Au Royaume-Uni, une partie de l'électorat s'est révoltée contre ce qui est ressenti comme une «trahison» du Brexit par les Conservateurs au pouvoir. En Italie, les élections européennes ont largement tourné au référendum pour ou contre Matteo Salvini et la Ligue. C'est pourquoi, les élections dans ces deux pays représentent un réel enjeu pour les Français.
Prenons tout d'abord le cas de l'Italie. La campagne y a été assez violente, du moins dans les journaux et sur les télévisions. La comparaison entre Salvini et Mussolini, voire Hitler, a été un des grands arguments du centre gauche. C'est dire la tension que ce scrutin a suscité. Les derniers sondages donnent cependant la Ligue entre 37% et 42%, le Parti démocrate (deux mensonges pour le prix d'un) entre 14% et 19%, et le M5S au même score. Or, le M5S avait obtenu environ 35% des voix lors des élections législatives de l'an dernier, quand la Ligue devait se contenter de 17%.
Très clairement, même si ces chiffres ne sont que des estimations avant le vote réel, on discerne le basculement de l'électorat italien. Le score du parti d'extrême-droite Fratelli d'Italia, avec entre 7% et 9%, vient le confirmer. Très clairement, le centre gauche tout comme le centre droit (Forza Italia est donné entre 3% et 7%) sont laminés. La campagne agressive du centre gauche n'a pas porté ses fruits. Loin de conduire à une «démonisation» de la Ligue, elle semble au contraire l'avoir renforcée. Les conséquences de ce basculement sont très importantes.
La situation n'est pas moins intéressante au Royaume-Uni. Les derniers sondages montrent que le Parti du Brexit, soit le parti créé par Nigel Farage, l'ancien dirigeant de UKIP, qui a quitté ce dernier, rassemble plus d'intentions de vote que les Conservateurs et les Travaillistes réunis. C'est un score historique. Il montre qu'une partie des électeurs, environs 35%, sont en train de se révolter contre l'attitude de Theresa May, la Première ministre, qui a cherché à noyer le poisson du Brexit dans l'eau de la Commission de Bruxelles.
Les sondages réalisés au Royaume-Uni sont cependant bien moins précis, et moins fiables, que ceux réalisés en France. Pourtant, ils montrent trois changements importants. Le premier est la montée régulière du Parti du Brexit, montée qui s'est faite jusqu'au lendemain des élections locales au détriment des Conservateurs. La chute de ces derniers, qui est spectaculaire au point qu'ils sont désormais devancés par les Libéraux-démocrates, signifie que le vote des «brexiters» du Parti conservateur a été siphonné par le Parti du Brexit. Mais, depuis les élections locales, et en particulier dans les deux dernières semaines, il semble bien que ce soit à leur tour les votes des Travaillistes qui se soient portées, du moins en partie, sur le Parti du Brexit. L'hémorragie est moins grave que pour les Conservateurs. Elle est cependant sensible. C'est le second changement notable. La capacité du Parti du Brexit d'attirer à lui une partie de l'électorat populaire votant pour les Travaillistes est significative du positionnement adopté par Nigel Farage. Le troisième changement important est la montée des Libéraux-démocrates, qui dépassent — on l'a dit — les Conservateurs et qui talonnent désormais les Travaillistes.
Assurément, les enjeux ne sont pas où on le croit. Il s'agit avant tout d'enjeux nationaux. Mais ces enjeux existent bel et bien.