«L'accumulation d'or par la Banque de Russie semble être une stratégie optimale», selon Bloomberg

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Quand la Russie a commencé à vendre ses réserves en dollars pour acheter de l'or, cette stratégie a suscité beaucoup de scepticisme. Mais aujourd'hui que le prix du métal précieux est monté en flèche pour atteindre une valeur record depuis six ans, il est clair que Moscou avait pris la bonne décision, constate l'agence de presse Bloomberg.

Après l'adoption de sanctions à son encontre, la Russie a foncièrement revu la structure de ses réserves internationales. Actuellement, la Banque centrale détient 2.190 tonnes d'or pour environ 90 milliards de dollars - un record pour toute l'histoire postsoviétique. En dix ans, la part de ce métal précieux dans les réserves de change est passée de 3,5 à 18,6%. Pendant ce temps, le dollar a réduit sa part de presque un quart jusqu'à 21,9%.

L'imprévisibilité de l'administration Trump, l'appétit insatiable de la Réserve fédérale américaine (Fed) pour les emprunts, ainsi que l'instabilité géopolitique, rendent aujourd'hui l'or plus attractif que les obligations américaines.

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En 2010 encore, les investissements de la Banque de Russie dans ces obligations dépassaient 176 milliards de dollars. A partir de 2014, à mesure que la pression des sanctions de Washington se durcissait, la Banque centrale réduisait son portefeuille d'obligations. Début 2019, elle n'en détenait plus que 14 milliards de dollars.

«La Russie a montré au monde entier qu'un pays avec une grande économie et détenant les cinquièmes plus grandes réserves d'or pouvait se débarrasser d'une grande partie de ses actifs en dollars et se sentir parfaitement bien», écrit Bloomberg.

Dans le sillage de la Russie

Les banques centrales mondiales suivent l'exemple de la Russie et accélèrent leurs achats d'or. Selon le Conseil mondial de l'or (WGC), le volume de ce métal précieux dans les coffres des banques centrales a augmenté de 651 tonnes en un an - la progression la plus forte depuis 1971, quand les États-Unis avaient renoncé à l'étalon-or.

La Banque de Russie, qui a acheté  la moitié de cet or, est suivie par la Chine. Cette dernière possède 1.853 tonnes d'or pour une valeur de 76 milliards de dollars. Fin 2018, après plus de deux ans d'interruption, Pékin a significativement accru ses achats, ce qui a entraîné une augmentation du prix de l'or à son maximum depuis six mois - à 1.300 dollars l'once.

Un autre grand acheteur d'or est la Turquie, dont les réserves ont augmenté de 51,5 tonnes en un an. L'Inde cherche également à rejoindre ce club, dont la Banque centrale a augmenté ses réserves de presque 42 tonnes pour atteindre le record 600,4 tonnes l'an dernier.

L'intérêt porté à ce métal précieux s'explique par la volonté de diversifier les réserves et de réduire la dépendance envers le dollar américain, affirment les analystes. L'or prend de plus en plus d'importance en tant qu'assurance contre un défaut de paiement des États-Unis. La Chine et la Russie sont parfaitement conscientes du fait que les USA auront énormément de mal à rembourser leur dette et qu'en fin de compte l'achat d'obligations est inutile.

«La Russie et d'autres banques centrales sont conscientes de la nécessité d'accroître leurs réserves de change à cause de la crise imminente du dollar», estime Peter Schiff, patron de la société Euro Pacific Capital.

L'or monte en flèche

La stratégie russe d'accumulation d'or était jugée erronée par certains experts. Il y a seulement quatre ans, le quotidien Die Welt notait que «Poutine [poussait] son pays dans le piège des réserves d'or». En 2013, le métal précieux a connu une série de baisses, dont une a eu lieu en été 2018: en un mois, le prix de l'or en bourse avait chuté de 1.260 à 1.170 dollars l'once.

En mars 2019, il a chuté de 1.324 à 1.285 dollars, ce qui a affecté la valeur des réserves de la Banque de Russie. Par la suite les observateurs ont reconnu que la Russie se comportait comme un investisseur pragmatique et achetait de sang-froid à prix avantageux la marchandise activement vendue par d'autres.

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En mai, la Russie a acheté 6 tonnes (200.000 onces) d'or supplémentaires. La Banque centrale a procédé à cette acquisition juste avant le rallye de juin: l'or est passé de 1.280 dollars à son record depuis six ans - 1.400 dollars. Cette semaine, le prix de l'once à la Bourse de Londres a dépassé 1.428 dollars.

Les experts expliquent cette hausse par l'aggravation des relations entre les USA et l'Iran, mais aussi par le faible rendement des obligations américaines. En général, cela témoigne de l'approche d'une crise économique, par conséquent les investisseurs commencent à acheter les actifs de protection, notamment de l'or. De plus, le cours du dollar a atteint son minimum depuis trois mois. A terme, on s'attend à une poursuite de la baisse du dollar  à cause de la politique de la Fed, car le régulateur est disposé à réduire le taux d'intérêt.

Les experts sont certains que le prix de l'or continuera de grimper.

«Le rendement réel, proche de zéro, réduira la demande d'actifs en dollars et pourrait augmenter la demande en or. Et un mouvement des taux de la Fed dans le négatif provoquera forcément la hausse des prix du métal précieux», prévoit Goldman Sachs.

Selon la britannique Standard Chartered, au dernier trimestre de l'année l'or pourrait encore augmenter jusqu'à 1.450 dollars l'once. D'après la société Metal Focus, les appétits grandissants des bijoutiers accéléreront la demande mondiale en or en 2019, jusqu'au niveau le plus élevé depuis quatre ans.

De plus, selon les prévisions de la Goldman Sachs, dans les années à venir la production mondiale d'or diminuera. Et selon les calculs de l'un des plus grands producteur d'or, Goldcorp, d'ici 2022 la production de ce métal précieux reviendra au niveau du début du XXIe siècle. D'après l'agence géologique américaine, en maintenant le rythme de la production au niveau actuel, les réserves d'or s'épuiseront d'ici 2034.

«Dans ces conditions, l'accumulation d'or par la Banque de Russie semble être une stratégie optimale», constate Bloomberg.

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