Un rapport interne de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF) dont Le Parisien s’est procuré une copie avant sa transmission au ministère de l’Intérieur porte un regard très critique sur la gestion de la pandémie.
Les premiers visés sont les structures administratives du ministère de la Santé, les agences régionales de santé et le Samu.
Le colonel Grégory Allione, président de la FNSPF, a confié au journal que ce retour d’expérience (Retex) était un document de travail qui n’était pas destiné «à fuiter dans la presse» et a confirmé le sentiment «d'un sous-emploi et d'une absence de prise en compte des capacités opérationnelles» de ses collègues «rompus à la gestion de tous les événements».
La première critique émise par les pompiers concerne la façon dont la gestion a été dirigée.
Principes «bafoués» de la direction unique
«Pour être efficace la gestion d'une crise d'ampleur doit mobiliser un directeur unique, un commandant des opérations unique et des conseillers techniques.»
Le rapport signale que ces principes ont été «bafoués» et rappelle que dans un premier temps c'est la direction générale de la santé, donc le ministère de la Santé, qui a piloté la réponse de l'État face à la pandémie avant que le ministère de l'Intérieur ne rejoigne le dispositif.
«On a confié le rôle de commandant de crise à des conseillers techniques», regrettent les pompiers.
Conclusion des pompiers, «plutôt qu'une crise sanitaire, cette crise a surtout été celle du leadership de la communication» conduisant à l'incompréhension des «acteurs de terrains, pompiers mais aussi médecins généralistes».
Évacuation par TGV: opération de communication et esbroufe
Les pompiers ont vivement critiqué les évacuations par TGV et le pont aérien mis en place à l’aéroport d’Orly estimant que souvent des dizaines de patients avaient été transférés d’une région vers une autre tandis qu’il y avait des réponses à proximité.
«Pures opérations de communication et véritable esbroufe: était-il efficace de faire faire des centaines de kilomètres aux victimes alors que souvent il y avait de la place dans la clinique d'en face?».
Conséquence concrète d'après les pompiers, «l'oubli des Ehpad, laissant seules les collectivités territoriales face aux décès en nombre de nos aînés».
Propositions pour l’avenir
Le Retex des pompiers dresse aussi une liste de propositions pour «revoir notre modèle de gestion de crise» qui placerait, selon eux, le ministère de l'Intérieur comme «responsable de la conduite opérationnelle des crises». Comme option, il propose la création d'un ministère ou d'un secrétariat d'État «chargé de la gestion des crises et des situations d'urgence» reprenant là l'exemple russe.
En bref, le document appelle à faire confiance aux acteurs de terrain et de proximité.
«Toutes les leçons doivent être tirées du succès de la gestion du déconfinement dont les préfets et les maires ont été les pivots.»