Sanctionné en 2015 sur décision du ministère de l’Intérieur pour avoir porté un casque à emblème nazi, un policier vient d’être promu brigadier-chef, ce qui a provoqué la consternation d’une de ses anciennes collègues.
Ce CRS était en 2012 l’un des supérieurs hiérarchiques d’Inès, une Franco-Algérienne dont le prénom a été changé. C’est notamment elle qui a donné l’alerte concernant l’admiration de son chef envers les équipements nazis, ainsi que sur les propos sexistes tenus dans leur unité. Dans une attestation de 2012 que Marianne avait pu consulter, un autre CRS avait également fait état de propos racistes énoncés par l’homme.
«Les Allemands se sont trompés de cible en 1940 en gazant les Juifs plutôt que les Arabes», avait-il déclaré, selon le journal.
Pourtant, dès 2013, le cabinet du ministère de l’Intérieur avait affirmé que, d’après de «premiers éléments de l’enquête administrative», les accusations de discriminations liées à l’origine de l’intéressée ne paraissaient pas «étayées». Qui plus est, la Place Beauvau a tranché un an plus tard:
«Si l’intéressée a parfois rencontré avec certains collègues des difficultés d’ordre relationnel, elle partage la responsabilité des incidents évoqués.»
Ces conclusions sont pourtant diamétralement opposées à celles du défenseur des Droits, poursuit Marianne. Saisis par Inès, les services de l’autorité indépendante ont corroboré les propos sexistes subis et sa mise à l’écart par une enquête de «près de deux ans» et ont conclu que celle-ci n’avait pas cherché à vérifier si «les agissements dénoncés étaient justifiés».
Toutefois, au sujet de l’insigne nazi, l’enquête avait conclu à «un très grave manquement» au plan administratif et à un acte «contraire aux valeurs de la police». Le CRS avait alors reçu sa sanction du ministre Bernard Cazeneuve: 15 jours d'exclusion.
«Il est promouvable depuis 2014»
Mais si Inès a été mise à l’écart, son ancien supérieur, qui avait arboré un insigne SS, a continué sa carrière. Toujours selon Marianne, il aurait fait les frais d’une pathologie cérébrale l’année passée et serait depuis en congé maladie, ce qui n’a pas empêché sa promotion. Ce qui lui devrait permettre de toucher une retraite plus élevée, celle-ci étant calculée sur la base de 75% du salaire des six derniers mois.
Le service de communication de la police a donné une explication à cette décision.
«Il est promouvable depuis 2014. Le 6 février 2020, la commission administrative paritaire compétente a proposé son avancement au grade de brigadier-chef à partir des règles appliquées à tous les fonctionnaires, sur la base des trois dernières évaluations et de la réussite aux examens professionnels.»
Sollicités à plusieurs reprises par le journal, ni le ministère de l’Intérieur, ni le brigadier-chef, n’ont répondu. La jeune femme s’est dite pour sa part écœurée:
«J'ai dénoncé le sexisme, le racisme, et moi, du coup, je n’ai plus de carrière. C’est injuste. On se dit que quand on est victime ou témoin de faits répréhensibles dans la police, il vaut mieux se taire ou se barrer», a-t-elle amèrement conclu.
Avoir porté un emblème nazi et participer à une ambiance sexiste dans une unité ne semble donc pas être un obstacle à une promotion au sein de la police…