Tout plaquer et partir à plus de 2.500 kilomètres de chez soi pour recommencer sa vie. Défi relevé pour Jean-Luc Guennegues. Pendant dix ans, cet agriculteur a produit du lait dans une ferme du Finistère, riche d’une soixantaine de vaches. Mais épuisé par ses journées sans fin et le bras de fer avec les industriels, il s’est résolu début mars à jeter l’éponge.
«Ce qui me pousse à arrêter, c'est la conjoncture laitière», explique-t-il à Sputnik, affirmant avoir vu ses conditions de travail se dégrader ces dernières années. «J'en ai ras le bol de travailler sept jours sur sept et d'être à bout. De travailler 80 heures par semaine pour fructifier les coopératives autour de nous, alors que nous, on gagne rien».
Le lait dans la tourmente
Depuis une dizaine d'années, le prix du lait est touché par la chute des cours, ce qui empêche régulièrement les producteurs de s’octroyer une paie à la fin du mois. Cette situation est particulièrement sensible en Bretagne, première zone laitière d’Europe.
«Le prix du lait n'est pas en cohérence avec nos coûts de production», fustige M.Guennegues. «Les laiteries coopératives nous disent que le coût de production moyen en France est de 396 euros pour les 1.000 litres. Mais ils nous payent entre 336 et 350 euros les 1.000 litres, donc il y a un manque à gagner quelque part», poursuit-il.
Dénonçant un «manque de solidarité», il déplore par ailleurs que «les agriculteurs ne sont pas bien perçus par la population». «On est des pollueurs, on a une mauvaise image en France», dit-il agacé.
Repartir de zéro
C'est dans cet état d'esprit que Jean-Luc Guennegues a décidé de remettre les compteurs de sa vie à zéro et de redémarrer. Destination Russie, un pays qu’il a déjà eu l’occasion de découvrir en 2007, avant les sanctions occidentales et l’embargo alimentaire décrété par Moscou en réponse. En tant que conseiller invité pour l’entreprise de production porcine russe AgroBel, le Breton avait à l’époque travaillé dans la région de Belgorod, à 600 kilomètres au sud de Moscou, puis à Samara, sur la Volga.
«AgroBel c'était des élevages de porc de 2.500 à 5.000 têtes. On était là pour le démarrage de la production. C'est une société internationale qui nous payait et qui nous envoyait sur le terrain», se rappelle-t-il.
Il en repartira deux ans plus tard, fort d’une nouvelle expérience et d’impressions.
«J'ai aimé vivre en Russie, on était bien encadrés, les Russes nous écoutaient, il y avait l'envie d'apprendre et de profiter de nos connaissances», raconte l'agriculteur. Avant de poursuivre: «Nous avons été très bien reçus, jamais eu aucun souci».
«Dans un premier temps, je veux intégrer une entreprise comme salarié, consultant, ou manager», explique-t-il. «Il y a beaucoup de Français qui sont en Russie dans ce cadre-là qui travaillent pour des sociétés internationales ou russes».
Il ne reste alors plus qu’à attendre la fin du confinement pour ouvrir une nouvelle page.