Jamais deux sans trois: dans la nuit du 15 au 16 juin, nouvelle manifestation de colère des gardiens de la paix à Paris, mais également dans différentes villes françaises. Vers minuit, ce sont près de 400 policiers, sirènes hurlantes et gyrophares bleus scintillants qui ont convergé de toute la région parisienne sous la Grande Arche de la Défense. Une fois de plus, ils manifestaient leur colère vis-à-vis des propos de Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, sur les techniques d’interpellation et la lutte contre le racisme dans la Police nationale.
Une image forte pour une opération symbolique: des policiers en uniforme, en rang sur les marches blanches de l’Arche, silencieux sous les rafales de vent, au seul son du grésillement de leur radio de service… suivie de la Marseillaise reprise en chœur.
«On attend de retrouver une certaine pérennité dans les hautes sphères de notre ministère. On ne peut pas travailler si ses annonces sont suivies de rétropédalage. On a besoin de stabilité dans notre métier, qui est de plus en plus compliqué», informe Mickaël Dequin.
Depuis plusieurs années, la Police nationale est sollicitée dans la lutte contre le terrorisme, lors des manifestations des Gilets jaunes, des mouvements sociaux ou des rassemblements antiracistes.
Policiers épuisés et mal équipés
Souvent critiqués et épuisés, les gardiens de la paix n’arrêtent pas de dénoncer leur manque de moyens, avec un matériel jugé peu performant et des locaux vétustes. Malgré cela, le représentant d’Unité SGP Police des Hauts-de-Seine insiste sur le caractère républicain de la Police, «sur qui l’État peut compter».
«Les faits d’actualité s’enchaînent, cela fait plusieurs années que l’on est sur tous les fronts. De ce fait, on a besoin de reconnaissance au lieu d’être cloués au pilori», exige Mickaël Dequin.
Le policier commente succinctement les évènements récents à Dijon, sur lesquels il «n’a pas d’informations détaillées», en soulignant que les forces de l’ordre se trouvent désormais face à une «délinquance de plus en plus violente».
«Si vous mettez en face [des délinquants, ndlr] une police affaiblie et non équipée dignement, les policiers se trouvent en danger sans pouvoir assurer correctement leur mission», conclut Mickaël Dequin.
Source de colère des gardiens de la paix
Plusieurs mobilisations de ce type se sont produites en France à la suite des annonces de Christophe Castaner du 8 juin, lequel avait prôné la «tolérance zéro» face au racisme et notamment annoncé l’abandon de la pratique dite de l’étranglement.
Face à ces nombreuses actions, Frédéric Veaux, directeur général de la Police nationale (DGPN) a annoncé le 15 juin dans une note que la clé d’étranglement serait utilisée jusqu'à ce qu'une nouvelle technique d'interpellation soit définie.
La note précise que cette clé ne sera plus enseignée dans les écoles de police et que mercredi prochain un groupe de travail se réunira pour définir une technique de substitution «permettant aux policiers d’agir dans les meilleures conditions possibles de sécurité physique et juridique». Le groupe doit rendre ses conclusions avant le 1er septembre 2020.
Cette annonce n’a toutefois pas éteint la colère des policiers qui se sont également réunis le 15 juin à Lille ou encore à Nancy.
«À l’heure actuelle, on est encore dans le flou puisqu’on nous annonce pour les collègues la possibilité d’utiliser la technique de la clé d’étranglement», a lancé le 15 juin Mickael Desquin auprès de RT France.
«La clé d'étranglement, c'est fait pour maîtriser des individus dangereux, qui peuvent causer des dommages collatéraux, on le fait pas par plaisir», a quant à lui expliqué à l’AFP Emmanuel Quemener, secrétaire régional d’Alliance pour les Hauts-de-Seine. Et de conclure:
«On ne demande pas de pognon, on veut de la reconnaissance. On est les grands oubliés, on est l'éponge du gouvernement pour absorber tous les maux de la société».