«Give me liberty» de Kirill Mikhanovski, dans le TOP 5 du box-office français

© Sputnik . Oxana BobrovitchUn homme sur le bord d'une terrasse
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«Give me liberty», du réalisateur russo-américain Kirill Mikhanovski et présenté à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes, réussit l’exploit de rentrer dans le Top 5 du box-office en France. Touché par ce succès, le réalisateur s’est confié à Sputnik.

Des montagnes russes érigées en plein milieu du melting-pot américain. Une approche documentaire du quotidien d’un milieu d’émigrés. Une vision sans fard du handicap dans un monde «valide». Un rythme endiablé de succession d’évènements familiaux, sentimentaux, sociaux et urbains.

«Give me liberty», de Kirill Mikhanovski, est tout cela à la fois. Il est aussi cinquième dans le box-office des films le premier week-end sur les grands écrans en France. C’est une bonne performance, vu que ce film russo-américain est précédé par deux thrillers tels que Crawl et The Operative. Nous avons rencontré l’équipe du film lors du Festival de Cannes qui, d’après le réalisateur de «Give me liberty», a joué un grand rôle dans sa promotion.

«La participation au programme de la “Quinzaine des réalisateurs” et l’accueil à Cannes ont été très importants pour nous, confie Kirill Mikhanovski à Sputnik. C’est un honneur pour nous et nous sommes ravis que le film ait plu.»

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Le rythme de l’histoire au début évoque l’image d’une pellicule déchirée dans un projecteur cassé, quand les bobines défilent à toute vitesse, libérant la pellicule happée par le mécanisme. Et la vie de l’un des héros du film, le jeune Vic, défile aussi à ce rythme. Pour arriver à l’heure avec son minibus pour transporter des handicapés, pour aider son grand-père qui perd la tête, pour accompagner les proches d’une voisine décédée au cimetière… pour en fin de compte, accumuler du retard… et risquer sa place au nom de sa bonté de cœur.

«Je vais vous dire comme je sens les choses: la vie, c’est la guerre, explique Kirill Mikhanovski à Sputnik. C’est une bataille après l’autre.» Pourtant, «le film ne porte pas là-dessus. Du moins, il n’est pas si frontal, relativise le réalisateur. Oui, il nous pousse à réfléchir à ce qu’est l’immigration, tout comme il peut pousser à réfléchir aux relations entre les USA et la Russie.»

Est-elle simple, l’adaptation d’un émigré russe (et soviétique) aux States? Pour Kirill Mikhanovski, la vie dans un autre pays pour un émigré qui a décidé de s’y installer définitivement, «ne saurait être comparé à une (vraie) guerre», mais elle ressemble par sa violence à un arbre déraciné que l’on replante dans un autre sol, «cela fait mal et c’est dur».

«Je pense que l’immigration est un processus anormal, ce n’est pas sain, dit Kirill Mikhanovski. Mais une fois que c’est fait, il faut qu’on s’accroche: va-t-on survivre, ou pas?»

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Le réalisateur avoue que le processus de son adaptation «s’est passé sans trop d’encombres» parce qu’il est arrivé aux États-Unis «à un âge assez tendre». Ce qui ne l’a pas empêché d’être témoin de multiples vies d’autres émigrés, «d’un processus douloureux, d’une épreuve, surtout pour les couples et leurs relations humaines». Les premiers à en souffrir, précise le réalisateur, sont les enfants «parce que les adultes ne leur prêtent pas assez d’attention en essayant de trouver leur place.» Dans ce travail prenant, où les adultes acceptent les postes au-dessous de leurs compétences et passent tout leur temps libre à apprendre l’anglais, «le niveau d’exigence envers ces enfants reste à un niveau basique: “tu dois être mieux que tout le monde”». «Ça peut provoquer des tragédies: par exemple, la neurasthénie, qui cherche son issue dans la drogue,» rappelle Kirill Mikhanovski.

«Oui, c’était un combat. Mais ceux qui sont restés en URSS ont mené leur propre combat, précise Kirill Mikhanovski. On échange juste une guerre contre une autre. On change juste d’endroit pour vieillir et mourir. On n’arrive pas à déjouer les circonstances. On ne fait que surpasser le confort.»

Pour le réalisateur, il y a une autre catégorie de personnes qui paye un lourd tribut à l’émigration: les personnes âgées, puisqu’elles «émigrent pour les enfants, pour leur vie future», mais par ailleurs, ils perdent tout, «surtout leur histoire et leur passé, leurs habitudes et leurs relations, leur culture et leur langue, tout cela est sacrifié au nom de la vie nouvelle de leurs enfants.»

«L’émigration est un plongeon dans un inconfort extrême où on perd tout ce qui a été accumulé et où on recommence à zéro,» déplore Kirill Mikhanovski.

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Mais «Give me liberty» reste un message de bonheur, de liberté et d’humanisme. À un moment donné, le défilement serré d’évènements laisse place à une respiration, à un espace d’amour, aux propos intimes, à des échanges de regards, à une fusion de vies divergentes qui tentent de se rapprocher, à une tentative de conciliation de cultures différentes.

Voilà un descriptif du film fait par son réalisateur, dans lequel on décerne une lecture aussi simple que philosophique:

«Le film porte sur le fait que nous avons tous besoin d’aller quelque part, assure Kirill Mikhanovski. Et il faut qu’on y soit à temps. Par un concours de circonstances, on se retrouve dans un seul et unique espace avec l’intention d’atteindre chacun son propre but, dans un délai déterminé. Le film porte sur ce qui se passe si on n’y arrive pas.»

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