«Nous sommes déjà confinés par le monde, par notre vie. Nous sommes séparés des gens. Alors nous n’avons pas besoin d’être confinés une deuxième fois», Marius sans domicile fixe.
Pour de nombreux sans domiciles fixes, adopter les consignes prodiguées par le gouvernent relève du casse-tête. Un correspondant de Sputnik a rencontré sur le pas de la porte d’un grand magasin Marius, un sans-abri de 62 ans qui est à la rue depuis 22 ans. Pour lui, malgré la «peur du coronavirus» cela «ne change rien [à sa, ndlr] vie», excepté qu’«il y a simplement moins de bruit et moins de monde dans la rue».
«Paris est comme une ville morte. C’est une situation étrange.»
Pour répondre à la problématique des personnes sans-abri — on compte près de 25.000 SDF en France — le ministre chargé de la Ville et du Logement a déclaré dans une interview à France Inter ce jeudi 19 mars que «des chambres d'hôtel sont en train d'être réquisitionnées dans Paris et sur le reste du territoire pour [les] accueillir pendant l'épidémie de coronavirus». L’objectif étant «de mettre toutes les personnes sans domicile fixe à l'abri pendant cette période de confinement».
Une proposition qui déplaît à Marius.
«Je suis mieux confiné ici! Aller dans les hôtels, c’est encore plus dangereux qu’ici. Là, il n’y a personne autour de moi. Il y a beaucoup de monde là-bas, c’est une faute du gouvernement.»
Contactée par Sputnik, Claire Duizabo, responsable de communication de l’association Entourage qui vient en aide aux personnes SDF, estime que «nous sommes dans une situation de crise. Il faut désormais s’organiser dans les prochains jours pour trouver du renfort et que le minimum vital soit assuré afin qu’ils puissent se nourrir, se laver et être en sécurité».
Le gouvernement doit jouer son rôle
Pour que les personnes qui ne disposent pas d’une place dans un centre d’hébergement, un centre d’accueil ou un hôtel social soient effectivement protégées, Claire Duizabo rappelle la nécessité «de réquisitionner des gymnases, des lieux de ce genre, pour les transformer en logement, dans non plus les entasser dans une pièce».
Selon Claire Duizabo, une des missions premières du gouvernement est de «bien informer sur la situation sanitaire actuelle et d’expliquer aux personnes de la rue les gestes barrières et les bonnes pratiques à avoir».
«Beaucoup ne comprennent pas cette histoire d’attestation. Un SDF qui se déplaçait à Paris pour aller récupérer ses papiers dans une permanence d’accueil et a été verbalisé d’une amende de 38 euros. Typiquement pour éviter ce genre d’aberration, il faut les prévenir.»
Par ailleurs, cette crise du coronavirus modifie le tissu associatif. Et pour cause, «Les associations de distribution alimentaire comme les Restos du cœur ou la Croix rouge, n’ont plus de bénévoles, ou quasiment plus. Ils avaient de nombreux bénévoles âgés qui sont restés en confinement car ce sont des populations à risque», constate la responsable communication d’Entourage.
Le coronavirus bouleverse les modes d’entraide
Alors comment aider si on le souhaite? Claire Duizabo avoue que «c’est très compliqué».
«Dans notre cas, notre mission est de créer du lien social entre les voisins et les SDF. On a créé une plateforme d’entraide en ligne qui s’appelle "Entourage", une application basée sur la géolocalisation sur laquelle on essaie de relayer les propositions des voisins, que ce soit un soutien moral ou matériel.»
L’association rappelle à ce titre que «71% d’entre eux possèdent un smartphone». «En cette situation de crise, cela va être un formidable outil de survie. Même si cela va poser des problèmes, car ils n’auront pas forcément d’endroit pour recharger leurs smartphones», déplore-t-elle.
«Il faut maintenir le lien avec les personnes SDF que vous connaissez, les appeler régulièrement pour savoir s’ils vont bien et s’ils ont trouvé un endroit pour dormir.»
En outre, pour les personnes qui souhaiteraient offrir un repas aux personnes sans abri, les maraudes à titre personnel, tout en respectant les gestes barrières, sont encore autorisées [au 19 mars, ndlr]. Le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner a assuré que des exceptions pourraient être tolérées pour les déplacements «au motif d’assistance aux personnes vulnérables».