Dans les conditions de la pandémie de Covid-19, l’Union européenne se montre très vulnérable, explique au quotidien britannique The Independent le financier Georges Soros.
«Je suis particulièrement préoccupé par le survie de l’UE parce que c’est une union incomplète. Elle était en train d’être créée. Mais le processus n’a pas été accompli et cela rend l’Europe exceptionnellement vulnérable. Plus vulnérable que les États-Unis, non parce que c’est une union incomplète, mais parce qu’elle est fondée sur la primauté du droit. Les rouages de la justice tournent très lentement alors que les menaces comme le Covid-19 sont très rapides», souligne-t-il.
Georges Soros prend «très au sérieux» le récent jugement de la Cour constitutionnelle allemande au sujet des achats d'actifs de la Banque centrale européenne (BCE).
«Cette décision constitue une menace qui peut détruire l’UE, fondée sur l’État de droit, précisément parce qu’elle a été prononcée par la Cour constitutionnelle allemande qui est l’institution la plus respectée en Allemagne», poursuit-il.
Le milliardaire rappelle que la justice allemande a déjà contesté une décision de la Cour de justice européenne sur ce sujet.
«Lorsque l'Allemagne a rejoint l'UE, elle s'est engagée à respecter le droit européen. Mais la décision soulève une question encore plus importante: si le tribunal allemand peut remettre en cause les décisions de la Cour de justice européenne, d'autres pays peuvent-ils suivre son exemple? La Hongrie et la Pologne peuvent-elles décider si elles respectent le droit européen ou leurs propres tribunaux, dont l’UE a remis en question l’autorité? Cette question touche le cœur même de l'UE, qui repose sur l'État de droit», conclut-il.
La BCE face à la justice allemande
Le 2 mai la Cour constitutionnelle allemande a exigé que la BCE justifie dans les trois mois la validité des rachats de dette publique. Des magistrats de Karlsruhe demandent au Conseil des gouverneurs de la BCE de démontrer «de façon compréhensible et substantielle» que l’organisme n'a pas outrepassé les traités européens, sinon la Banque centrale allemande se verra interdire de participer à ce programme anti-crise mené depuis 2015 et renforcé face à la pandémie.
Ainsi, la justice allemande refuse de se plier à l'avis de la Cour de justice européenne, qui avait validé fin 2018 le programme de la BCE, et déplore l'absence de contrôles sur l'assouplissement quantitatif (quantitative easing) par le Parlement allemand.
Lundi 11 mai, Angela Merkel a déclaré lors d’une réunion des instances dirigeantes de la CDU que le problème soulevé par le jugement de la Cour constitutionnelle allemande au sujet des achats d'actifs de la BCE pouvait être résolu si la BCE expliquait ce programme.