La Russie s’est pourvue en cassation devant la Cour suprême des Pays-Bas pour demander l’annulation de la décision de la Cour d'appel de La Haye qui l’a condamnée à verser une indemnité de 57 milliards de dollars aux ex-actionnaires de l'ancien groupe pétrolier Ioukos.
«Les ex-actionnaires de Ioukos ont obtenu un contrôle des actifs de la société à l’aide d’une collusion prouvée, d’appels d’offres fictifs et de la corruption des fonctionnaires responsables de sa privatisation. En outre, des sociétés offshores contrôlées par des citoyens russes n’ont de facto pas payé des actions de Ioukos et n’ont donc pas contribué à l’économie russe», indique un communiqué du ministère.
La Justice russe rappelle que les anciens propriétaires du groupe pétrolier évitaient systématiquement de payer leurs impôts, sortaient des actifs du pays et blanchissaient de l’argent.
«C’est pourquoi les plaignants, qui ont mauvaise réputation, ne peuvent pas être considérés comme des investisseurs de bonne foi au sens du Traité sur la Charte de l'Énergie qu’ils évoquent. Des preuves de subornation du témoin principal dans l'affaire par des oligarques russes sont également présentées», souligne le ministère.
Affaire Ioukos
En 2003, les autorités russes ont accusé l'administration de Ioukos de crimes économiques. Plusieurs dirigeants de la compagnie, dont Mikhaïl Khodorkovski et Platon Lebedev, ont alors été condamnés à de lourdes peines de prison, principalement pour fraude et évasion fiscale. Par la suite, le groupe public Rosneft a acquis aux enchères la plupart des actifs de Ioukos.
Mikhaïl Khodorkovski a également été soupçonné d'avoir commandité en 1998 l'assassinat de Vladimir Petoukhov, maire de Nefteïougansk, ville de Sibérie où Ioukos tirait une large part de ses revenus. L'ancien chef de la sécurité de l'entreprise a été condamné en 2007 à la prison à perpétuité pour ce meurtre.
Après une incarcération de plus de 10 ans en Russie, Mikhaïl Khodorkovski a été gracié par le Président Poutine. Il vit en exil à l’étranger depuis sa libération en décembre 2013.
En 2014, la Cour permanente d’arbitrage (CPA) a pour la première fois condamné Moscou à payer 50 milliards de dollars d'indemnisation aux ex-actionnaires de Ioukos qui en réclamaient 114 à titre d'expropriation de leurs avoirs dans trois dossiers différents.
En avril 2016, suite à la contestation de la Russie, un tribunal de La Haye a annulé la décision, estimant que la CPA n'avait pas les compétences pour octroyer cette indemnisation.
Finalement, le 18 février 2020, la Cour d'appel de La Haye a invalidé le jugement de 2016 favorable à la Russie et a demandé le versement de 50 milliards de dollars aux actionnaires de Ioukos. En raison des pénalités de retard, le montant a atteint 57 milliards de dollars.