L'Arabie saoudite aurait effectué plusieurs transactions réussies avec Pékin dans le dos de ses partenaires américains, écrit le quotidien Nezavissimaïa gazeta. La question de l'obtention de l'arme nucléaire par Riyad resurgit. Si cela arrivait, il faudrait s'attendre à une réaction du principal adversaire régional de l'Arabie saoudite: Téhéran.
Des sénateurs des deux partis ont soumis hier 22 résolutions conjointes pour empêcher la signature d'accords sur la vente d'armes américaines aux capitales arabes sans l'aval du pouvoir législatif.
Plus tôt, le secrétaire d’État américain Mike Pompeo avait admis que la Maison-Blanche avait pu profiter des privilèges du pouvoir exécutif pour signer plus de 20 accords avec les pays du Golfe.
«Les efforts de l'administration Trump pour vendre des armes américaines à l'Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis sont un autre exemple de manœuvre de contournement du Congrès et d'omission des droits de l'homme. Nous engageons cette démarche pour montrer que nous ne resterons pas les bras croisés en laissant le président et le secrétaire d’État ignorer la surveillance et le contrôle du Congrès dans le secteur des ventes d'armes», a déclaré le sénateur Robert Menendez concernant l'élaboration des résolutions.
Les sénateurs craignent que l'Arabie saoudite planche sur la création de l'arme nucléaire. En 2018, le prince héritier saoudien Mohammed avait déjà déclaré que «si l'Iran élaborait la bombe nucléaire, [l'Arabie saoudite] suivrait au plus vite son exemple».
«Dans les années 1950-1960, quand avaient commencé les discussions sur la nécessité d'un programme nucléaire islamique, l'Arabie saoudite était considérée comme l'un des trois États disposant de puissantes ressources financières permettant de créer la base pour un tel programme. La bombe nucléaire aurait pu régler le conflit nucléaire israélo-arabe, et les discussions sur la nécessité, pour les pays arabes, d'acquérir cette arme étaient très populaires dans les années 1960-1970. Malgré cela, le programme nucléaire n'a jamais été lancé. Du moins, aucune preuve de sources fiables n'a été présentée. Après l'obtention de l'arme nucléaire par le Pakistan, il s'est avéré que les nombreuses problèmes de sécurité dans les pays du Golfe pouvaient être réglés en empruntant ce bouclier nucléaire au Pakistan», a rappelé Grigori Loukianov, enseignant au département de science politique du Haut collège d'économie.
L'expert rappelle que durant la seconde moitié des années 1990 et au début des années 2000, certains étaient d'avis que l'Arabie saoudite n'avait pas besoin de l'arme nucléaire: elle serait déficitaire dans la dimension politique.
«La région, avec son infrastructure aussi bien étatique qu'économique faible et fragile, ne survivrait pas même à un conflit nucléaire limité. L'impact serait destructeur pour l'économie et détruirait le peu d'espoir d'une croissance active sérieuse de l'économie de la région à l'époque post-pétrolière. A court terme, l'apparition de l'arme nucléaire en Arabie saoudite comporte évidemment de très nombreux risques sur le plan politique. Il pourrait sembler que le premier État arabe à obtenir cette bombe pourrait attirer des alliés, des partisans et renforcerait son influence. Mais comme le montre la pratique c'est plutôt l'inverse qui se produit. Dès qu'un État de la région évoque la nécessité de mener son propre programme nucléaire, il se fait immédiatement plus d'ennemis que d'amis. L'Irak et la Libye en sont un parfait exemple», affirme Grigori Loukianov.
L'Arabie saoudite risquerait alors de se retrouver dans une situation où elle serait définitivement privée du soutien des États-Unis et des pays de l'UE, conclut l'expert.
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