«Ils ont tué des enfants»: une mère de victimes accuse Sanofi, mis en examen dans l’affaire de la Dépakine

© AFP 2024 ERIC PIERMONTAssemblée générale de Sanofi, mai 2018 (image d'illustration)
Assemblée générale de Sanofi, mai 2018 (image d'illustration) - Sputnik Afrique
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Après la mise en examen du laboratoire Sanofi pour «homicides involontaires» dans l’enquête sur la Dépakine, Marine Martin, mère de deux enfants handicapés, réagit au micro de Sputnik. Figure de proue des familles de victimes, elle voit cette décision des juges comme une étape importante de la procédure.

«C’est une nouvelle énorme pour nous». D’un ton poignant et déterminé, Marine Martin accuse: «Ce sont des criminels, ils ont tué des enfants et la presse n’en a pas assez parlé», lance cette mère de victimes, jointe par Sputnik.

Sanofi - Sputnik Afrique
Dépakine: Sanofi mis en examen pour «homicides involontaires»
Confirmant une information du Monde, Sanofi annonce ce 3 août à l’AFP sa mise en examen pour «homicides involontaires» dans l’affaire de la Dépakine. Une décision des juges datant du 20 juillet, indique le quotidien vespéral.

Le groupe pharmaceutique était déjà poursuivi pour «tromperie aggravée» et «blessures involontaires» dans l'enquête sur la commercialisation de l'antiépiléptique aux effets secondaires décriés sur les grossesses.

«C’est déjà une très grande victoire», réagit Marine Martin au micro de Sputnik.

La lanceuse d’alerte, dont les deux enfants souffrent de troubles, psychomoteurs pour l’une et autistiques pour l’autre, se bat depuis une dizaine d’années pour faire reconnaître la responsabilité du géant pharmaceutique. Traitée quotidiennement à la Dépakine pendant des années, y compris lors de ses deux grossesses, elle estime ne pas avoir été correctement informée des risques du médicament sur les fœtus.

Fondatrice de l’Apesac, l’Association des parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anticonvulsivant, la quadragénaire a fédéré d’autres familles et «a incité beaucoup d’autres gens à porter plainte». L’association représente ainsi pas moins de 4.000 personnes.

«Guerilla judiciaire»

L’instruction, ouverte en 2016 par le tribunal judiciaire de Paris à la suite d’une procédure de l’Apesac, devra maintenant déterminer si le laboratoire peut être tenu pour responsable de la mort de quatre nourrissons entre 1990 et 2014. «Il n’est pas contestable que le lien entre la prise [de Dépakine] et les dommages constatés chez les très jeunes victimes est scientifiquement établi», notent les juges d’instruction dans leur ordonnance, citée par Le Monde. C’est donc sur l’attitude du groupe face à la toxicité connue du produit que porte l’enquête.

«Un signal fort, se réjouit Marine Martin, le terme d’homicide est grave. Nous attendions cela depuis longtemps». La mère de famille salue par ailleurs la décision des juges d’instruction d’assortir la mise en examen de garanties financières très élevées: «Sanofi va devoir bloquer 80 millions d’euros sur un compte, pour qu’ils ne puissent pas fuir leurs responsabilités s’il y a un procès et qu’ils sont reconnus coupables.»

Et de poursuivre: «Il faut qu’ils arrêtent de se dédouaner, ils ont un sentiment d’impunité.»

L’avocat des familles, maître Charles Joseph-Oudin, dénonce en effet régulièrement «une guérilla judiciaire» de la part du groupe pharmaceutique: «Ils refusent d’indemniser les victimes quand ils sont condamnés», lance-t-il ainsi ce lundi au micro d'Europe 1.

Soignants au défilé du 14 juillet 2020 (image d'illustration) - Sputnik Afrique
Crise de la santé: «L’État prétend dire aux professionnels comment ils doivent faire leur travail»
«Alors que même Servier a indemnisé des gens pour le Mediator», renchérit Marine Martin, qui compte interpeller le Premier ministre: «Actuellement, c’est l’ONIAM (Office national d'indemnisation des accidents médicaux) qui indemnise les victimes. C’est insupportable que ce soit de l’argent public qui paie pour les méfaits d’un groupe privé. Ça n’est pas au contribuable de mettre la main à la poche, c’est à Sanofi.»

Mais Marine Martin voit surtout cette mise en examen comme une étape importante: «Début juillet, la justice a reconnu la responsabilité de l’État. Selon moi, la puissance publique a été plus que négligente, elle a été complice. Maintenant, je compte sur une mise en examen de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), au sein de laquelle beaucoup de gens ont eu des conflits d’intérêts qui les ont rendus complaisants à l’égard de Sanofi. Et puis il y a tous ces médecins qui ont continué à prescrire de la Dépakine à des femmes enceintes alors qu’ils savaient», conclut-elle avec véhémence.

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