Compte parodique Le Journal de l’Élysée: des ministres et des députés «ont usé de leur pouvoir d’intimidation»

© AFP 2024 KENZO TRIBOUILLARDFrench Junior Minister attached to the Prime Minister in charge of Gender Equality Marlene Schiappa arrives to visit the "Maison d'arret" (a category of prison in France), a women's prison in Versailles on March 5, 2019.
French Junior Minister attached to the Prime Minister in charge of Gender Equality Marlene Schiappa arrives to visit the Maison d'arret (a category of prison in France), a women's prison in Versailles on March 5, 2019. - Sputnik Afrique
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Le compte parodique Le Journal de l’Élysée, décrié à plusieurs reprises par des ministres et des députés LREM, revient dans une interview accordée à Sputnik sur ses motivations et les raisons ayant mené à la création de son compte, ainsi que sur les menaces dont il a été l’objet.

Difficile pour un utilisateur de Twitter de ne pas voir ce compte passer sur son fil d’accueil. Le Journal de l’Élysée, comptant aujourd’hui près de 60.000 abonnés, s’est en quelques mois fait un nom dans la bataille aux comptes parodiques qui a émergé sur les réseaux sociaux. Cette visibilité lui a d’ailleurs value des menaces de ministres -telles que Marlène Schiappa- ou de députés de la majorité.

​Interviewé par Sputnik, son auteur explique que sa motivation première était liée à la communautarisation de Twitter, qui pousse les adhérents à certaines idées politiques à se retrouver entre eux, ne parlant aux autres que lors de clashs ou pour du trolling.

Puis, c’est «la manipulation du langage, la novlang» qui l’a poussé à en jouer, en maîtrisant les codes de la communication politique. Rappelant par là même la disparition des Guignols de l’info.

La surcommunication du quinquennat Macron dans ses débuts s’est transformée en source d’inspiration: «C’était vraiment cette spécificité à travestir les mots et à toujours jouer le côté communication qui m’a motivé».

Il estime que le mouvement des Gilets jaunes a servi d’impulsion à l’émergence des comptes parodiques visant des membres du gouvernement, comme c’est le cas avec celui de Christophe Castagnette.

​Quant à expliquer comment de nombreuses personnes tombent dans le panneau de ses tweets malgré les mentions «parodie» qui ornent son nom de compte et sa description, il dresse un tableau plus sombre.

«Je pense que c’est quand même assez... inquiétant. Certains peuvent reprendre mes tweets en coupant la source ou en enlever la mention parodique. Ceux qui ne connaissent pas mon compte ou qui n’ont pas forcément les codes de l’humour du second degré sur les réseaux sociaux le prennent tel quel. Mais il y a aussi quelque chose de plus inquiétant encore. C’est le fait qu’aujourd’hui on a déjà vu tellement de choses avec le gouvernement Macron et parfois avec les gouvernements précédents que les gens sont prêts à croire des choses qui dans le fond sont totalement absurdes. Je pense que c’est assez révélateur de l’image que peut avoir la population en général des hommes politiques, même ceux qui travaillent dans les medias, qui sont pourtant plutôt informés.»

Et d’illustrer ses propos avec l’exemple de Christophe Castaner:

«Christophe Castaner, par exemple, qui avait dit une fois: ‘’Oui, les chômeurs, quand ils prennent leurs allocations vacances, ils partent deux ans aux Bahamas.’’. Des choses ridicules et vraiment très grossières qui au final font qu’ils ont eux-mêmes installés ce terrain. Donc au lieu de se dire que ce que publie mon compte est totalement absurde et donc faux, les gens se disent que ce ne serait pas la première fois qu’ils disent une connerie et ne vérifient plus avant de relayer.»

​Les réactions de députés ou de ministres visant directement le Journal de l’Élysée l’ont tout d’abord réellement surpris. Il est notamment question d'Aurore Bergé, Amélie de Montchalin, Pierre-Alain Raphan et Marlène Schiappa.

«Cela a été assez étonnant pour moi. Et peut-être même d’une certaine façon assez inquiétant pour la liberté d’expression en France. On a vu les attaques contre la liberté de manifester, contre la liberté de la presse qui se sont multipliées, notamment pendant la période des Gilets Jaunes. Je me dis que l’on arrive à un point où un compte parodique qui se revendique comme tel, qui ne cherche nullement à travestir la réalité, reçoit des intimidations et des menaces de certains députés, voire même de certains ministres, parce que son contenu ne leur plaît pas. Mais pour l’instant, je n’ai toujours pas été censuré, ni eu aucune suite judiciaire. Ils ont quand même usé de leur pouvoir d’intimidation.»

​Il précise cependant n’avoir reçu aucun message privé de députés ou ministres lui intimant de supprimer son compte. Les attaques ont eu lieu sur Twitter et dans les grands médias nationaux, en particulier en ce qui concerne Marlène Schiappa. Il rappelle pourtant qu’il est seul à gérer ce compte, sans équipe derrière lui.

«Que cela puisse entraîner une telle réaction, je me dis que c’est quand même assez surréaliste».

​L’auteur de ce compte a aussi reçu des menaces à l’encontre de son intégrité physique, de comptes «qui étaient sans photo de profil ou en général très récents. Au final, parfois les comptes disparaissaient». Il n’a néanmoins jamais déposé plainte, en particulier afin de protéger son identité.

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