Le Président libanais Michel Aoun et le chef du gouvernement Hassan Diab étaient au fait depuis le 20 juillet de la présence de 2.750 tonnes de nitrate d’ammonium dans le port de Beyrouth, affirment auprès de Reuters deux sources sécuritaires haut placées sous couvert d’anonymat. Elles précisent qu’un rapport, que Reuters dit avoir consulté, leur a été transmis, mettant en garde contre le risque que constituait ce stock qui «peut détruire la capitale s’il explose».
Plus troublant encore, l’une des deux sources confie au média qu’une lettre privée destinée au chef de l’État et au Premier ministre a été jointe au rapport. Elle souligne que les deux hommes ont été mis au courant personnellement et sommés d’agir en urgence.
«Je les ai avertis»
«Je les ai avertis que ça pouvait détruire Beyrouth si ça explosait», ajoute-t-il.
Contactés par Reuters au sujet de cette lettre confidentielle, les cabinets du Président de la République et du Premier ministre se sont refusés à tout commentaire.
En janvier, suite à la découverte d’un trou dans un mur du hangar où étaient stockées les 2.750 tonnes de nitrate d’ammonium et la constatation que l’une de ses portes était abîmée, une enquête a été ouverte par un juge et confiée au procureur général Ghassan Oweidat, détaille la seconde source auprès de Reuters. Elle précise que le hangar n’était même pas surveillé.
«Je ne suis pas responsable!»
La semaine dernière, le Président Michel Aoun a déclaré à la presse qu’il avait été informé de la présence du stock de nitrate d’ammonium dans le port de Beyrouth, rapportait Reuters. Il dit avoir ordonné au secrétaire général du Conseil Suprême de la Défense (conseil regroupant toutes les agences de sécurité et militaires libanaises sous l’autorité du chef de l’État) de «faire le nécessaire».
«La Direction générale de la sécurité de l'État avait dit que c'était dangereux. Je ne suis pas responsable! Je ne sais pas où il a été placé [le stock de nitrate d’ammonium, ndlr] et je ne savais pas à quel point c'était dangereux», se justifiait alors le Président Aoun. «Je n'ai aucune autorité pour traiter directement avec le port. Il y a une hiérarchie et tous ceux qui savaient auraient dû assumer leurs responsabilités pour faire le nécessaire», concluait-il.
Le dernier bilan officiel en date du 4 août fait état de 158 morts, 6.000 blessés et près de 300.000 sans-abris.