Vous les avez croisés à un mariage, un banquet d’entreprise, un séminaire ou un dîner de gala: ils sont maîtres d’hôtel, hôtesses, cuisiniers, agents de sécurité et passent souvent 10 à 12 heures par jour à servir la fée gastronomie française. Leur statut est aussi précaire que le plaisir des papilles est éphémère: ces intermittents de l’emploi sont inscrits au chômage en catégorie B et C, un peu comme pour le domaine du spectacle.
Ce sont ces travailleurs que le CPHRE (Collectif des Précaires de l’Hôtellerie-Restauration et Événementiel) entendait défendre lors de la manifestation de ce 26 mai, esplanade du Trocadéro, à Paris. En arrière-plan de leur action: la tour Eiffel.
Environ 200 personnes place du #Trocadero à #Paris, vacataires de la restauration inquiets pour leur avenir. "On n'a plus de jobs, on ne saot pas quand ça va reprendre, on craint le RSA", explique Mathieu. Ils brandissent des pancartes sur leur situation. #DeconfinementJour15 pic.twitter.com/uiHWBvpocG
— actu Paris (@actufrparis) May 26, 2020
Un membre fondateur du CPHRE a échangé avec Sputnik anonymement afin de «mettre l’accent sur le collectif». Il s’insurge tout d’abord contre la réaction des forces de l’ordre à leur action.
«Concernant la police, le contrôle avait pour but de verbaliser de 135€ des personnes à l’agonie qui crient à l’injustice, pour un regroupement de plus de 10 personnes», déplore l’activiste.
Les «précaires de l’hôtellerie-restauration» multiplient leurs actions
Pour les vacataires qui travaillent en moyenne de 170 à 200 heures par mois, «quand il y a du travail», la reprise post-confinement s’annonce difficile.
«À la marge de la société, il existe 2,2 millions de personnes qui travaillent dans le secteur de l’hôtellerie, restauration et événementiel, que l’on appelle “les intermittents de l’emploi”. C’est 10% de la population active de France, pourtant, il n’y a aucune mesure d’urgence qui leur est destinée», s’insurge le cofondateur du CPHRE.
Le collectif multiplie les actions pour se faire entendre: une pétition lancée début avril à l’attention de Muriel Pénicaud, ministre du Travail, une lettre ouverte au gouvernement il y a une dizaine de jours.
#ManifesteCPHRE#LPPM#intermittents #precaires@edwyplenel @Poulin2012 @gerardfiloche @isabellegabrion @SamuelChurin @CecHautefeuille @ThibaultLh18 @LeMediaTV @NPolony @Mediapart @Regards_fr @Francois_Ruffin @Denis_Robert_ @JLMelenchon @lemondefr@RobinBouctot @Clem_Autain pic.twitter.com/Zrfac0ORbB
— CPHRE (@CPHRE2020) May 17, 2020
Hélas, le tweet reprenant le manifeste du collectif n’a obtenu jusqu’à présent qu’une maigre vingtaine de «likes».
«On demande de geler le décompte de nos indemnités, puisque nous en avons besoin. La reprise économique va tarder. Même si on ouvre les restaurants le 2 juin, la profession aura suffisamment de personnel fixe pour assurer la petite activité qu’elle aura. Ils ne feront pas appel à nous», détaille le membre du CPHRE.
Les vacataires sont donc obligés d’«attendre le redémarrage de l’activité», qu’ils ne voient pas venir avant la fin de cette année ou le début de l’année prochaine et ils s’attendent à se retrouver sans ressources.
Le redémarrage de l’activité attendu pour la fin de l’année
Le Collectif demande également de prolonger les droits au chômage pour ceux qui sont arrivés à la fin de leurs droits au moment du confinement, puisqu’«avec quelque heures qui manquent pour le renouvellement», certaines personnes se retrouvent sans ressources. Inspiré par une annonce d’Emmanuel Macron pour le monde du spectacle, le CPHRE revendique une «année blanche» pour l’ensemble des droits des chômeurs et précaires inscrits à Pôle emploi, «pour sauver des vies».
«On travaille dans le secteur du tourisme, hôtellerie et restauration, où la France est classée la première au monde. On participe à l’économie du pays et on œuvre pour un domaine classé Patrimoine immatériel de l’Unesco», explique le fondateur du CPHRE.
«Parmi les 4.000 membres de notre groupe, il y a énormément de monde qui est en train de faire une démarche pour le Revenu de solidarité active (RSA), il y a des familles où il n’y a plus rien», souligne l’activiste.
Une situation pénible pour ceux qui apprécient ce métier «pour l’absence de monotonie», qui aiment servir et «être dans la discrétion». Mais la situation est encore plus difficile pour les «plus de 40 ans», qui ne sont plus embauchés en CDI, puisqu’ils sont vus par les DRH des entreprises comme des «personnes bien structurées dans leur tête, que l’on ne pourra pas manier à sa guise». Par conséquent, à la crise, s’ajoute la concurrence avec les jeunes à qui on propose «des salaires moindres».