«Nous avons reçu un SOS de Julian Assange écrit en morse», assure Aymeric Monville

© AP Photo / Matt DunhamJulian Assange
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Détenu dans une prison de haute sécurité, le fondateur de WikiLeaks Julian Assange risque d’être extradé aux États-Unis où il risque la prison pour divulgation de secrets d’État. Sa santé inquiète son entourage. Sputnik s’est entretenu avec Aymeric Monville, membre de WikiJustice, afin de faire le point sur l’état du lanceur d’alertes.

Ses parents assurent que sa santé se dégrade à un rythme alarmant. Ses soutiens exigent régulièrement «des preuves de vie». Le sort de Julian Assange, fondateur de WikiLeaks, organisation connue pour avoir notamment révélé des informations secrètes sur Hillary Clinton et les crimes de guerre américains en Irak, inquiète au plus haut point.

Julian Assange a été arrêté le 11 avril 2019 à Londres au sein de l’ambassade d’Équateur dans laquelle il était réfugié depuis plusieurs années après avoir été lâché par Lenín Moreno, le Président équatorien. Le fondateur de WikiLeaks a par la suite été condamné à cinquante semaines de prison par la justice anglaise pour avoir violé les termes de sa liberté conditionnelle. Il est actuellement incarcéré dans la prison de haute sécurité de Belmarsh à Londres. Julian Assange craint d’être extradé aux États-Unis où l’administration Trump a juré de le jeter en prison pour de nombreuses années.

​Il est accusé par Washington d’avoir rendu publics des secrets d’État. Le 27 septembre, le quotidien espagnol El Pais affirmait qu’une société de sécurité ibérique qui est sous le coup d’une enquête de la justice espagnole aurait espionné Julian Assange au profit des États-Unis lorsqu'il vivait dans l'ambassade d'Équateur. D’après le quotidien, Undercover Global, du nom de cette société, avait installé des micros dans les extincteurs de l'ambassade ainsi que dans les toilettes des femmes, où les avocats d'Assange se réunissaient par crainte d'être espionnés. Au-delà de cette affaire qui tient du film d’espionnage, Julian Assange est également poursuivi pour un viol présumé commis en Suède en 2010, une affaire qui a vu durant l’été sept témoins, dont deux nouveaux, être interrogés.

Afin de soutenir Julian Assange, le comité WikiJustice a vu le jour en mai dernier. L’organisation regroupe avocats, juristes, journalistes, politiques et des citoyens venus de tous horizons. Plusieurs personnalités telles que telles qu’Étienne Chouard, Olivier Besancenot, Jean BricmontMichel Collon ou encore Annie Lacroix-Riz, professeure émérite d’histoire, ont rejoint l’aventure. Aymeric Monville, directeur des éditions Delga et auteur du livre «Julian Assange en danger de mort», paru le 4 septembre 2019, fait partie de ce comité. Il s’est confié à Sputnik France sur l’état de santé de Julian Assange, les risques judiciaires qu’il encourt et les actions que son organisation compte mettre en place pour le soutenir. Entretien.

Sputnik France: Quelles nouvelles de l’état de santé de Julian Assange pouvez-vous nous donner?

Aymeric Monville: «Son avocate Jennifer Robinson, depuis le 14 juin, a dit que Julian Assange était dans l’aile médicalisée de la prison de Belmarsh. Curieusement, rien n’a été tenté pour sortir Julian de prison pour raison de santé, un traitement dont le dictateur chilien Augusto Pinochet a bénéficié dans le même pays, le Royaume-Uni. Nils Melzer, rapporteur de l’ONU sur la torture, a déclaré en mai que l’état de santé de Julian Assange était absolument déplorable et que ce dernier avait été victime de torture psychologique, qu’il l’était toujours et qu’il était susceptible de mourir en prison.»

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«Julian Assange est torturé, notre crainte est qu’il meure en prison»

Sputnik France: Deux nouveaux témoins ont récemment été entendus par la justice suédoise dans l'affaire Julian Assange. Il est poursuivi pour un viol présumé commis en Suède en 2010. Où en est-on de cette affaire?

Aymeric Monville: «On lui avait reproché le non-port d’un préservatif lors d’un rapport sexuel que Julian Assange assure consenti. Dans un premier temps, la procureure Eva Finné avait clos l’affaire. Puis elle a été rouverte sans ajout de pièce, ce qui est totalement illégal avant d’être classée sans suite. Puis elle a de nouveau été ouverte, pour une troisième fois, à la demande d’un avocat suédois nommé Claes Borgström. Cet individu est associé dans le même cabinet d'avocats que Thomas Bodström, ancien ministre de la Justice suédois impliqué dans une des pires histoires d'extradition vers des prisons secrètes de la CIA, en l'occurrence l'affaire Agiza et Al-Zeri. Le Canard Enchaîné avait d’ailleurs, dès 2010, qualifié toute cette affaire de "coup tordu des services, à l’ancienne". D’après Granma, le journal officiel du parti communiste cubain, l’une des plaignantes fait partie de National Endowment for Democracy (NED), une organisation américaine fondée conjointement par les partis démocrate et républicain. Tout ce dossier suédois est extrêmement louche. Julian Assange, juste après qu’il a publié la célèbre vidéo "Collateral Murders", l’une des plus importantes preuves de ce qu’est l’impérialisme américain en Irak, s’est rendu en Suède où il est tombé dans un piège.»

Sputnik France: La peine de prison de Julian Assange pour s’être «soustrait à la justice» expirait le 22 septembre dernier, mais une juge britannique a décidé de son maintien en détention. Comment expliquer une telle décision?

Aymeric Monville: «Il aurait dû être libéré. Mais il s’agit de le maintenir en détention en vue de son extradition vers les États-Unis. Ce que l’on ne commente pas assez – ni les médias, ni les avocats – concerne le fait que Julian Assange peut être envoyé vers les Etats-Unis à tout moment. Notamment avant le Brexit car cela pourra se faire dans un cadre européen qui prévoit les conditions d’une telle extradition.»

Sputnik France: Quelles seront les prochaines échéances judiciaires concernant Julian Assange?

Aymeric Monville: «Les 11 et 21 octobre auront lieu deux audiences très importantes, l’une préparatoire et l’autre de gestion. Nous avons eu confirmation par des avocats polonais spécialistes de l’extradition, que ces audiences auront pour but de préparer l’extradition de Julian Assange vers les États-Unis. C’est pour cela qu’il est essentiel de se mobiliser, y compris en rentrant dans les tribunaux car ces audiences sont ouvertes au public.»

​Sputnik France: Vous lancez un appel aux Gilets jaunes afin de traverser la Manche et d’aller soutenir le fondateur de Wikileaks…

Aymeric Monville: «Le mouvement WikiJustice, dont je suis un des représentants, est né dans le sillage du mouvement des Gilets jaunes dont beaucoup veulent la justice pour Julian Assange. Cette affaire concerne tout le monde. Les droits de Julian sont totalement lésés, sa détention est illégale alors qu’il est innocent de tout crime. Il faut une intervention populaire. Le mouvement des Gilets jaunes repose un peu sur l’esprit de 1789. Je rappelle la déclaration des Droits de l’Homme et le principe de souveraineté qui repose essentiellement sur la nation. C’est cette nation, détestant la tyrannie, qui réclame la justice. Et ses citoyens sont prêts à aller exercer leur droit de regard sur cette affaire.»

Sputnik France: Vous demandez également à ce que les citoyens écrivent à Julian Assange. Comment faire?

Aymeric Monville: «Il faut absolument noter sa date de naissance qui est le 3 juillet 1971. Ensuite le numéro d’écrou qui est le suivant: A9379AY. Et envoyer tout cela à la prison de Belmarsh. Le courrier avait été bloqué pendant un mois, d’après WikiLeaks, et le 24 septembre ils ont annoncé que Julian avait de nouveau accès à sa correspondance et qu’il avait reçu plus d’une centaine de lettres. Il faut continuer à lui écrire pour exiger des preuves de vie. Le comité WikiJustice a reçu un SOS de la part de Julian Assange écrit en morse ainsi qu’un poème. Dans une autre lettre, il assurait être «dans un endroit très sombre actuellement». Tout ceci nous incite à nous battre. Le comité WikiJustice s’est transformé en association et nous allons envoyer nos propres avocats et médecins au combat. Nous souhaitons également nous appuyer sur l’ONU pour avoir une enquête indépendante basée sur les fondements du droit international qui sont constamment violés dans cette affaire.»

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