Dans la nuit du 5 au 6 août 1997, le vol 801 décollait de Séoul, écrit le site d'information Gazeta.ru. A son bord se trouvaient également des citoyens de différents pays, notamment le pilote d'hélicoptère néo-zélandais Barry Small qui revenait à Guam pour une nouvelle saison de six mois de travail.
«Avant mon décollage mon père avait fait un infarctus. Je voulais refuser le contrat pour rester avec lui, mais il a insisté pour que je parte travailler», a-t-il déclaré dans une interview au National Geographic.
D'après Barry Small, dans l'ensemble le vol était très calme: à un moment donné il a même décidé de retirer ses chaussures pour se détendre après un retard de 12 heures à Séoul. Les problèmes ont commencé pendant la phase d'atterrissage.
Le contrôleur aérien a averti l'équipage que le système d'atterrissage ne fonctionnait pas - ce dispositif aurait pu aider le pilote à trouver la piste, mais il était en réparation pendant plusieurs mois, c'est pourquoi les signaux n'étaient pas envoyés.
«Korea 801, préparez-vous pour un atterrissage à l'aveugle», a communiqué le contrôleur.
De plus, les conditions météorologiques de l'île ne contribuaient pas à un atterrissage en douceur: la visibilité était de seulement 1,6 km à cause du vent et de la pluie. Sans compter l'état du pilote. A en juger par l'enregistrement des communications dans la cabine, Park Yong-chul ne s'était pas reposé avant le départ et s'endormait aux commandes. La seule chose qui le préoccupait était que l'escale à Guam dure seulement 3h30, avant le vol-retour.
Soudainement, le système d'atterrissage s'est allumé et a indiqué à l'équipage le vecteur d'atterrissage. Le pilote somnolant a oublié que cet appareil était défaillant et a décidé de se référer à ses informations pour atterrir, en dépit des multiples avertissements de l'ingénieur de bord concernant le dysfonctionnement du dispositif.
Comme si des centaines de Boeing avaient atterri en même temps
Quand l'avion, descendant à une vitesse verticale de 426 m/min, a passé le seuil des 256 mètres d'altitude, le GPWS a averti: «Minimum.» Après quoi le pilote en second a dit qu'il fallait repartir pour une nouvelle approche, car avec l'ingénieur de bord ils ne voyaient pas la piste d'atterrissage. Selon le décryptage de la communication de l'équipage, le commandant a été confus, mais a tout de même tiré sur le manche, après quoi l'appareil a commencé à relever le nez tout en poursuivant sa descente.
Mais cela ne pouvait plus sauver la situation: un Boeing 747 entièrement rempli pèse plusieurs centaines de tonnes et ne peut pas changer rapidement de direction.
«J'avais emprunté plusieurs fois ce vol. Quand j'ai compris qu'il restait environ 30 secondes jusqu'à l'atterrissage, je me suis penché pour remettre mes chaussures. Et ma position m'a sauvé - c'est à ce moment-là que nous avons percuté le sol. Après le choc l'avion a commencé à se désintégrer. J'ai réussi à regarder autour: il y avait des bouteilles et des sacs - tout ce qui pouvait tomber. Il semblait que des centaines de Boeing avaient atterri en même temps», se souvient Barry Small, passager du vol.
D'après ce dernier, quand l'avion s'est immobilisé le feu s'est déclaré à l'avant et s'est propagé dans le reste de l'appareil. Les lumières au sol ne fonctionnaient pas, mais les flammes étaient très intenses et permettaient de voir très clairement.
Après avoir repris ses esprits, l'homme a enlevé sa ceinture de sécurité et est revenu six rangées en arrière, en traînant sa jambe droite cassée. Il a réussi à sauter sur le sol par un trou dans la coque, où se trouvaient plusieurs survivants. Quelques minutes plus tard, l'avion s'est embrasé, propulsant en arrière les passagers dans une vague de flammes.
Après cela, Barry Small, immobilisé par sa fracture, pouvait seulement observer les autres appeler à l'aide:
«Je suis resté comme ça pendant longtemps. Et pendant tout ce temps j'entendais les gens crier en langue étrangère, alors que l'avion était dévoré par les flammes. Puis les cris sont devenus plus forts quand les flammes se sont rapprochées. Enfin l'incendie est devenu plus intense et les cris ont cessé.»
Les pompiers sont arrivés sur les lieux du crash seulement une heure après la découverte de la disparition de l'avion par les contrôleurs aériens. Le gouverneur de l'île Carl Gutierrez est arrivé sur place avec la brigade de sauveteurs. C'est lui qui a remarqué parmi les débris une fillette qui appelait sa mère: Rika Matsuda a réussi à survivre sans la moindre blessure. Mais le corps de sa mère a été découvert coincé entre les sièges.
Après avoir percuté une colline, l'avion s'est traîné sur plusieurs kilomètres avant de se désintégrer. Seulement 26 personnes sur les 254 passagers ont réussi à survivre.
Qui a débranché les appareils?
Étant donné que l'avion s'est écrasé sur le territoire américain, l'enquête sur les causes du crash a été prise en charge par le NTSB, Conseil national de la sécurité des transports. A l'étape préliminaire, il a été déterminé que de nombreux fragments de l'avion n'avaient pratiquement pas été endommagés. L'atterrissage était contrôlé: le pilote a de facto posé l'appareil, mais il l'a fait à cinq kilomètres de l'aéroport et une colline se dressait sur sa route.
Plus tard, pendant l'enquête, les spécialistes de l'association nationale américaine de la sécurité des vols et les experts de la Korean Air ont eu un désaccord, car la partie américaine avait accusé l'équipage d'avoir commis une erreur.
La Korean Air a protesté: selon les experts sud-coréens, le jour du crash le système d'atterrissage radar ne fonctionnait pas à l'aéroport de Guam. C'est ce système qui aurait dû avertir les pilotes de la descente dangereuse de l'avion, mais une erreur a été commise dans la rédaction du logiciel par le service de guidage.
De leur côté, les spécialistes américains ont déclaré que l'équipage avait été averti du débranchement du système radar, c'est pourquoi il aurait dû se référer aux indications des appareils. Par conséquent, les systèmes au sol n'avaient pas pu causer le crash.
Les parties ont réussi à s'entendre uniquement sur le fait qu'au moment du crash l'avion était en parfait état de fonctionnement: ni l'enregistrement des boîtes noires ni les actions de l'équipage n'indiquaient le contraire.
Finalement, la partie sud-coréenne a établi que les conditions météorologiques difficiles, notamment les fortes pluies, étaient la raison principale du crash du vol 801. Les déclarations concernant l'inexpérience et la fatigue du pilote de l'avion ont été formellement démenties.
Le rapport définitif du NTSB a été publié seulement le 13 janvier 2000. La partie américaine a campé sur sa position:
«Le Conseil national de la sécurité des transports établit que la raison probable de cet accident a été l'incapacité du commandant d'informer dûment et d'effectuer une manœuvre d'approche précise, ainsi que l'incapacité du second pilote et de l'ingénieur de bord de contrôler efficacement et de revérifier l'exécution de l'approche par le commandant. A cela ont contribué la fatigue du commandant et la préparation insuffisante du personnel de bord de la Korean Air.»
De plus, le rapport pointait également les lacunes dans le travail de la FAA, l'administration fédérale de l'aviation. Les enquêteurs ont déterminé qu'elle avait intentionnellement interdit à Guam d'utiliser les systèmes d'avertissement d'altitude minimale.
«Un élément important des appareils, qui aurait pu sauver la vie des victimes, a été débranché à cause d'une décision de la FAA. Le système d'avertissement d'approche du sol est un équipement standard des aéroports américains. Il utilise un radar pour observer les avions: en cas d'altitude trop basse le contrôleur en est informé et il en notifie l'équipage. Cependant, à Guam il observait uniquement les avions au-dessus de l'océan, sans couvrir la surface terrestre», avait indiqué l'enquêteur principal, Greg Feith, à la revue National Geographic.
Une autre version du crash du Boeing 747, d'ordre sociologique et culturel, a été également avancée. Elle relève de la spécificité de la culture coréenne. D'après une étude du sociologue Geert Hofstede, la Corée du Sud fait partie des États à indice élevé de «distance par rapport au pouvoir». Dans de telles cultures, un accent particulier est mis sur la hiérarchie sociale, c'est pourquoi il n'est pas convenu de contrarier les personnes plus âgées. Par exemple, dans la cabine de pilotage on ne peut pas contester les actions du commandant.
Selon le décryptage de l'enregistreur de bord, le pilote en second a fait allusion plusieurs fois à l'erreur du commandant et aurait probablement pu sauver l'appareil en s'emparant des commandes, mais n'a tout simplement pas osé le faire.
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.