Ce 9 mars, une tribune publiée dans The Guardian met en cause le site pornographique mondialement connu Pornhub, et plus précisément une partie de son contenu. Signée de la main de Kate Isaacs, fondatrice de la campagne Not Your Porn, elle dénonce le manque de modération du site, notamment la publication de vidéos à caractère sexuel sans le consentement des participants, s’inscrivant dans la tendance du «revenge porn» ainsi que des vidéos de viols, incluant parfois des mineurs.
Citée par Kate Isaacs, une pétition a également été lancée qui demande carrément le retrait du site. Intitulée «Fermez Pornhub et tenez ses dirigeants responsables», elle a été signée par plus de 420.000 personnes à ce jour.
People have been calling on me to start a petition to shut down Pornhub and hold its executives accountable. Here it is. Please sign and share. https://t.co/llzoBsr1Jd
— Laila Mickelwait (@LailaMickelwait) February 11, 2020
#NotYourPorn
Kate Isaacs a lancé la campagne ainsi que le #NotYourPorn après qu’une de ses amies s’est fait pirater son compte Cloud l’année dernière et a vu ses vidéos privées publiées sur Pornhub. Les deux jeunes femmes ont tenté durant des semaines de faire retirer les films mais sur le site, une fois qu’une vidéo est retirée, une vidéo identique apparaît à cause du téléchargement. Après des mois de signalements au site et de tentatives de suppression, la vidéo s’est vue propulsée au top 5 des vidéos tendances de Pornhub aux Royaume-Uni.
Kate Isaacs a, depuis, travaillé avec une cinquantaine de femmes qui ont été transformées en «stars du porno» malgré elles, certaines étant mineures au moment des faits. Des vidéos volées qui se retrouvent dans la catégorie «enregistrement secret», un onglet toujours disponible sur le site.
Viols et abus sexuels publiés
Le problème de la publication des vidéos volées est revenu dans l’actualité après un autre témoignage, celui de Rose Kalemba. Elle a récemment partagé son histoire sur la BBC, plus exactement celle de son viol à l’âge de 14 ans et comment celui-ci s’est retrouvé sur Pornhub, la forçant à revivre «son cauchemar.» À la suite de la publication de l’article de la BBC, son nom complet s’est retrouvé en suggestions dans la barre de recherche du site pornographique. Ou encore fin 2019, une mère a retrouvé des images à caractère sexuel de sa fille de 15 ans disparue depuis près d’un an dans pas moins de 58 vidéos présentes sur Pornhub.
Face à ces accusations, le site s’est défendu et a affirmé que les cas d’abus sexuels sur mineurs n’apparaissaient que très rarement, ce qui pose déjà problème. Mais une enquête menée en collaboration entre le Times et Not Your Porn a permis de trouver un grand nombre d’images d’abus sexuels sur mineurs présentes sur le site après une courte recherche. Bien que la fondatrice ait très vite signalé les vidéos, il a fallu un certain temps avant que des mesures soient prises et Kate Isaacs a appellé le gouvernement anglais à bannir le site jusqu’à ce que tout le contenu non consenti soit supprimé.
Droit de réponse de Pornhub
Pornhub prône la liberté d’expression et assure que toutes les vidéos présentes sur la plateforme sont le résultat d’adultes consentants. Mais les nombreuses affaires comme celle de Rose prouvent le contraire. Nous nous sommes également documentés sur le site et nous avons trouvé plusieurs vidéos «volées» où souvent, des jeunes femmes, et parfois même des couples, ne se rendent pas compte qu’ils sont filmés. Dans un commentaire au Guardian, Pornhub a insisté sur les différentes procédures qu’il possède pour empêcher la publication de contenus illégaux:
« Pornhub s’est fermement engagé à éradiquer et à combattre les contenus impliquant des personnes non consentantes ou des mineurs. Toute suggestion contraire est catégoriquement et factuellement inexacte.»
En un an, Pornhub compte 42 milliards de visites et 6 millions de vidéos téléchargées, ce qui équivaut à 115 millions de visites par jour. Pour citer Pornhub, «c’est l'équivalent des populations du Canada, de l'Australie, de la Pologne et des Pays-Bas». Pour rappel, n’importe qui peut partager des vidéos sur la plateforme, l’équivalent d’un YouTube pornographique.
We join the call on the Canadian Government to:
— #NotYourPorn (@NotYourPorn) March 9, 2020
1) Review the Canadian Legislation
2) Ensure @mindgeek’s activities are in compliance with current laws on child pornography
3) Take whatever steps are necessary to make sure companies verify age and consent @Kate_Isaacs pic.twitter.com/pBoXUw8as3
La multinationale Mindgeek est l’heureuse propriétaire, entre autres, de Pornhub, Youporn, Redtube ou Brazzers ainsi que de diverses sociétés de production spécialisées dans la pornographie. Elle vaut des milliards de dollars, avec des bureaux à Londres ou au Luxembourg, et son siège social se trouve à Montréal au Canada. C’est pourquoi, dans une lettre au gouvernement canadien, Not Your Porn, en association avec des sénateurs et des politiques, a demandé à ce que le pays s’assure des activités de la société Mindgeek afin que celles-ci soient conformes avec la loi concernant la protection de l’enfance, et que les sociétés vérifient l’âge et le consentement des personnes apparaissant sur les vidéos publiées.