qui a faussé la donne. D’après Gaëtan Casanova, la régularité de transmission des chiffres au Santé Publique France demande une surveillance «attentive».