Mediapart a pris connaissance du rapport des gendarmes qui ont refusé d’obéir au commissaire de Nice, Rabah Souchi, responsable des opérations du 23 mars 2019 à Nice, ville où avait eu lieu une manifestation interdite des Gilets jaunes. Au cours d’une charge, Geneviève Legay, militante d’Attac de 73 ans, avait été gravement blessée.
Les ordres, envoyés à toute «la hiérarchie et jusqu’à la Direction générale de la gendarmerie», ont été «disproportionnés face à la menace (foule calme)», indique le rapport qui présente un compte rendu de ces instructions.
Un officier de police chargé du maintien de l’ordre a expliqué à Mediapart que lors d’une situation comme celle du 23 mars, «une vague de refoulement suffit», les forces de l’ordre n’ont pas recours aux armes, les matraques sont rangées, les boucliers restent en position «latérale».
Lorsqu’il a été ordonné d’avoir recours à la force pour évacuer la place Garibaldi, les manifestants n’étaient pas menaçants, ce qui a également été confirmé par le commissaire Souchi qui n’a fait qu’évoquer «la présence d’un groupe d’une cinquantaine de personnes en attente» et «discutant dans le calme».
Un capitaine à la tête d’un escadron a ainsi décidé de ne pas engager ses hommes. Contacté par Mediapart, l’ancien commandant du Centre national d’entraînement des forces de gendarmerie de Saint-Astier, le général Bertrand Cavallier, a qualifié ce geste de «preuve de courage intellectuel et d’esprit de responsabilité»:
«Cette décision a été fondée puisque, hélas, cet usage de la force s’est avéré disproportionné, puisque la charge a causé des blessures graves sur une manifestante qui n’était pas du tout agressive.»
Selon la conclusion du compte rendu, cet escadron de gendarmerie n’a pas eu recours aux LBD et n’a blessé aucun manifestant.
Geneviève Legay a été hospitalisée après l'acte 19 pour «hémorragie méningée frontale gauche, hématome occipital droit, hématome cérébelleux droit, fracture de l'os rocher droit, fracture de l'os pariétal droit, fracture médico-sphénoïdale». L’enquête préliminaire en lien avec le dossier a été confiée à Hélène P., compagne du commissaire Rabah Souchi, qui a elle-même pris part aux opérations du maintien de l’ordre le 23 mars. De plus, si, au départ, le procureur de Nice avait affirmé qu’aucun heurt ne s’était produit entre les policiers et Mme Legay, il a par la suite démenti ses propos. L’avocat de la militante a demandé le dépaysement du dossier, sa requête devra être examinée le 10 juillet par la Cour de cassation.