Vendredi 13 mars, le chef du service des urgences de l’hôpital parisien Georges Pompidou, Philippe Juvin, était invité dans l’émission «C dans l’air» sur France 5, où il a livré ses explications sur le coronavirus. Tout d’abord, il estime que les cas annoncés par le gouvernement sont bien en deçà du nombre réel.
Pourquoi l’épidémie de #COVID19 est-elle considérée par Emmanuel #Macron comme la plus grave crise sanitaire qu’ait connue la France depuis un siècle ?
— C dans l'air (@Cdanslair) March 13, 2020
L'analyse de @philippejuvin, chef du service des urgences de l’hôpital Georges Pompidou à Paris 🔽#santé #coronavirus pic.twitter.com/bEdXBeOxmV
«Les cas qu’on nous annonce tous les jours, ce n’est qu’une partie émergée de l’iceberg», a-t-il affirmé.
Pour se justifier, il a pris l’exemple du Diamond Princess, ce paquebot resté coincé au large du Japon et où près de 700 personnes avaient été contaminées parmi les 3.700 passagers et membres d’équipage.
«Comme c’est un espace clos, on a testé tout le monde. Globalement, l’étude du Diamond Princess montre qu’une personne sur deux qui est positive n’a aucun signe clinique». En France, les 3.600 cas recensés ne sont en fait que les patients qui montrent d’importants signes de la maladie, sachant que tous n’ont pas encore été contrôlés. À cela, il faut ajouter les patients asymptomatiques, et multiplier le tout par deux pour avoir une estimation du nombre de cas réels, selon le médecin.
Le taux de mortalité est fallacieux
Le taux de mortalité est le nombre de morts divisé par le nombre de cas, a rappelé Philippe Juvin. Or, si le nombre de cas est sous-estimé, cela signifie que le taux de mortalité est moins important qu’annoncé. La Chine en avait annoncé un situé entre 1 et 3%, et cela sans compter les porteurs du virus qui ne présentaient pas de symptômes.
La situation en Italie
Le 13 mars, en Italie, le taux de mortalité était de 8%, soit bien supérieur à la normale. Mais selon le chef urgentiste, l’explication est à trouver dans le système de santé de ce pays «qui a une médecine de ville assez pauvre». Les malades se sont donc tous rendus à l’hôpital, où ils n’ont pas été tenus à l’écart des autres patients, favorisant ainsi la propagation du virus.
En France, les patients atteints du Covid-19 sont mis dans des chambres séparées. Lorsqu’un cas particulièrement critique nécessite une réanimation, là aussi c’est dans un endroit isolé. «Il y a beaucoup de réanimations en Italie qui ont une organisation en open space [espace ouvert, Ndlr]», a déploré le spécialiste. Il assure par conséquent qu’il y a un espoir pour que la France ne connaisse pas «une vague aussi grave» que celle des Italiens.
«On en a pour trois mois»
L’important, c’est la capacité des hôpitaux à tenir sur la durée, a-t-il affirmé.
«On en a pour trois mois. […] La désorganisation, la corona-panique, le fait qu’on ne sache pas bien distinguer les files de patients qui ont le virus et les autres, c’est ça qui pourrait nous amener à la catastrophe», a-t-il conclu.
S’exprimant cette fois sur Sud Radio, Philippe Juvin a expliqué que cette durée de trois mois venait du fait que le premier cas de coronavirus était apparu en Chine le 7 décembre, et que ce n’est que récemment que l’épidémie avait atteint son pic dans ce pays. La France doit donc s’attendre à devoir lutter contre l’épidémie «au moins jusqu’à l’été».
À propos de la fermeture des écoles décidée par le gouvernement, il a estimé que c’était «une bonne décision» mais a souligné le problème de la garde des enfants du personnel soignant. Il déconseille les gardes collectives car «ça ne sert à rien, ça revient à ouvrir les écoles», mais se demande comment le gouvernement pourra indemniser toutes les personnes assurant des gardes individuelles.