«Incitation au viol» ou raisonnement par l'absurde dans un débat sur le «politiquement correct»? Des propos de l'essayiste Alain Finkielkraut sur le viol ont suscité jeudi de nombreuses réactions indignées, relate l'AFP.
«Violez, violez, violez. Voilà, je dis aux hommes: "Violez les femmes". D'ailleurs, je viole ma femme tous les soirs. Tous les soirs, elle en a marre», s'est emporté le philosophe de 70 ans, mercredi soir dans un débat sur la chaîne LCI au cours duquel il avait précédemment fustigé «le politiquement correct», qualifié de «calvaire de la pensée».
«Vous n'avez pas le droit de dire ça! Ce n'est pas drôle», lui répond la militante féministe Caroline De Haas, tandis que le journaliste David Pujadas, qui animait l'émission «La Grande confrontation» sur le thème «Peut-on tout dire?», assure que «c'est du second degré».
Caroline De Haas avait auparavant reproché à Alain Finkielkraut d'avoir défendu Roman Polanski en suggérant que les faits pour lesquels le cinéaste est poursuivi aux États-Unis n'étaient «pas vraiment un viol» parce que l'adolescente de 13 ans qui l'avait accusé n'était «plus vraiment une petite fille».
«Quand vous dites ça, M. Finkielkraut, le message que vous envoyez à toutes les petites filles qui ont été violées dans ce pays, c'est le message que ce n'était pas grave», ajoute-t-elle, provoquant la réaction du philosophe.
«J'ai rappelé les faits, (...) cette jeune fille, qui avait en l'occurrence 13 ans et 9 mois, elle n'était pas impubère, elle avait un petit ami (...) Aujourd'hui, elle s'est réconciliée avec lui», poursuit Alain Finkielkraut, défenseur de longue date de Roman Polanski, visé depuis la semaine dernière par une nouvelle accusation de viol, aujourd'hui prescrite.
La courte séquence de 4 secondes, partagée sur les réseaux par l'organisation féministe «Nous Toutes», a été très partagée et a suscité de nombreux commentaires.
Sur Twitter, Marlène Schiappa s’est indignée des propos tenus par l’essayiste.
Merci à @carolinedehaas d’avoir rappelé la loi en direct à la télévision hier. Non, on ne peut pas appeler au viol des femmes !
— 🇫🇷 MarleneSchiappa (@MarleneSchiappa) November 14, 2019
Oui à l’humour et au second degré, non à la banalisation des violences sexistes et sexuelles !
Tandis que certains reprochent le caractère tronqué de l'extrait ou appellent à «voir l'ironie dans la phrase» de l'essayiste, d'autres s'indignent des propos tenus par le membre de l'Académie française.
Le nom du philosophe figurait parmi les sujets les plus commentés jeudi chez les utilisateurs français de Twitter.
C'est quoi le plus pourri de plaisanter sur le viol ou de sous-entendre que parce qu'une gamine de 13 ans est pubère un adulte peut la violer en la sodomisant ? J'hésite.
— ᴍɪᴋᴀ🦁 (@paolimika) November 14, 2019
«Monsieur, vous banalisez le viol. Vous insultez toutes les femmes victimes de viol conjugal», a estimé le collectif féministe «Nous Toutes» dans un tweet.
Si il était si intelligent, il aurait manié l'ironie avec beaucoup plus de finesse et pas comme un gros bulldozer dégueu comme ça a été le cas. Il faudra l'admettre, le cerveau de Finkielkraut nous a quitté à l'aube de l'an 2000 et chaque jour il fuit plus loin dans la galaxie...
— Bastien Simo 🎗 (@BastienGreen) November 15, 2019
«Ces propos sont inacceptables. Ils sont un appel au crime et ne doivent pas rester sans réponse», a réagi le Parti socialiste, disant attendre «une réaction ferme de LCI».
Le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a indiqué à l'AFP avoir été saisi par des téléspectateurs après la diffusion de cette séquence, sans préciser le nombre de signalements reçus.