Longuement attendu, le Tu-144 supersonique restauré a pris place dans la ville de Joukovski, qui porte le nom du père de l’aviation russe Nikolaï Joukovski, dans une banlieue de Moscou. Situé près d’un rond-point à l’entrée de la ville, le «Concorde soviétique» saluera dorénavant ceux qui se rendront à l’aéroport Joukovski, ainsi que les visiteurs de la ville, qui accueille du 27 août au 1 septembre le Salon de l’aéronautique et de l’espace MAKS.
Sputnik s’est entretenu avec l’un des initiateurs du projet et fondateur de la fondation Légendes de l’aviation, Vassili Pankratyev, mais aussi avec des habitants de cette ville qui a joué un rôle clé dans l’aéronautique russe, certains d’entre eux ayant même piloté ou voyagé à bord de l’aéronef. Son nez pointé vers le ciel, l’aéronef semble s’envoler vers d’autres cieux.
Musée et restaurant
Peint aux couleurs de la compagnie Aeroflot du temps de l’Union soviétique, l’avion a été mis sur pied début août, avant d’être présenté au public le 24 août, inauguration solennelle devant les habitants de la ville. Mais le projet ne s’arrête pas là.
«Actuellement, l’avion est installé sur des pieds, la pelouse s’étend au-dessous et aux alentours, de l’électricité a été installée sous terre pour que le leu d’exposition soit illuminé. C’est la première étape de notre projet», explique M.Pankratyev. «La deuxième étape prévoit l’aménagement du territoire, qui sera pavé, avec des bancs, une statue d’Andreï Toupolev [concepteur du Tu-144], un buste, devant l’avion. Nous voulons aussi construire un petit musée de Toupolev le long du côté gauche.»
Le musée hébergera des pièces qui appartenaient à Toupolev et à sa famille, ainsi que certaines de ses créations. «Nous souhaitons également construire un escalier en colimaçon ajouré vers le fuselage, au-dessus de l'aile droite, afin que les gens puissent découvrir l'intérieur de l'avion. À l'intérieur, nous voudrions également créer une exposition portant sur l'histoire des avions supersoniques de notre pays et de pays étrangers», poursuit-il.
Une autre idée est d’ouvrir un restaurant sous forme d’une tour de contrôle au-dessus du Tu-144. Là, «les gens pourraient s’asseoir dans une cabine en verre, comme sur un aérodrome, manger et contempler de haut cet avion unique».
Salon ouvert au public: effet de vol supersonique et simulateur de pilotage
Le salon du Tu-144 en trois sections s’ouvrira au public et invitera dès le début le visiteur à le découvrir grâce à un panneau interactif portant sur des informations historiques clefs. Le Concorde franco-anglais y figurera aussi. La seconde partie permettra au visiteur de s’immerger, comme s’il était à bord de l’avion en vol. Installé dans son siège, il pourra observer les paysages à travers le hublot avec un écran incrusté, et entendra les différents sons qui caractérisaient alors le vol de l’avion.
«La troisième section, c’est déjà le cockpit, où nous voudrions installer un simulateur, où une personne sera assise aux commandes et verra devant elle des images comme s’elle était en train de piloter l’avion», raconte M.Pankratyev.
Lors de la reconstruction, il a fallu trouver un consensus entre les exigences des constructeurs et celles des ingénieurs aéronautique.
Le dernier détail
«Notre tâche à la fin était de revérifier la solidité de la structure entière, que nous avons calculée et conçue. Nous avons mis en place une grande marge de sécurité en tenant compte de la charge de neige, de la charge du vent», précise-t-il. Or, il manque encore un détail important, selon lui, qui mettre prochainement un point final à l’apparence du Tu-144.
Installation du Tu-144 restauré à Joukovski.
— Catherine (@katesputnik) August 28, 2019
Crédit vidéo: Légendes de l'aviation pic.twitter.com/akHMjMYLS1
Le Tu-144: allumé, pendant l'installation et vu depuis le ciel.
— Catherine (@katesputnik) August 28, 2019
Crédit photo: fondation Légendes de l'aviation pic.twitter.com/urc0C6H7Cc
«On veut recouvrir les piliers d'acier inoxydable mat. Ainsi, lorsque vous regarderez de jour comme de nuit l’avion éclairé, vous aurez l’impression que l’avion décolle. […] Premièrement, ce sera une mesure anti-vandalisme, et deuxièmement, ce sera magnifique. Et nous allons graver sur cet acier inoxydable tous les noms et noms d'organisations qui ont contribué à ce projet.»
Mémoire «vivante», beauté et fierté
Rassemblés autour de ce joyau et jumeau du Concorde, les habitants de la ville ont observé un défilé aérien de chasseurs et bombardiers.
«C’est une joie, une beauté et un plaisir», a confié Kouzma Vapsinov, vétéran de la Seconde Guerre mondiale, à la question de savoir ce que signifiait pour lui l’inauguration de l’aéronef. Comme de nombreux habitants de Joukovski, il était dans le secteur aéronautique: «C’est l’aéronef que j’ai testé au sol, que j’ai appris à piloter.»
«J’ai travaillé toute ma vie sur cet avion. Antenne radar, blocs de navigation, d’indentification, tout cela a été dans mes mains», s’est souvenu Alexander Zlobine, spécialiste en localisation par radar.
Il y avait trois emplacements possibles pour le monument: devant la mairie de la ville, au-dessus de la porte principale de l’Institut de recherche aéronautique Gromov et, là où il se trouve. «Ici, au carrefour des routes, l’endroit est idéal», estime M.Zlobine.
Selon Vladimir Nossov, neveu du pilote d’essai soviétique Alexeï Blagovechtchenski, le monument est «une mémoire vivante, mémoire de nos proches qui ont contrôlé les essais de cet avion. J’imagine ce qu’auraient pu ressentir ceux qui l’ont créé, quelle chaleur, puisqu’ils croyaient en leur création».