L'Agence du médicament (ANSM) a averti vendredi que les effets indésirables signalés chez des malades du Covid-19 traités par hydroxychloroquine dessinaient un «signal de vigilance important», les patients atteints du coronavirus semblant présenter une «fragilité particulière» sur le plan cardiaque.
«Les malades du Covid sont plus fragiles sur le plan cardiovasculaire et donc plus susceptibles que les personnes lambda d'avoir des problèmes avec des médicaments qui sont délétères pour le coeur» tels que l'hydroxychloroquine, a expliqué à l'AFP Dominique Martin, directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament.
«La majorité des cas d'effets indésirables se répartissent par moitié entre lopinavir/ritonavir», un traitement contre le VIH commercialisé notamment sous le nom de Kaletra, «et hydroxychloroquine», un dérivé de l'anti-paludéen chloroquine utilisé en temps normal contre le lupus et la polyarthrite rhumatoïde.
Pour «une grande partie» d'entre eux, l'enquête a pu conclure à un lien «plausible» entre l'effet observé et le médicament pris par le patient.
De nombreux effets cardiaques signalés
Les effets indésirables de nature cardiaque, la moitié du total, ont fait l'objet d'une analyse particulière. Il en ressort que «quasiment tous» (43 sur 53) ont été signalés chez des patients traités «avec l'hydroxychloroquine, seule ou en association (notamment avec l'azithromycine)», un antibiotique.
Ce sont des effets secondaires «connus» de l'hydroxychloroquine, «mais il semble qu'ils soient majorés chez les patients du Covid», qui présentent souvent un déficit en potassium, élément essentiel à la contraction des muscles, et notamment du coeur, tandis que les données disponibles laissent penser que le nouveau coronavirus a aussi une toxicité propre sur le coeur.
Les effets indésirables liés au Kaletra sont eux essentiellement des atteintes du foie et des reins.
«Ces informations (...) constituent un signal important» et renforcent la nécessité de limiter l'usage de ces médicaments «à l'hôpital, sous étroite surveillance médicale», insiste l'ANSM, alors que plusieurs voix dans le monde médical et politique réclament la possibilité de pouvoir prescrire l'hydroxychloroquie de façon plus large.
En attendant les résultats des essais en cours sur l'efficacité de ce médicament, «le rapport bénéfice-risque nous paraît acceptable à l'hôpital dans le contexte» de l'absence de traitement reconnu, en revanche il n'est «pas acceptable en ville», où un patient ne pourra pas être secouru immédiatement en cas d'accident cardiaque à son domicile, résume Dominique Martin.