Pour les Haïtiens du Québec, 10 ans après le séisme en Haïti, «le traumatisme subsiste»

CC BY 2.0 / UN Photo / Logan Abassi / Dégâts du séisme en Haïti, janvier 2010
Dégâts du séisme en Haïti, janvier 2010 - Sputnik Afrique
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En janvier 2010, la perle des Antilles subissait un tremblement de terre dévastateur: au moins 200.000 personnes y ont laissé leur vie. Pour l’importante diaspora haïtienne qui vit au Québec, la blessure n’est toujours pas refermée. Sputnik revient sur cette tragédie avec Marjorie Villefranche, directrice de la Maison d’Haïti à Montréal.

Le 12 janvier 2010 à 16 heures 53 minutes et 10 secondes, heure locale, le destin d’Haïti a complètement basculé.

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D’une magnitude de 7,0 à 7,3, le séisme allait emporter la vie d’environ 200.000 personnes, selon les estimations les plus prudentes. Avec un épicentre situé tout près de Port-au-Prince, capitale de presque un million d’habitants, le tremblement de terre allait enliser le pays dans un vaste chantier de reconstruction, qui n’est pas terminé aujourd’hui.

La reconstruction du pays n’est pas terminée

Des commémorations de cette tragédie ont récemment eu lieu dans plusieurs villes du monde comme Port-au-Prince, New York, Miami, Paris et Montréal. Au Québec, où vivent environ 140.000 Haïtiens et de nombreux Québécois d’origine haïtienne, elles ont été particulièrement suivies.

Marjorie Villefranche, directrice de la Maison d’Haïti à Montréal, le plus important organisme haïtien dans la métropole québécoise, se souvient très bien de ce 12 janvier et de ses conséquences. Le 11 et 12 janvier derniers, la Maison d’Haïti a organisé des commémorations spéciales et une série de conférences pour permettre aux gens endeuillés de se recueillir et de faire le bilan des événements.

«Chaque année, aux alentours de cette date, le moral de la diaspora haïtienne est affecté. Même si les événements remontent à dix ans, il s’agit d’un traumatisme qui est encore très vivant, très réel. Les gens ne sont pas encore guéris et ils n’ont pas encore fait leur deuil. C’est difficile encore pour eux chaque année. Évidemment, les personnes qui ont perdu des proches revivent encore cette douleur», souligne d’abord Mme Villefranche à notre micro.

À la suite de la tragédie, entre 2010 et 2015, 15.000 Haïtiens sont partis gonfler les rangs de la diaspora haïtienne de la Belle Province. Québec avait alors assoupli ses règles d’immigration pour permettre aux Québéco-Haïtiens de faire venir leurs proches, dans un contexte où la plupart des infrastructures du pays avaient été détruites.

«C’est très important de faire une commémoration chaque année, car il ne faut pas oublier que les trois quarts des personnes qui ont péri ont été enterrées dans des fosses communes après le drame. Les proches de ces personnes n’ont donc jamais pu faire leur deuil correctement. Le traumatisme subsiste au Québec», précise la directrice de la Maison d’Haïti.

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De nombreuses ONG s’étaient évidemment ruées sur l’ancienne île d’Hispaniola pour venir en aide aux sinistrés. Mais au fil des années, de nombreux scandales de corruption impliquant des ONG ont éclaté.

Entre autres, l’organisme humanitaire OXFAM a trempé dans une affaire de prostitution qui a défrayé la chronique un peu partout sur la planète. L’ancien directeur d’Oxfam en Haïti, Roland van Hauwermeiren, a déjà reconnu dans un rapport commandé par son propre organisme qu’il avait rémunéré des prostituées pour avoir des rapports sexuels avec elles dans les locaux de l’organisation. 

«Durant la reconstruction, il y a eu énormément de gaspillage de ressources et de fonds investis dans de mauvais projets qui n’ont pas fonctionné. Les organismes humanitaires ont mis sur pied plusieurs projets sans demander l’avis de la population. [...] Il y a eu du vol, mais avant tout du gaspillage […] Surtout, de nombreux fonds promis par des instances n’ont jamais été acheminés sur le terrain», déplore-t-elle.

Mme Villefranche souligne enfin la générosité exceptionnelle des Québécois envers ce pays créole. Elle rappelle aussi que la diaspora haïtienne envoie chaque année deux milliards de dollars américains en Haïti. Sans cette précieuse aide de la diaspora, la population n’aurait pas survécu à l’après-séisme, estime-t-elle. La diaspora est surtout concentrée aux États-Unis, au Canada, en République dominicaine et en France.

«La générosité des Québécois est palpable. Quand il y a eu le tremblement de terre, les gestes de solidarité des Québécois étaient magnifiques», se réjouit Mme Villefranche.

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​Ce dixième anniversaire du séisme survient alors que le pays est plongé dans une nouvelle crise politique d’envergure. Haïti a effectivement débuté l’année sous le signe de l’insécurité et du chaos. Depuis février 2019, des citoyens multiplient les manifestations pour dénoncer la corruption et l’économie en chute libre.

Les opposants au Président Jovenel Moïse l’accusent toujours d’avoir détourné des fonds du Petrocaribe, un prêt accordé à Haïti par le Venezuela. Une enquête de la Cour supérieure des comptes a déjà conclu que le Président avait participé à cette fraude.

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