Foot: «Un coach au rabais» pour les Lions indomptables du Cameroun?

© AFP 2024 STEVE JORDANÉquipe du Cameroun de football
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Sans sélectionneur depuis juillet, le Cameroun vient de confier son équipe nationale de foot au portugais Antonio Conceiçao da Silva Oliveira, au détriment des candidatures locales. Roger Milla, ancienne star du foot africain, revient avec d’autres analystes sur la polémique que suscite cette nomination. Tacles à gogo sur la pelouse de Sputnik.

«Le Cameroun est une équipe à la renommée internationale établie, du moins sur le plan continental. Après Clarence Seedorf, qui est un grand nom dans le monde du football, on se serait attendu à un coach du même calibre. Malheureusement, nous avons affaire à un illustre inconnu. Il faut être un spécialiste du football pour savoir qui il est. Pour le label “Lions indomptables” et vu son palmarès, c’est un coach au rabais», commente Christian Souga, journaliste, spécialiste des questions de sport sur une radio locale à Yaoundé, au micro de Sputnik.

Une diatribe qui vise le Portugais Antonio Conceiçao Da Silva Oliveira. Celui qui est plus connu sous le nom de «Toni Conceiçao» a été nommé sélectionneur de l’équipe nationale de football du Cameroun le 20 septembre dernier, suscitant un tollé général. Dans l’opinion, nombreux sont ceux qui ne comprennent pas le choix des dirigeants camerounais.

Si le choix du Portugais pour coacher les Lions indomptables, comme on surnomme l’équipe nationale du Cameroun, suscite autant de controverse, c’est d’abord parce qu’il est largement méconnu du grand public.

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Bien qu’ayant découvert Antonio Conceiçao Da Silva Oliveira à la faveur de cette actualité, la légende du football africain Roger Milla, préfère rester prudent, en attendant que le nouveau patron du banc de touche fasse ses preuves sur le terrain:

«Il est vrai que je ne connais pas le travail de ce technicien, je ne l’ai jamais vu entraîner. J’attends de voir ce qu’il va faire sur le banc de touche Camerounais. Il est difficile maintenant de pronostiquer sur ses capacités», commente prudemment l’ancien international camerounais au micro de Sputnik. 

Âgé de 57 ans, Antonio Conceiçao Da Silva Oliveira va entraîner pour la première fois une sélection nationale. Ancien défenseur de Braga et du FC Porto dans les années 1980, ex-international portugais, il a essentiellement exercé dans son pays et en Roumanie. Antonio Conceiçao da Silva Oliveira a ainsi dirigé plusieurs formations, au rang desquelles le CFR Cluj, à trois reprises, remportant avec celle-ci deux Coupes de Roumanie. Conceiçao a aussi été en poste brièvement à Al-Faisaly (Arabie saoudite) et au Nea Salamis (Chypre). Un palmarès bien maigre au goût de nombreux observateurs avertis du football au Cameroun, à l’instar de Léandre Nzié, journaliste et analyste des questions de sport.

«Quand on s’appelle “Cameroun” avec le palmarès construit dans le domaine du football, on mérite mieux en termes de sélectionneur national. Je pense que ce nouveau coach n’est pas à la hauteur des Lions indomptables», affirme d’emblée l’analyste au micro de Sputnik.

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Nommé à la surprise générale au moment où, au regard des candidatures annoncées, de nombreux observateurs s’attendaient à voir un entraîneur camerounais accéder au banc de touche, Antonio Conceiçao Da Silva Oliveira a déclenché une avalanche de contestations. Les dirigeants camerounais du football l’ont préféré aux anciens internationaux camerounais, dont Patrick Mboma, Rigobert Song –l’actuel sélectionneur des moins de 23 ans–, et François Omam-Biyik (désigné entraîneur adjoint), ainsi que Jean-Paul Akono, champion olympique en 2000 à Sydney. Un choix que regrette Christian Souga, qui estime que les candidats nationaux comme Patrick Mboma auraient largement mérité cette place:

«Pour moi, même si Patrick Mboma ne se prévaut pas d’une certaine expérience dans le monde du coaching, l’avoir comme entraîneur camerounais à la tête de l’équipe fanion aurait pu être un symbole fort. Surtout que la prochaine échéance de la Coupe d’Afrique des Nations 2021 devrait se dérouler au Cameroun. Tout le monde sait ce qu’il a apporté au pays sur le plan footballistique, mais malheureusement, les dirigeants ne lui ont pas donné l’opportunité de se rendre à nouveau utile sous la casquette de sélectionneur», se désole l’analyste au micro de Sputnik.  

Fort de son passé glorieux avec l’équipe nationale du Cameroun (57 apparitions, 33 buts), et nonobstant son manque d’expérience dans l’encadrement technique, Patrick Mboma était souvent perçu comme un candidat idéal à ce poste. Le champion d’Afrique 2000 et 2002, par ailleurs consultant en football sur une chaîne internationale, a été recalé contre toute attente.

«Le vécu de Patrick Mboma était un atout pour cette équipe. Il y a été en tant que joueur, pendant les grands défis de cette équipe depuis 1996. À partir des années 2000, il a connu des difficultés de non-paiement de primes avant les compétitions, ce qui n’a pas émoussé sa constance. Il a connu le succès dans des conditions difficiles. Il connaît la maison “Lions indomptables du Cameroun”. Au regard de toutes ces expériences, Patrick Mboma était le meilleur profil pour ces jeunes», développe Christian Souga au micro de Sputnik.

Dans ses fonctions, le nouveau sélectionneur des lions indomptables du Cameroun sera secondé par deux anciens internationaux, à savoir François Omam-Biyik, qui sera son principal adjoint, et Jacques Célestin Songo’o qui aura, lui, la charge des gardiens de but. Cependant, le choix des autorités camerounaises de remplacer le Néerlandais Clarence Seedorf –remercié après la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2019–, par un autre coach européen a réveillé le débat autour de la «nationalisation» du coach des Lions indomptables. Une «nationalisation» pour laquelle milite Roger Milla depuis plusieurs années déjà.

«Nous sommes déçus parce que nous espérions que ce soit un entraîneur camerounais cette fois. On fera avec celui qui a été choisi et on le jugera à ses résultats. Nous acceptons la décision qui a été prise et restons dans l’espoir qu’un Camerounais tienne ce banc de touche dans un avenir proche», confie la légende du football au micro de Sputnik.

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Pour l’ancienne gloire du football camerounais, il faut regarder du côté de l’Algérie et du Sénégal, les deux finalistes de la dernière CAN:

«Je souhaite qu’un Camerounais soit également entraîneur de notre équipe nationale. On peut suivre l’exemple des pays tels que le Sénégal, l’Algérie. Malgré cette volonté, la décision ne m’appartient pas; elle revient au ministre des Sports et à la fédération camerounaise de football. Ils assument cette responsabilité, nous attendons des résultats», commente le vieux lion du football. 

Dans ce débat sur la «nationalisation» du banc de touche des Lions indomptables, Léandre Nzié rame pour sa part à contre-courant. Pour ce spécialiste des questions de sport, le critère majeur doit être la compétence.

«La nomination d’un sélectionneur n’est pas une élection présidentielle, où la voix de tout le monde compte. Et il ne suffit pas de s’appeler Patrick Mboma et faire acte de candidature pour être recruté. Je pense que dans le football moderne, on ne devrait plus parler d’entraîneur local, c’est une forme de discrimination. On devrait recruter un entraîneur sur la base des compétences et non sur la base de sa nationalité», commente le journaliste.  

Si la nomination de Toni Conceiçao n’est pas très bien perçue par une bonne partie de l’opinion publique camerounaise, les challenges du nouveau sélectionneur sont nombreux. Il devra d’ores et déjà redorer le blason des quintuples champions d’Afrique après leur déculottée à la dernière Coupe d’Afrique des nations, où ils ont été éliminés dès les huitièmes de finale par le Nigeria.

«Le premier chantier, c’est la reconstruction de l’équipe. Nous revenons d’une campagne peu glorieuse en Égypte. Il y a eu des départs de joueurs-cadres, et tout porte à croire qu’ils ne reviendront pas. Il faudrait donc remobiliser les troupes après l’expérience égyptienne et essayer de trouver des joueurs avec des profils différents, qui peuvent se greffer à l’ossature existante», conclut Christian Souga au micro de Sputnik.   

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