Immigration clandestine: des go fast pour rallier Oran à Alméria en quelques heures

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En 2020, les harraga algériens sont en tête des migrants à arriver clandestinement par la mer sur le territoire espagnol. Les candidats peuvent désormais embarquer dans des go fast pour rallier Oran à Alméria en quelques heures. Un nouveau phénomène qui inquiète les autorités espagnoles.

Depuis le début de l’année 2020, les Algériens battent un triste record. Selon le ministère espagnol de l’Intérieur, pour la seule période du 1er janvier au 19 mai 2020, 1.699 Algériens sont arrivés sur les côtes d’Andalousie contre 984 Marocains. La pandémie de coronavirus qui a fortement touché l’Espagne n’a visiblement pas découragé les harraga algériens (littéralement «ceux qui brûlent les frontières»). La période estivale semble même avoir boosté le nombre de départs. Les récents communiqués du ministère algérien de la Défense nationale sont là pour l’attester. Lundi 21 septembre, le service des gardes-côtes a fait état de «42 opérations distinctes menées dans les eaux territoriales entre le 15 et le 19 septembre 2020» qui ont conduit «à l’interception et au sauvetage de 485 personnes qui tentaient de prendre la mer de manière illicite».

Déception

Chahreddine Berriah, journaliste d’El Watan à Tlemcen, à 530 kilomètres à l’ouest d’Alger, spécialiste des questions de migrations, explique à Sputnik que cette recrudescence des départs à partir d’Algérie est intervenue au lendemain de l’élection présidentielle de décembre 2019. «Le Hirak avait suscité un tel espoir qu’il n’y avait pratiquement plus de départs par la mer. Mais, après l’élection présidentielle, nous avons observé un nombre important de harraga», explique l’auteur d’Itinéraires interdits. Selon Chahredidine Berriah, l’Oranie (ouest algérien) est devenue la principale plateforme de départ en Algérie.

«Même les Algériens qui vivent à l’est du pays, dans des régions géographiquement proches de la Sardaigne et du sud de l’Italie préfèrent venir dans l’Oranie pour sa proximité avec la côte espagnole. Les départs à partir des villes d’Oran, Arzew, Ghazaouet et Mostaganem attirent beaucoup de monde, des locaux, des Subsahariens et même des Marocains et des Tunisiens. Il s’avère que la traversée est sûre et rapide, la ville d’Alméria en Andalousie étant à tout juste 200 kilomètres», indique le spécialiste algérien.

Un taxi pour Alméria

Dans la région d’Oran, un nouveau phénomène est apparu depuis quelques mois: les go fast, des embarcations semi-rigides équipées de puissants moteurs qui peuvent rallier les plages d’Andalousie en quelques heures. Une situation qui préoccupe la garde civile espagnole qui est confrontée à ces bateaux ultrarapides.

«Ces bateaux atteignent la vitesse de 40 nœuds (74 km/h), donc la traversée entre Oran et Alméria dure moins de cinq heures. Ils peuvent transporter une dizaine de personnes et ont également l’avantage d’être sûrs. Mais la traversée dans ces "taxis", comme les appellent les harraga, a un prix: 3.500 euros. Selon nos informations, il y aurait deux semi-rigides de ce genre dans la région d’Oran. Il est assez difficile d’y avoir accès, car les membres de ces réseaux de passeurs sont très méfiants», souligne Chahredidine Berriah.

Drames

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Les moyens de transport changent, les passeurs pourraient abandonner les frêles «boti», des barques de pêche, pour de puissants semi-rigides. Le profil des candidats à l’immigration clandestine change également. «Il y a de plus en plus de familles avec des enfants, souvent des bébés et également des femmes seules. Ce n’est plus l’image du jeune désœuvré qui a économisé pour embarquer dans un bateau. Aujourd’hui, des fonctionnaires choisissent de prendre la mer pour tenter leur chance en Europe. Beaucoup d’Algériens sont désespérés et ne veulent plus vivre ici», ajoute le journaliste d’El Watan.

Mais cette quête de vie meilleure peut vite tourner au drame. C’est ce qui s’est produit jeudi 17 septembre 2020 lorsqu’une embarcation a chaviré près des côtes de Mostaganem causant la mort de 10 personnes. Parmi les victimes, deux enfants en bas âge et leurs parents. Pour Chahredidine Berriah, «les départs devraient se multiplier dans les prochains mois et la détérioration des conditions météorologiques avec l’entrée de l’hiver ne ralentira pas ce phénomène».

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