Le Rafale revient sur le devant de la scène… grecque! Selon le site Opex360, qui reprend des informations de deux médias grecs, il est «plausible» qu’une commande du chasseur multirôles de Dassault par Athènes soit dans les tuyaux.
Selon le quotidien athénien Kathimerini, la Direction générale de l’armement (DGA) préparerait une offre à destination des autorités grecques portant sur dix avions Rafale de «dernière génération», complétée par un «petit nombre» d’appareils prélevés sur la dotation de l’armée de l’Air. De son côté, l’hebdomadaire Parapolitika rapporte que Paris aurait proposé à Athènes de lui céder huit appareils d’occasion, aux standards F1 et F2, qui seraient prélevés sur la dotation de l’armée de l’Air, et de lui en vendre dix autres modernisés au standard F3R.
Le Rafale en Grèce a beau être un «vieux serpent de mer», les conditions dans lesquelles cette commande pourrait avoir lieu interpellent celui-ci. À commencer par les modalités ébruitées par les médias grecs: en effet, l’Armée de l’air à qui on prendrait des Rafale «n’est pas un surplus», s’indigne Jean-Vincent Brisset, ancien pilote de Mirage IV au sein de la Force aérienne stratégique (FAS).
«C’est toujours étonnant de voir des pays avec de grosses difficultés économiques vouloir acheter de l’armement. […] On a vendu des Rafale dans des conditions assez particulières à l’Égypte, le contribuable français n’a pas tout gagné dans cette affaire, va-t-on faire pareil avec la Grèce?», s’interroge Jean-Vincent Brisset.
Le général souligne le flou financier entourant les contrats d’armement avec l’Égypte et l’Inde, ainsi que les renégociations entre Dassault et le gouvernement sur l’échelonnement des prochaines livraisons à l’armée de l’air. «Faire des contrats c’est bien… si ces contrats sont assortis de paiements», commente le général (2 s) Jean-Vincent Brisset. Deuxième point noir au tableau de cet éventuel contrat: si pour lui «l’industriel est bien payé», pas dit que l’État français –et derrière lui les Français– s’y retrouve:
«On a l’impression que l’ex-ministre de la Défense, devenu ministre des Affaires étrangères, se fait ses petits contrats en accord avec l’industriel, mais globalement, sur le plan militaire ainsi que pour le contribuable, je ne pense pas que ce seront de bonnes opérations», tacle l’ancien officier d’État-major.
Troisième et dernier point qui fâche, la situation géopolitique dans laquelle se place la France. Il n’échappe en effet à personne que ce contrat surviendrait en plein cœur des tensions entre la Grèce et la Turquie. Or, bien qu’elle ne soit pas à sous-estimer une «douzaine de Rafale ce n’est pas un “game changer”» assène le Général (2 s).
S’ils ne constitueraient donc pas un «game changer» dans les airs, des Rafale commandés par la Grèce feront toutefois une nette différence… sur le plan diplomatique.
En effet, via un tel contrat, Athènes consoliderait son alliance avec la France dans le différend territorial qui l’oppose aujourd’hui à Ankara. En somme, ce contrat serait, géopolitiquement parlant, une prise de position claire de Paris, «dans une situation qui est relativement tendue». Un choix que ne voit pas d’un très bon œil le général (2 s):
«On va entraîner des Grecs sur le territoire français […] on passera pour les va-t’en guerre de l’Europe!» met en garde Jean-Vincent Brisset.
Pour lui, si «en ce moment, c’est très à la mode de faire semblant de se démarquer des États-Unis», le général (2 s) regrette que cela nécessite de «débourser beaucoup d’argent» pour au final mettre la France en porte-à-faux avec des États. «Les Allemands nous ont bien expliqué que nous resterions tous seuls», rappelle le chercheur associé à l’IRIS. Derrière ces tensions entre Athènes à Ankara, on retrouve une France qui semble vouloir régler ses comptes avec la Turquie de Recep Tayyip Erdogan.
L’industrie de Défense française semble donc entrer dans la danse… à moins qu’Athènes n’ait lancé la rumeur pour forcer la main de Paris.