Un policier a été condamné à 18 mois de prison pour avoir frappé une manifestante de 62 ans alors en béquilles. Cette peine est assortie d'un sursis simple et d'une interdiction de port d'armes pendant cinq ans ainsi que d'une inscription au casier judiciaire. Une décision qui s'inscrit dans une contexte de dénonciation des violences policières.
Une peine plus sévère que la demande du parquet
Elle va au-delà des réquisitions du ministère public qui avait notamment réclamé 12 mois de prison avec sursis simple à l'encontre de ce policier de 47 ans. Condamné pour «violences avec arme par personne dépositaire de l'autorité publique», ce dernier a reconnu à la barre avoir commis «une faute professionnelle» ce 19 janvier 2019, lors de l'acte IX des «gilets jaunes».
L'infraction «dénote une volonté illégitime et absurde d'en découdre», a fustigé le président du tribunal, Jérôme Lizet, à la lecture du jugement, rendu après quelques dizaines de minutes de délibéré.
Certes, le tribunal a tenu compte du «contexte général» des manifestations de «gilets jaunes», quand les forces de l'ordre, samedi après samedi, essuyaient insultes et projectiles de la part de certains manifestants. Mais ce «passage à l'acte ne se justifiait absolument en rien et c'était ce qu'on pouvait appeler des violences totalement gratuites», a relevé le magistrat.
«Il a manqué à ses devoirs et à son serment» en voulant «se défouler», a tonné le procureur Alexandre Chevrier, pour qui le geste de ce gardien de la paix «rabaisse l'institution qu'il est censé servir».
Des coups de matraque sur une femme de 62 ans
S'appuyant sur les images de vidéosurveillance, méticuleusement disséquées à l'audience, le magistrat a même retenu «deux coups de matraque» assénés à Marlène Lutz, 62 ans, figure locale des «gilets jaunes». Celle-ci n'était pas armée et se déplaçait alors à l'époque avec une béquille. Elle a eu besoin de onze points de suture au cuir chevelu.
Selon le rapport de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), le policier «n'était pas menacé directement ou personnellement par un manifestant ou par la victime».
Les images le montrent en effet jaillir cagoulé du fourgon qu'il conduit, et a arrêté en pleine rue, pour se précipiter sur le trottoir où de nombreux «gilets jaunes» refluent. C'est à ce moment qu'il frappe derrière la tête Mme Lutz qui passe à côté de lui.
Du «stress» et de la «fatigue»
A la barre, ce fonctionnaire expérimenté aux 23 années de service, bien noté de sa hiérarchie, a peiné à expliquer son geste, ne reconnaissant qu'un unique coup de «bâton souple de défense». Il a invoqué un contexte de «stress» et de «fatigue» lors d'une journée marquée par de nombreux heurts entre manifestant et forces de l'ordre.
Son avocate, Me Christine Meyer, a toutefois reconnu un «dérapage» de son client, demandant en vain une sanction plus clémente que les réquisitions. Ni elle ni son client n'ont souhaité s'exprimer après le jugement.